Virginie Vanos : Bonjour Marc! Comment t’est venue l’idée de ce livre? Est-ce le fruit d’un processus de maturation ou as-tu eu un déclic qui t’a mené à cet opus?

Marc Favero : C’est le fruit d’un long processus de maturation. Des années d’enseignements et de discussions me poussaient à vouloir écrire mes réflexions mais je ne trouvais pas la forme ! Ce ne fut qu’en 2011 que je trouvai la forme qui me convenait : centrer ma réflexion autour des questions qui me paraissaient essentielles. Je voulais obtenir une réponse, peu importe laquelle. J’ai accepté de suivre ce que les éléments de la démonstration m’imposaient.

Virginie Vanos : Tu vas plus loin que Descartes qui affirmait «Je doute donc je pense. Je pense donc je suis». Crois-tu le doute "déraisonnable" vital au libre-arbitre?

Marc Favero : C’est une phase essentielle d’un processus de maturation, il faut intégrer ce que les autres disent ou ce que nos sens nous transmettent après les avoir examinés d’un œil critique. Descartes a un raisonnement circulaire, ayant pour volonté de démontrer l’existence de Dieu en partant de la pensée humaine, il pose pour acquis l’existence du Je alors que c’était ce qu’il fallait démontrer. Cette phase est le préalable à toute libération de la pensée sinon on reste prisonnier de présupposés qui limitent notre liberté !

Virginie Vanos : Tu cites Camus, le mythe de Sisyphe : « Le destin n’est pas une punition ». Personnellement, je considère ce déterminisme d’un triste fatalisme. Que me réponds-tu?

Marc Favero : Je me situe dans la vision Nietzschéenne de l’éternel retour... être capable de revivre sa vie et d’y adhérer sans rien vouloir y changer!

Je cite Sisyphe mais j’y vois une image du travail intellectuel qui est toujours à recommencer: pousser le rocher de nos certitudes jusqu’à ce qu’il retombe et recommencer avec un autre. Bien qu’impossible, c’est un idéal à atteindre. J’ai aussi du mal avec une vision déterministe du monde même si cela reste une question ouverte et paradoxale.

Sade défend un déterministe qui libère l’homme de toute culpabilité puisqu’il n’est plus responsable.

Virginie Vanos: Penses-tu l’Humain apte à assumer son destin via une philosophie construite sur son expérience propre ?

Marc Favero : C’est l’idéal que propose la philosophie grecque depuis 2 500 ans. Si nous ne réfléchissons pas à ce qui nous entoure, à ce qu’on vit, notre vie perd de son sel. Elle devient insipide car rien ne vient de nous ni ne nous appartient en propre. Si on admet qu’on peut tout perdre de ce qui nous entoure, notre seule possession est notre esprit. Il est fondamental de préserver son indépendance de pensée et ses particularités.

Virginie Vanos : La liberté de réflexion est-elle infinie ou connaît-elle certaines limites ?

Marc Favero : Si j’arrive sur ces 7 questions à ce que j’estime être des limites de la pensée humaine, cela reste valable à ce jour. Je suis persuadé que ces limites seront repoussées et que nos connaissances progresseront. Les questions qui touchent à l’humain ou à l’univers pourront avancer. Celles qui touchent au métaphysique en revanche risquent de demeurer au-delà de nos limites!

Virginie Vanos : Existe-t-il des sentiments, des croyances où il n’a pas lieu de douter ?

Marc Favero : Il faut distinguer 2 niveaux, celui de notre conviction et de nos sentiments, dont on n’a pas de raison de douter (pensons à l’évidence du sentiment amoureux) et celui de la vérité. La vérité est le niveau qui permet de faire partager notre vision à un autre de manière objective, à l’issue d’une démonstration, non d’une croyance.

Le problème est la confusion des niveaux : ce n’est pas parce que je suis persuadé d’une chose qu’elle est vraie !

Virginie Vanos : Enfin, que dirais-tu à d’éventuels contradicteurs?

Marc Favero : Lisez l’Enfer de Dante : «Il n’y a que les sots qui soient sûrs et déterminés». Si cette phrase intervient dans le livre sur l’Enfer, ce n’est pas sans raison!