Hongrie, Bulgarie et Moldavie se placent déjà plus ou moins sous la tutelle du Kremlin et divers partis et politiciens français, néerlandais, autrichiens, britanniques, dont le Front national, font déjà cour autour de Vladimir Poutine. Si les résultats du Brexit déçoivent, l'Angleterre, et de fait le Royaume Uni s'il subsiste, se tournera peut-être vers l'Ukip, parti totalement en cheville avec l'homme d'affaires Donald Trump, et l'Union Européenne sera prise en tenaille. C'est ce qu'a résumé le député européen, le Valenciano Esteban Gonzalez Pons, membre du Parti populaire européen (droite et centre-droit), fort brillamment.

Son discours mérite d'être traduit en toute langue du continent. En voici ma version issue du castillan.

Un rêve partagé

"L'Europe est cernée au nord par le populisme, au sud par les réfugiés naufragés, à l'est par les chars de Poutine, à l'ouest par le mur de Trump. Par la guerre pour le passé, par le Brexit pour l'avenir. L'Europe est à présent plus isolée que jamais, mais nos concitoyens n'en sont pas conscients, pourtant, de fait, l'Europe est la meilleure solution, et nous ne savons pas le leur expliquer. La mondialisation nous enseigne qu'aujourd'hui, l'Europe est indispensable, seule et unique alternative. Mais le Brexit nous enseigne aussi que l'Europe est réversible. Qu'on peut régresser vers le passé. Alors qu'hors de l'Europe, il fait si froid. Le Brexit est la décision la plus égoïste à avoir été prise depuis que Winston Churchill a sauvé l'Europe par le sang, la sueur et les larmes des Anglais (…) L'Europe n'est pas un marché, c'est la volonté d'un vivre ensemble. Quitter l'Europe n'est pas quitter un marché, c'est renoncer à des rêves partagés. On peut avoir un marché commun, mais si nous partageons pas des songes, nous n'aurons plus rien. L'Europe c'est la paix succédant au désastre de la guerre, c'est la réconciliation entre Français et Allemands, l'Europe, c'est la liberté retrouvée pour la Grèce, l'Espagne et le Portugal [naguère sous régimes dictatoriaux].

L'Europe, c'est la chute du mur de Berlin, l'Europe, c'est la chute du communisme. L'Europe, c'est le bien-être social ["l'État providence"], c'est la démocratie. Ce sont les droits fondamentaux. Pourrions-nous vivre sans tout cela ? Pouvons-nous renoncer à tout cela ? Pour un marché, allons-nous délaisser tout cela ?" Le vice-président du groupe PPE avait auparavant plaidé pour une véritable défense européenne, s'était déclaré en faveur de la lutte contre la pauvreté dans les pays dont sont issus les réfugiés, et lorsqu'il s'était rendu en Italie auprès des rescapés des tremblements de terre, il avait déjà déclaré que "l'Europe ne se définit pas par nos frontières, mais par nos valeurs".

En séance plénière, le jour du soixantième anniversaire du traité de Rome, il a repris à son compte le slogan du président JF Kennedy pour les États-Unis : "parlons moins de ce que l'Europe nous doit et davantage de ce que nous lui devons après tout ce que l'Europe nous a déjà apporté". Ce jour, Sir Tim Barrow a remis au président européen, Donald Tusk, à Bruxelles, la lettre de la Première ministre Theresa May.

"Nous quittons l'Union européenne, mais nous ne quittons pas l'Europe", écrit-elle en préambule d'une déclaration de six pages. Le Royaume-Uni quitte aussi le sous-comité sur l'énergie nucléaire du comité Énergie, Environnement et Transport, et de fait, la plupart des instances européennes. Die Welt a sobrement commenté : Farewell. Fare thee well, Inglaterra. Come back soon, Wales, Scotland & Northern Ireland.