Le parti espagnol dirigé par Pablo Iglesias avait connu une incroyable montée en puissance depuis sa naissance en 2014 et le début de l'austérité, douloureuse pour les Espagnols. Ainsi, il avait fait campagne en prônant une nouvelle politique anti-austérité, un peu à l'image de Syriza en Grèce au même moment. Mais désormais, les conséquences de la crise des subprimes tendent à s'affaiblir, et le pouvoir d'achat des Espagnols est revu à la hausse. Cela marque un arrêt brusque dans l'ascension remarquable de ce parti de gauche. Lors des élections législatives de la fin 2015, elle semblait même prête à s'emparer du pouvoir, en renversant l'alternance usuelle droite-gauche - elle avait alors été freinée de peu dans ses ambitions à cause de la droite espagnole.

Dorénavant, afin de reconquérir les électeurs, le parti doit définir une stratégie politique, et une nouvelle ligne, car c'est également à cause de ses tergiversations qu'elle ne plaît plus autant, et la direction le sait. D'où son rassemblement des 11 et 12 février, qui a pour objectif de définir, d'un accord collectif, la nouvelle ligne à suivre de Podemos.

Le mouvement se fracture en deux lignes

Le déchirement interne à Podemos est représenté par 2 voies éloignées l'une de l'autre, et par 2 figures emblématiques du mouvement, un peu à l'image du socialisme français. Le charismatique Pablo Iglesias, secrétaire général du parti, veut continuer à inscrire son mouvement dans la contestation et la revendication ouvrière.

Selon lui, Podemos doit rester fidèle à ce qu'il a toujours été, car il doit garder la confiance de ses électeurs. En d'autres termes un peu malheureux, accordons-le, il ne doit pas se " déradicaliser ", il doit continuer d'être protestataire et dans la proximité avec la classe laborieuse. Néanmoins, même sur ce cap qu'il s'est fixé, il n'est pas très clair, car il se définit lui-même, en fonction des occasions, tantôt comme " patriote ", tantôt comme " social-démocrate ", tantôt comme " marxiste.

"

Le second du parti, Inigo Errejon, souhaite qu'il se range, qu'il corresponde un peu plus à ce que sont les partis modérés espagnols, tels que le PSOE (Parti Socialiste des Ouvriers d'Espagne). En effet, de nombreux électeurs modérés craignent la virulence entretenue par Podemos depuis des années. De sorte qu'il parle désormais d'un parti politique "utile", notamment en ce qu'il peut être mis à l'épreuve du pouvoir et à ce qu'il ne reste pas seulement dans la contestation.

Pour lui, cela revient à faire du mouvement un parti fonctionnel, prêt à prendre en main les responsabilités qu'il demande. De ce fait, il mène une sorte de fronde au sein de l'opposition parlementaire, n'hésitant pas à rapprocher ses positions de celles du PSOE. La défiance des électeurs vient également de là, car certains veulent effectivement d'une gauche radicale, qui ne soit pas uniquement dans les mots mais surtout dans les actes.