Si le débat d'hier soir n'a pas été aussi sanglant qu'on l'aurait imaginé, il a tout de même montré que les deux candidats au deuxième tour de la primaire à gauche ne sont pas du tout sur la même longueur d'onde en ce qui concerne le travail. Plus que deux programmes qui s'opposent, ce sont deux philosophies qui s'affrontent.

Benoît Hamon a défendu avec ferveur l'idée d'une "raréfaction du travail", en particulier due au développement du numérique. Il a directement dégainé, en citant, en tout début de débat, un rapport de l'OCDE qui affirme que 10% des emplois en France "seraient menacés" par la révolution numérique, en 2025.

Fort de cette constatation, il a, une nouvelle fois, prôné la réforme phare de son programme, le revenu universel dans une logique "cohérente", lui accorde son adversaire : puisqu'il y a de moins en moins de travail, il faut que la population puisse obtenir de l'argent autrement. S'appuyant sur le soutien d'économistes de renom, tels que Thomas Piketty, Benoît Hamon a soutenu l'idée que ce revenu universel serait financé par un impôt appliqué aux classes les plus aisées.

Là où les choses se compliquent, c'est lorsque Manuel Valls s'engage dans une tout autre vision… Celui-ci croit à un "changement de nature", et non à une raréfaction, du travail, reprenant sa métaphore, désormais célèbre : "l'idée qu'il y aurait un gâteau qu'on se partagerait (…) ne me parait pas aujourd'hui viable.".

Manuel Valls insiste sur l'importance du 'Compte Personnel d'Activité', entré en vigueur début janvier. Il oppose au revenu universel de Benoît Hamon, la proposition d'un revenu décent qui serait distribué seulement aux moins aisés. Et la fracture atteint son apogée lorsque Manuel Valls se présente comme le candidat du travail, celui de "la feuille de paie" contre Benoît Hamon qui, à ses yeux, tendrait à être le candidat de "la feuille d'impôt".

Le débat à gauche : plutôt Macron ou Mélenchon ?

Juste avant de demander à Benoît Hamon et Manuel Valls s'ils accepteront les résultats de la primaire, les trois journalistes ont judicieusement insisté sur un point douloureux. Les deux candidats se sentent-ils plus proches de Macron ou de Mélenchon ? Cette question très attendue, voire perçue comme une formalité, a finalement mis au jour des différences non négligeables.

Benoît Hamon affirme que "la gauche commence avec ceux qui se disent de gauche", excluant de fait Emmanuel Macron. De l'autre côté, la gauche de Manuel Valls se trouve " au coeur des progressistes, de Benoît Hamon jusqu'à Emmanuel Macron".

Reste à voir quelle vision de la gauche va être choisie dimanche.