Pratiquement tous les titres de presse, toutes les radios, toutes les chaînes de télévision, affirment ou laissent entendre que, même mis en examen, François Fillon maintiendra sa candidature. Simple hypothèse contredisant des propos du candidat qui ne peuvent s'oublier ? Déduction de ceux de ses porte-paroles ? Les deux à fois, puisque l'intéressé affirme désormais qu'il s'en remettait à présent au seul suffrage universel et que ses soutiens, éludant ou non la question, n'écartent plus qu'une mise en examen ne fera pas fléchir François Fillon.

Au micro de LCI, ce vendredi matin, Thierry Solère, lui aussi visé par Le Canard enchaîné pour des emplois présumés fictifs, lui aussi ayant assuré qu'il poursuivrait l'hebdomadaire pour diffamation, a fini par dire que, oui François Fillon ira "jusqu'au bout", tandis que, de son côté, Éric Ciotti souligne la volonté du candidat de l'emporter, "quels que soient les aléas".

Légitimité du limier Fillon

Mais Thierry Solère, involontairement, cela semble une évidence, sur LCI, a enchaîné trois phrases qui pourraient prêter à confusion. François Fillon "est mis en cause par un article [du Canard enchaîné]. La justice est la même pour tout le monde. Il a fait son enquête et il répond aux questions".

Bref, on en viendrait à croire, en toute mauvaise foi, que François Fillon, après avoir enquêté sur Le Canard et exprimé ce qu'il en pensait, énoncera bientôt son verdict. Mais, "il y a un temps judiciaire, un temps politique". Le Canard enchaîné bénéficierait donc d'un sursis à statuer. Ce "il", on l'a compris, se rapporte d'évidence au parquet national financier.

Il est cependant révélateur. François Fillon a enquêté, s'est estimé victime, s'en est largement expliqué, mais tient bon. La victimisation fonctionne d'ailleurs à plein. Faute d'obtenir un second passage sur le divan de Karine Le Marchand, c'est l'hebdomadaire France Dimanche qui se charge de camper un François Fillon ayant pour seul réel confident le moine dominicain Louis Soltner, abbé de Saint-Pierre de Solesmes.

Car, confie "un ami du père de François Fillon", le jeune François "était rejeté et même harcelé par certains compagnons de classe car il était le fils du notaire". Et si "aujourd'hui, il est aussi ouvert aux autres, c'est parce qu'il a souffert d'avoir été rejeté enfant". Tellement ouvert que lorsqu'il était à Matignon, les ministres et secrétaires d'État se plaignaient de son hautain dédain pour leurs petits tracas. Si à l'écoute des autres qu'il a vraiment fallu que Georges Fenech rassemble une petite vingtaine d'élus pour que le candidat rétorque qu'il n'y a pas d'autre alternative possible à sa personne et que, de toute façon "il est trop tard". France Dimanche titre donc sur "sa déchirante confession".

Comprenez que même mis en examen, ayant fait son examen de conscience, ne pouvant plus décevoir les espoirs placés en lui par 2,9 millions d'électeurs de la primaire (66,5%), il portera sa croix et les péchés du monde puis ressuscitera au soir du 7 mai prochain. Son chemin, son Golgotha, rapporte Closer à la suite d'une confidence sur RTL, c'est le rail. Faute de Falcon, "François Fillon ne veut plus prendre le train… car il a peur". C'est d'ailleurs en voiture qu'il s'est rendu ce matin à Tourcoing, s'engouffrant dans la mairie, dédaignant de s'ouvrir aux pharisiens qui l'accueillaient en frappant des casseroles. Il pardonne car ils ne savent pas ce qu'ils font, et refusent le salut d'un programme de miséricorde.

Pour Closer, chez Les Régaliens (LR), c'est devenu "comme à la Légion : réfléchir, c'est commencer à désobéir". Onward, Christian Soldiers! Il ne manque plus un seul bouton de guêtre au parti des godillots, qui forment la garde prête à mourir lors des législatives, mais ne se rendra pas.