Christian Estrosi, président LR de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et fidèle sarkozyste, avait fait part de ses réticences dès l'élection de François Fillon à la primaire de la droite. Ces derniers jours, il a pris du recul vis-à-vis des propos de ce dernier, qui condamnait la présence d'un " cabinet noir " complotant contre lui à l'Elysée. De plus, au pire moment du scandale de détournement de fonds publics et d'emplois fictifs touchant François Fillon et son épouse, il avait demandé son retrait pour que Les Républicains privilégient une autre candidature.

Le maintien du député de Paris ne va donc pas dans son sens, et Christian Estrosi semble chercher un nouvel homme à appuyer. Or, justement, Emmanuel Macron effectue aujourd'hui un déplacement à Marseille, et il a demandé à rencontrer le président de région.

Estrosi accueille Macron à 8h45

La rencontre a eu lieu il y a peu, et non, ce n'est pas un poisson d'avril. Le président de région et son entourage ont justifié cet accueil en tant qu' " accueil républicain ", autrement dit, comme un accueil que monsieur Estrosi, par ses fonctions, se doit d'effectuer. C'est oublier qu'il n'avait pas réservé le même accueil républicain à Benoît Hamon, en déplacement à Marseille début mars. L'argument est donc non recevable, pour l'équipe de campagne de François Fillon, qui y voit déjà une trahison.

Hier, l'ancien soutien de Nicolas Sarkozy accompagnait le candidat de la droite à Toulon, et avait été sifflé par ses partisans à cause de cette décision. Néanmoins, l'entourage de Christian Estrosi dément tout ralliement :

" Christian Estrosi est et restera gaulliste et soutient le candidat de sa famille politique car il place la fidélité au-dessus de tout (...).

Il est allé au meeting de Fillon le rappeler et ne trahira pas les valeurs gaullistes qu'il défend. En tant que président de région, il a des majorités qui contiennent de la société civile et ne place pas l'appartenance à un parti politique comme boussole."

De plus, le président actuel de la région PACA a rencontré, dans le même temps, son ancien adversaire socialiste lors des régionales, aujourd'hui aux côtés d'Emmanuel Macron : Christophe Castaner.

Vaincu au premier tour des régionales, il avait retiré sa liste au second et appelé à voter pour Christian Estrosi au nom du front républicain contre le Front National. En ce sens, c'est en partie grâce à ce dernier que l'ancien maire de Nice se retrouve président du conseil régional de PACA, mais il n'est plus son adversaire socialiste puisque, à présent, il a rejoint les rangs d'En Marche !

Défendre le front républicain

Le journal local La Provence a confirmé cette rencontre entre le président de région et le candidat à la présidentielle à l'hôtel de région, dans le centre-ville de Marseille. Selon ce dernier, l'objectif implicite de la rencontre, pour Christian Estrosi, est de remettre en cause les priorités du candidat François Fillon en termes d'attaques.

En effet, hier, à Toulon, ce dernier s'en est presque exclusivement pris à Emmanuel Macron, sans envisager le problème frontiste. Or, justement, pour le président de région, il faut concentrer ses attaques sur Marine Le Pen et défendre le front républicain qui sera nécessaire en cas de second tour Macron-Le Pen. C'est une manière de remettre en cause les orientations décidées par la campagne de François Fillon, qui prennent un tournant presque populiste - le candidat de la droite réclamant la voix du peuple face au système médiatique et élitiste. Car certains élus et commentateurs craignent qu'en cas de second tour Macron-Le Pen, François Fillon n'appelle même pas à voter pour Emmanuel Macron, qui sera pourtant le seul candidat républicain.

Christian Estrosi a de nombreuses fois, depuis la fin du mois de novembre, rappelé la nécessité de se rassembler face à la menace du Front National, et donc, pour le candidat de la droite, de s'en prendre à Marine Le Pen au lieu de s'attaquer sans cesse à Emmanuel Macron. Ce dernier dit en savoir quelque chose, puisqu'il a été élu président de région grâce à cette même stratégie du front républicain, une alliance entre la droite et la gauche contre le FN.