Le lendemain du premier tour de l'élection présidentielle, près de 55% des Français sont orphelins de leur candidat et réalisent qu'ils vont devoir voter au second pour une personne qu'ils n'ont pas choisie. Cependant, alors qu'en 2002 tous avaient massivement choisi de faire barrage au Front National - Jean-Marie Le Pen n'avait conservé au second tour que les 18% qu'il avait obtenus au premier -, aujourd'hui il n'en est pas de même car les électorats se sont radicalisés. Ce n'est pas un terme péjoratif, il démontre sans doute au contraire que les électeurs se sont attachés plus profondément à la cause qu'ils avaient toujours défendue, et qu'il leur est de ce fait plus difficile de donner leur vote à une autre cause.

De sorte qu'un grand nombre a décidé de voter blanc ou de s'abstenir dimanche.

Le vote blanc et l'abstention très attendus

Un récent sondage a démontré que si les votes blancs et nuls avaient été comptés au nombre de 900 000 au premier tour - chiffre plutôt habituel, car beaucoup de candidats représentaient un large spectre politique - et l'abstention avait concerné 10 millions de Français (22% du corps électoral), au second tour il n'en serait pas de même car l'abstention et le vote blanc exploseraient. En effet, le sondage indique qu'au second tour près de 4 millions de personnes (soit à peu près 10% du corps électoral) seraient prêtes à déposer un bulletin blanc ou nul dans l'urne, autrement dit 4 fois plus de personnes qu'au premier tour.

L'abstention décollerait elle aussi, mais sans chiffre précis pour le moment. Une manière pour les électeurs de désavouer les deux candidats vainqueurs du premier tour, qui ne représentent pas leurs idées, et de montrer à quel point ils y sont attachés.

Le barrage républicain : une vraie passoire

Ainsi, la stratégie du barrage républicain semble avoir du mal à se mettre en place puisque chaque éditorialiste nous indique que voter blanc ou s'abstenir revient à voter pour Marine Le Pen.

Les candidats de la droite et de la gauche ont appelé à voter pour Emmanuel Macron, mais il n'en est pas de même pour l'ensemble de leur camp, car les élus se divisent sur la consigne de vote à donner. Jean-Luc Mélenchon, pour sa part, a organisé une consultation interne à son mouvement qui a donné le vote blanc ou nul gagnant ; c'est à présent la position officielle de la France insoumise.

Par ailleurs, d'autres électeurs de ces candidats perdants du premier tour se disent prêts à voter pour Marine Le Pen malgré les consignes de vote données par leur représentant. Encore une fois, donc, les élus se désolidarisent de leur base militante qui, elle, ne veut pas de ce choix ni des consignes de vote. Avec le peu de voix qui risque d'arriver à Emmanuel Macron, l'explosion du vote blanc et de l'abstention, et l'excellente campagne d'entre-deux tours de Marine Le Pen, le résultat du second tour ne semble plus si scellé que cela.