Dans cette saison 4 plus corsée de Peaky Blinders, on aime voir les protagonistes s'assumer de plus en plus comme bad-guys. Steven Knight, le créateur de la série, semble avoir voulu aller plus loin dans la mise en scène des liens entre les mafias, les hommes politiques, et les entreprises du début du XXe siècle. Cette saison permet de comprendre comment ils naissent, se construisent, et se développent. La série, qui plonge le spectateur dans l'histoire anglaise du début du XXe, éclaire l'actualité.

Trois grands acteurs venus du cinéma

Les 6 épisode sont disponibles sur Netflix.

Un palier est franchi en qualité et efficacité avec l'arrivée d'Adrien Brody en chef de gang italo-américain - Luca Changretta. Aux côtés de Cillian Murfy - alias Thomas Shelby - et Tom Hardy - alias Alfie Solomons, ces trois grands comédiens venus du grand écran amènent de la puissance aux propos intelligents développés au fil des épisodes. Il faut que cette série, prévue pour s'arrêter après la 5ème saison en 2019 - Bye bye ‘’Peaky Blinders’’ - continue ! On imagine que le scénario se prolonge jusqu'à notre histoire récente, tant le contexte de la série peut expliquer notre époque - l'Angleterre des années 20, l'essor du capitalisme et de l'industrie, et la crise de 1929 qui arrive.

La corruption, personnage secondaire

La violence dans la série est présente mais jamais obcsène. Dans une photographie soignée, les scènes de crime sont souvent accompagnées de remords et de cas de conscience, au moins pour les personnages principaux. Tuer mobilise la moralité du personnage, et laisse des traces, perturbe. Une violence qui est rendue nécessaire par le contexte de Corruption généralisée, qui dépasse les personnages.

Elle les pousse à agir pour la survie du clan Peaky Blinders, toujours en guerre avec les autres gangs de son territoire. Fait nouveau dans cette saison 4, la mafia italo-américaine débarque sur le vieux continent. Cette corruption, dont on parle plus aujourd'hui par le biais des lanceurs d'alerte, fait de la série un quasi cas pratique de compréhension de l'actualité.

L'organisation des Jeux Olympiques est par exemple une illustration que la corruption est actuellement répandue : Après une enquête ouverte afin de découvrir si l'attribution des J.O à Rio s'est faite suite à des corruptions de membres du CIO, c'est l'attribution des Jeux de Tokyo 2020 qui maintenant visée.

Steven Knight, au service du peuple ?

Steven Knight a co-créé dans les années 90 l'émission Qui veut gagner des millions, qui a inspiré le succès du film de Danny Boyle Slumdog Millionnaire. Il a également écrit le film Dirty Pretty Things, sorti en 2002 et mis en scène par Stephen Frears, oscarisé meilleur scénario original. Après avoir également écrit la pièce "The President of an Empty Room" jouée au National Theatre à Londres en 2005, il enchaîne en 2006 avec l'écriture d'un deuxième scénario, Amazing Grace, dans lequel il s'inspire de la vie de William Wilberforce, député britannique de la fin du XVIIIe ayant oeuvré pour l'abolition de l'esclavage.

En 2007, il écrit justement une histoire sur la mafia russe de Londres, Les Promesses de l'ombre, mis en scène par David Cronenberg. En 2013 il réalise pour la première fois de sa carrière un long métrage, Crazy Joe, où Jason Statham incarne un ancien militaire devenu SDF. Dans ses créations, l'actualité est présente, avec les thèmes comme le pouvoir, l'esclavage, la mafia, l'errance.

Mafias, hommes politiques et multinationales

L'inquiétude de la monarchie et des grands capitalistes face à la montée du socialisme en Europe est très bien illustrée, quand ce gang de Birmingham devient un outil au service du pouvoir politique en place, qui cherche à éteindre les manifestations qui naissent. On voit très bien aussi en quoi les grèves viennent gêner le commerce de la mafia et perturber son autoritarisme naturel.

Thomas Shelby cherche à casser la grève, en tant que patron d''entreprise, et parce qu'il est un caïd mafieux. Steven Knight rejoint ici les thèses de certains historiens à propos notamment de l'argent que les grands capitalistes auraient mobilisés pour financer l'arrivée d'Hitler au pouvoir afin de stopper la progression communiste, en s'appuyant sur les mafias.

Un parallèle avec l'actualité peut être fait. Avec par exemple l'enquête du journaliste Sandro Mattioli sur le trafic de déchets en Europe. Ou avec le documentaire encore visible sur Arte à propos des liens entre HSBC et le recyclage de l'argent des mafias. Sans spolier la saison, on peut quand même dire ici qu'elle ouvre justement sur cette dimension mafieuse internationale. A voir, sans modération !