Amis voyageurs, aujourd'hui notre épopée à travers la culture française s'arrête sur un artiste disparu en 2009, et qui aura marqué son époque par ses mélodies et par ses mots. Ce grand auteur compositeur poète comédien et amoureux de la langue française, c'est alain bashung. Né en 1947 à Paris et élevé en Alsace, il s'initie au chant et à l'harmonica en écoutant les pionniers du rock Elvis Presley, Gene Vincent et Little Richard.

Il faut attendre la fin des années 70 que la chance commence à lui sourire: une collaboration avec Boris Bergman et des singles comme "C'est la faute à Dylan", et "Bijou bijou".

Ce n'est que deux ans plus tard avec l'album "Roulette russe", en 1979, que le déclic survient auprès du public français, grâce à des merveilles comme "Toujours sur la ligne blanche" ou "Station service". La carrière d'Alain Bashung est lancée.

Alain Bashung, un artiste lunaire, aérien et mystérieux

La décennie 80 est marquée par de nombreux albums sombres et torturés "Novice" (le disque à la pochette obscure et mélancolique) et "Play blessures" écrit avec Serge Gainsbourg, mais aussi emprunts de dérisions et d'humour noir, à l'image des chansons "What's in a bird" et "Gaby, oh Gaby".

A partir de 1990, Alain Bashung s'entoure du parolier Jean Fauque. Cette collaboration va modifier l'atmosphère des albums, leur sonorité froide, pop, et l'intensité des textes du chanteur qui vont devenir encore plus personnels, puissants et poétiques: "Je sais plus qui tu es / Qui a commencé / Quelle est la mission / Soldat sans joie va déguerpis / L'amour t'a faussé compagnie." (fantaisie militaire, 1998), et très souvent grave: "J'étais censé t'étourdir / Sans aviron sans élixir / J'étais censé te soustraire / à la glu / Mes bras connaissent / La menace du futur / Les délices qu'on ampute / Pour l'amour d'une connasse." (Mes bras, 2002).

Dès lors, l'artiste va entretenir une image lunaire et mystérieuse, avec un coté sombre que l'on retrouve sur la plupart des photos dans les médias, un coté lumineux et fulgurent dégagés pendant ses concerts. Un sensibilité à fleur de peau à l'image de ce: "vous me troublez" lancé à son public qui l'ovationne lors de sa "tournée des grands espaces" (2003).

Alain Bashung, fantaisie militaire et "fantaisie littéraire"

En 1998, l'album "Fantaisie militaire" est un énorme succès auprès de la critique mais aussi auprès du public. La même année, les Victoires de la musique vont décerner plusieurs prix, notamment le trophée du "Meilleur album des vingts dernières années". L'album de "La nuit je mens", "Mes prisons" ou encore "Angora", est un album musicalement dense, riche à l'image des invités qui apportent leur contribution: Adrian Utley (guitariste de Portishead), Les Valentins, Rodolphe Burger, et Jean Fauque.

Des chansons rock ("Fantaisie militaire", "Mes prisons"), d'autres avec des arrangements drum & bass ("Samuel Hall", "2043").

Malgré une insuffisance respiratoire une tournée avait été lancée un au auparavant, afin que le chanteur défende son nouvel album "Bleu pétrole". Il ne va pas sans dire que "le monsieur" est devenu en un peu plus de 30 ans un artiste majeur de la chanson et du rock français. Il a toujours su se renouveler et repousser les limites de ses compositions à l'image du très complexe et ambitieux "L'imprudence" en 2002.

Le journaliste Gilles Verlant écrira que le travail de Bashung était celui "d'un orfèvre, d'un joaillier, d'un horloger maniaque." Homme sage et élégant, gentleman mélancolique et discret, homme de tous les publics, les plus férus de rock aux amoureux de la chanson française. Il laisse de nombreux héritiers spirituels et artistiques: Dominique A, Miossec, ou encore Radio Elvis.

Alain Bashung est décédé le 14 mars 2009 d'un cancer du poumon, "saloperie de Gauloise".