Cette année a été atypique, dominée par l'émergence de la maladie du coronavirus, qui a provoqué une pandémie mondiale et a conduit une grande partie de la population de la planète à s'habituer à une nouvelle réalité de confinement, de mesures de distanciation sociale et d'utilisation de masques faciaux. La crise sanitaire a pris le monde au dépourvu et a trouvé un terrain fertile pour la profusion d'une série de fausses informations, de l'émergence du virus aux méthodes de prévention et à ses traitements.

Cependant, tout n’était pas nouveau cette année, de vieilles habitudes sont restées comme l’utilisation des réseaux sociaux par Donald Trump pour répandre de fausses informations. Candidat pour un second mandat à la présidence des États-Unis, Trump a revendiqué - sans preuves - une série de fraudes dans le système électoral américain, aboutissant à son refus d'accepter la victoire du président élu, le démocrate Joe Biden.

Une nouveauté dans cette histoire a été la décision des principales plateformes de réseaux sociaux, comme Twitter et Facebook, de commencer à signaler certains contenus de Trump comme «potentiellement trompeurs». La nouvelle fonctionnalité, cependant, ne s'appliquait pas uniquement au président américain, représentant une étape importante dans la lutte contre les fausses informations sur les réseaux sociaux.

L'année 2020 a également vu les services de fact-checking devenir des outils vitaux dans cette lutte contre l’infodémie.

Dans le cadre de cet effort, Blasting News a créé le projet Ce n’est pas vrai, qui propose à nos lecteurs une sélection hebdomadaire des fausses informations les plus partagées sur les réseaux sociaux en quatre langues: anglais, portugais, français et italien. Découvrez ci-dessous dix des fausses déclarations les plus importantes dans le monde partagées au cours de cette année.

Etats-Unis

Déclaration : Le président Donald Trump a déclaré que le vote postal mènerait à beaucoup de fraudes et que la Californie avait envoyé des bulletins aux sans-papiers

Les faits : Le 19 mai, dans une série de tweets, Donald Trump a déclaré que le vote postal est “énormément frauduleux” et que les bulletins en Californie iraient “chez n’importe qui habitant dans l’état, peu importe qui ils sont et comment ils sont venus ici”.

Plus tard dans la journée, lors d’une conférence de presse, Trump a répété cette déclaration et a dit que “les gens qui ne sont pas des citoyens, clandestins, n’importe qui entrant en Californie peut obtenir un bulletin”.

La vérité : Justin Levitt, un professeur à l’école de Droit de Loyola à Los Angeles, et un expert en droit constitutionnel et en droit de la démocratie, a examiné les élections présidentielles, primaires, spéciales et municipales entre 2000 et 2014 aux Etats-Unis. Il a trouvé qu’il y avait eu 31 incidents de fraudes chez les électeurs. Selon lui, dans un article publié sur le Washington Post le 6 août 2014, lors des élections présidentielles et primaires seulement, plus d’un milliard de bulletins ont été jetés lors de cette période.

Lors d’une interview pour CNN, Richard Hasen, un professeur de droit et de sciences politiques à UC Irvine, a dit que si “les fraudes à travers les votes par procuration arrivent à un niveau relativement important comparées à d’autres fraudes lors des élections”, ce niveau reste cependant “assez bas”.

Twitter a décrit le tweet de Trump “d'information potentiellement trompeuse” et a ajouté un lien “Prouvez les faits sur le vote postal”, en dessous des mots du président. En réponse, Trump a menacé de réguler et fermer les plateformes de réseaux sociaux qui “réduisent au silence les voix des conservateurs”.

Etats-Unis

Déclaration : La mort de George Floyd a été mise en scène et Derek Chauvin est un acteur

Les faits : Sur les réseaux sociaux, des rumeurs sur la mise en scène de la mort de George Floyd ont circulé.

Une vidéo déclare que Floyd n’aurait pas été tué par Derek Chauvin, le policier de Minnesota qui a été accusé de meurtre et que ce dernier serait un acteur. Le 29 mai, une chaîne YouTube d’idées conspirationnistes, JonXArmy, a partagé une vidéo déclarant que la mort de George Floyd avait été mise en scène. La vidéo a été partagée presque 100 fois sur Facebook et a été vue par 1,3 millions de personnes. Sur Twitter, ces dernières semaines, les utilisateurs ont partagé des centaines de fois des tweets mettant en avant une seule idée, que “George Floyd n’est pas mort”.

La vérité : George Floyd a été tué par la police ce 25 mai 2020. Derek Chauvin, l’agent de police qui s’est mis à genou sur le coup de Floyd a été licencié et accusé pour meurtre au troisième degré ainsi que pour homicide volontaire au deuxième degré.

Trois policiers ont été accusés de complicité de meurtre au deuxième degré. YouTube a supprimé la vidéo postée par JonXArmy, disant qu’elle ne suivait pas les règles contre les discours incitant à la haine.

Monde

Déclaration : L’OMS déclare que les patients asymptomatiques ne peuvent pas transmettre le COVID-19

Les faits : Maria Van Kerkhove, directrice technique de la réponse au coronavirus de l’Organisation Mondiale de la Santé et cheffe du service des maladies émergentes et des zoonose, a dit lors d’une conférence de presse à Genève le 8 juin : "À partir des informations que nous avons, il semblerait rare qu’une personne asymptomatique le transmette à un second individu”. Après cette déclaration, un contresens a été diffusé sur les réseaux sociaux sur le fait que les patients asymptomatiques ne transmettent pas le nouveau coronavirus.

La vérité : Le 9 juin, lors d'un question/réponse, Van Kerkhove a dit : “J’ai utilisé la phrase ‘très rare’ et je pense qu’il y a eu un contresens qui affirme que les transmissions asymptomatiques globales sont très rares. Ce à quoi je faisais référence était un sous-ensemble d’études. Je faisais aussi référence à des informations non-publiées”. “Nous savons que certaines personnes qui sont asymptomatiques, ou certaines personnes qui n’ont pas de symptôme, peuvent transmettre le virus. Ainsi, ce que nous devons mieux comprendre c’est combien de personnes dans la population n’ont pas de symptôme et séparément combien de ces individus vont le transmettre à d’autres”, a-t-elle conclu. Pendant la même session de question/réponse, Docteur Michael Ryan, directeur du programme des urgences médicales de l’OMS, a aussi dit qu’il était “absolument convaincu” que le transmission due à des cas asymptomatique avait lieu, et que et a affirmé : “le problème c'est de savoir combien”.

Royaume-Uni

Déclaration : L'injection d'ARN lors du vaccin contre le coronavirus à une personne modifie l'ADN d'une cellule humaine

Les faits : Des posts publiés sur les réseaux sociaux en décembre affirment que le vaccin contre le coronavirus modifie l'ADN d'une cellule humaine. Cette allégation fait suite à l'annonce de l'approbation du vaccin Pfizer/BioNTech COVID-19 pour une utilisation à partir de la semaine prochaine au Royaume-Uni. Les résidents des foyers de soins et leurs soignants seront les premiers à se faire vacciner, a confirmé le Comité mixte gouvernemental sur la vaccination et l'immunisation (JCVI).

La vérité : Certains des vaccins candidats, y compris celui approuvé par le Royaume-Uni et développé par Pfizer/BioNTech, utilisent un fragment du matériel génétique du virus appelé ARN messager qui produit une protéine. Le corps l'utilise pour construire ses propres copies afin que le système immunitaire puisse réagir en produisant des anticorps combattant cette protéine. “L'injection d'ARN dans une personne ne fait rien à l'ADN d'une cellule humaine”, a déclaré le professeur Jeffrey Almond de l'Université d'Oxford, rapporte la BBC.

Nigeria

Déclaration : Le ministère de la Santé italien a déclaré que des docteurs italiens ont trouvé que le Covid-19 est causé par une bactérie

Les faits : Une vidéo a été partagée plus de 1 000 fois en juin au Nigeria sur WhatsApp, affirmant que le ministère italien de la Santé a déclaré : “Les médecins italiens ont désobéi à la loi mondiale sur la santé de l'OMS de ne pas faire d'autopsie sur les morts du coronavirus et ils ont trouvé que ce n'est PAS un VIRUS mais une BACTÉRIE qui cause la mort”.

La vérité : Selon l’AFP Fact Check, la vidéo est une “dictée de synthèse vocale du faux message avec des images fixes et animées”. En effet, l'AFP Fact Check a découvert les mêmes images sur Facebook. De plus, une porte-parole du ministère italien de la Santé a déclaré à l'AFP Fact Check que la vidéo “est un canular”. D'un point de vue médical et scientifique, les principales autorités sanitaires, dont l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Nigeria Center for Disease Control, ont rejeté les rumeurs selon lesquelles les antibiotiques peuvent être utilisés pour guérir de la maladie car elle n'est pas causée par des bactéries.

Perou

Déclaration : Les pistolets à thermomètre infrarouge peuvent endommager la rétine

Les faits : Une vidéo partagée plus de 28 000 fois sur Facebook en juin met en garde contre les supposés risques auxquels les gens sont exposés en faisant vérifier leur température avec un thermomètre infrarouge.

“Ne leur permettez pas de prendre votre température avec un pistolet thermomètre laser directement sur votre visage, car si le faisceau laser touche vos yeux, cela pourrait causer un problème dans votre rétine”, explique la vidéo.

La vérité : Contrairement à ce que dit la vidéo, les thermomètres infrarouges n'émettent pas de rayonnement. Ils sont uniquement responsables de la capture de l'énergie émise par le corps humain. Dans une interview au journal péruvien La República, un spécialiste de l'ophtalmologie et de la chirurgie rétinienne, Héctor Palacios, a déclaré : “Les thermomètres sont utilisés pour capter les radiations du corps, pas pour vous envoyer un faisceau laser”. ”Ce point rouge vu sur les thermomètres infrarouges est un indicateur de l'endroit où vous pointez, mais il n'endommage pas l'œil ou la rétine”, ajoute-t-il.

Brésil

Déclaration : Les écouvillons utilisés pour tester le COVID-19 peuvent endommager le cerveau

Les faits : Une image publiée en juillet sur un compte Facebook brésilien et partagée plus de 1 500 fois indique que les écouvillons nasaux utilisés dans le test de réaction en chaîne par polymérase (PCR) pour le COVID-19 prélèvent des échantillons de la barrière hémato-encéphalique qui, s'ils sont compromis, peuvent conduire à l'inflammation cérébrale et à la mort. Le message partagé a la légende suivante : “Quelqu'un a-t-il été effrayé par la taille de cet écouvillon? L'endroit où ils vont chercher un échantillon pour le test Covid-19 s'appelle une barrière hémato-encéphalique. Il s'agit d'une seule couche de cellules qui protège votre cerveau contre les métaux lourds, les pesticides et autres substances toxiques qui sont généralement tenus à l'écart.

C'est ainsi que les nutriments essentiels, comme l'oxygène, parviennent au cerveau. Si votre barrière sanguine est compromise de quelque façon que ce soit, elle devient une barrière cérébrale d'échappement, qui est un cerveau enflammé!”

La vérité : L'affirmation selon laquelle les tests du COVID-19 doivent collecter des échantillons de la barrière hémato-encéphalique est fausse. Dans une interview accordée à la radio CBN, l'infectiologue Ingrid Cotta, de l'hôpital Beneficência Portuguesa de São Paulo déclare : “l'écouvillon est relativement grand, mais il ne pénètre que dans le nasopharynx. L'inconfort qu'il peut provoquer génère certaines craintes. Mais nous devons nous souvenir des cours de sciences à l'école : entre le nasopharynx et le cerveau, il y a plusieurs structures, la muqueuse nasale, l'os du crâne, la barrière hémato-encéphalique et le liquide céphalo-rachidien.

L'écouvillon ne parvient pas à percer la barrière ou l'os du crâne”.

Allemagne/France

Déclaration : Une lycéenne allemande est décédée à cause du masque facial obligatoire

Les faits : Une députée allemande de droite, Birgit Malsack-Winkemann, a mis en doute en septembre la mort d'une lycéenne allemande sur ses réseaux sociaux. Elle se demandait s'il ne s'agissait pas de la “première mort due au masque” et a exhorté “à mettre fin à cette folie”.

La vérité : Le 7 septembre, une fille allemande est décédée après avoir quitté son bus d'école. Les premiers résultats d'autopsie n'ont pas apporté de réponses convaincantes. Les experts ont enquêté pour savoir si la jeune fille avait des problèmes de santé sous-jacents, mais le port du masque n'a pas été cité comme une cause possible, explique Le Monde. Les effets secondaires du masque sont connus pour se limiter aux problèmes dermatologiques, à la conjonctivite et aux maux de tête, comme le rapporte Le Monde. Cependant, aucun d'entre eux n'est mortel. Birgit Malsack-Winkemann a été invitée à supprimer son message et s'est excusée suite à la demande du représentant de son parti régional, Uwe Junge.

Espagne

Déclaration : Le pape François demande aux femmes européennes de se reproduire avec des immigrés musulmans pour lutter contre le faible taux de natalité.

Les faits : Des messages partagés sur Facebook en juin affirment que le pape François a déclaré, dans une interview accordée en 2016 au journal catholique français "La Croix", que les femmes européennes devraient se reproduire avec des immigrés musulmans pour lutter contre le faible taux de natalité en Europe.

La vérité : Selon les informations de l'agence espagnole de vérification des faits Maldita, cette déclaration est fausse. Le pape a en effet accordé une interview au journal "La Croix" en 2016, dans laquelle il parlait de la nécessité d'intégration des immigrés arrivant en Europe et disait : “cette intégration est d'autant plus nécessaire aujourd'hui que l'Europe souffre d'un sérieux problème de taux de natalité”. Le Pontife, cependant, ne dit à aucun moment que les relations devraient être entre les femmes européennes et les immigrés musulmans.

Chine

Déclaration : Une image montre un soldat australien tuant un enfant afghan

Les faits : Une publication sur Twitter de Zhao Lijian, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, montre l'image d'un soldat australien tenant un couteau ensanglanté autour du cou d'un enfant avec un agneau dans les bras. “Choqué par le meurtre de civils et de prisonniers afghans par des soldats australiens. Nous condamnons fermement ces actes, appelons à les responsabiliser”, lit-on.

La vérité : Selon les informations de plusieurs centres de vérification des faits, l'image partagée a été manipulée numériquement. En réponse au message de Lijian, le Premier ministre australien, Scott Morrison, a exigé des excuses du gouvernement chinois et a déclaré que Pékin devrait avoir “honte” de partager une image “écoeurante”. Le message de Lijian est intervenu après que les forces de défense australiennes ont annoncé avoir trouvé des “informations fiables” selon lesquelles 25 soldats australiens étaient impliqués dans le meurtre de 39 civils et prisonniers afghans entre 2009 et 2013.