Les logos chinois, qui précèdent les génériques de certains films américains, sont de plus en plus nombreux. Tout comme les acteurs asiatiques qui trustent l’affiche de blockbusters voués au succès. Et ce n’est pas un hasard.
Il est en effet loin le temps où John Woo, Jackie Chan, Tsui Hark ou Ringo Lam étaient vus comme des curiosités aux USA. Les vedettes, acteurs ou réalisateurs, venus d’orient y sont maintenant plus que bienvenue… La plupart d’entre eux sont d’ailleurs retournés dans l’Empire du Milieu, en vue de créer une nouvelle industrie, plus internationale, plus tournée vers l’exportation.
Ce travail de sape est, de nos jours, visible sur les écrans du monde entier. Certes, les interventions étrangères ne sont pas récentes à Hollywood. Citons le japonais Sony qui achète Columbia et Tristar pour 3,4 milliards de dollars (!) ou cette multinationale indienne qui fait partie du capital de Dreamworks. Mais celle qui concerne la Chine est plus impressionnante, ne serait-ce que pour des raisons extra-cinématographique (le pays de Xi Jinping possède une belle partie de la dette américaine…). L’achat de compagnies américaines est donc inévitable, vu la pression exercée par la future première puissance économique mondiale. C’est, de plus, dans ces années 2010 que Hollywood se rapproche avec son principal concurrent à une vitesse exponentielle.
Les années 2010 marquent le tournant entre Los Angeles et la Chine
Quelques dates s’imposent. Tout d’abord, 2006. Tom Cruise et la Paramount coproduisent ‘’Mission : Impossible 3’’ avec la China Film Group Corporation. Un personnage principal asiatique doit faire partie du scénario et le film doit obligatoirement être tourné en partie en Chine.
Ensuite, 2012. Le groupe Wanda achète la chaine de cinéma AMC. Puis 2015 : l’exploitant Arclight signe un contrat avec Huace Group. 2016 : Ron Howard (‘’Da Vinci Code’’) et Brian Gazer vendent des parts de leur société de production à China Media Capital. La même année, Wanda achète Legendary Entertainment (‘’The Dark Knight’’, ‘’Interstellar’’).
Les producteurs américains sont enthousiasmés par cet argent qui remplit les caisses. Et ils acceptent de se plier à certaines demandes chinoises, qui vont sans doute changer pour longtemps l’industrie.
Pour pouvoir sortir à Shanghai ou Beijing, un film étranger doit posséder des traits culturels locaux et il est nécessaire qu’un tiers des acteurs soient chinois (ceci vaut pour les films américains). Les longs-métrages ne doivent pas contenir de scènes trop violentes, sexuelles, et le scénario doit être ‘’moral’’ (un personnage corrompu sera toujours puni, par exemple). La censure peut alors sévir, c’était le cas pour ‘’Suicide Squad’’ ou le remake de ‘’Ghostbusters’’. L’enjeu économique est clairement majeur.
‘’Pacific Rim’’ de Guillermo del Toro a d’ailleurs rapporté plus d’argent en Chine qu’aux USA. C’était une première, un tournant. Les spectateurs chinois deviennent un enjeu.
De plus en plus de spectateurs chinois
Les multiplexes prolifèrent partout en Chine, et il va de même pour la demande de contenu. Cela convient d'ailleurs à beaucoup d’investisseurs américains. L’ex-compagnie de James Cameron (‘’Titanic’’) appartient maintenant à Youku Toudu et Alibaba. De quoi produire beaucoup de réalité virtuelle pour le marché local. Les superproductions qui ont lien direct avec la Chine, que ce soit au niveau du scénario ou de la production, se multiplient donc de façon naturelle : ‘’La Grande Muraille’’, ‘’Kong : Skull Island’’, ‘’Doctor Strange’’, ‘’Transformers : l’âge de l’exctinction’’, ‘’Independance Day : Resurgence’’, sont autant d'exemple frappants.
Même les Séries TV, comme ‘’Doctor Who’’, visent ce marché gigantesque. La liste est longue, et le résultat à l’écran, souvent lisse, est destiné à plaire à un maximum de spectateurs. Les scénarios doivent donc maintenant plaire à toutes les autorités, pour le meilleur ou le pire…