Des documents gouvernementaux révèlent la relation trouble qui unit le FBI et certains cinéastes. Henry-Alex Rubin, le réalisateur de ‘’Disconnect’’, sorti en 2012, est d’ailleurs bien placé pour en témoigner. Ce dernier a en effet travaillé avec l’agence pour les besoins de son film. ‘’Ils comprennent que la perception est tout’’, déclare-t-il à un site américain. "Plus ils sont bien perçus par le public, plus leur travail est facile."
Il précise que l'employé qui examinât le projet a proposé des changements pour une scène où deux agents interrogeaient de façon agressive un journaliste.
Rubin a changé la scène.
Des centaines de pages de documents du FBI, que BuzzFeed News a obtenu en réponse à une action en justice concernant la loi sur la liberté de l'information, révèlent que le FBI cherche à contrôler son image par le biais de travaux de consultation sur les fictions. Surtout si celles-ci viennent tout droit d’Hollywood. Au cours des cinq dernières années, l'unité de la publicité et des affaires publiques de l’agence gouvernementale a joué un rôle dans le développement de centaines de films, de Séries TV et documentaires. Cela vaut pour ‘’Mark Felt: The Man Who Brought Down the White House’’, un biopic sur le fameux instigateur du Watergate, ou un épisode de la docu-série ‘’Fatal Encounters’’.
Le bureau des affaires publiques du FBI a d’ailleurs examiné 728 demandes d'assistance pour des romans ou des blockbusters, rien que pour l’année 2012. Les consultations vont d'un échange d’e-mails à des tournages de plusieurs jours au J. Edgar Hoover Building à Washington, DC.
Les aides peuvent consister en une vérification rapide des faits ou la permission d'utiliser le logo de l'agence.
Cette dernière ne se contente pas de poser des questions aux cinéastes, elle joue aussi un rôle proactif lorsqu'une occasion se présente de promouvoir ses propres intérêts en matière de relations publiques.
Hollywood est un instrument marketing pour le FBI
‘’La plupart des gens se forgent une opinion du FBI à partir de la culture pop, pas d'un reportage de deux minutes", précise un agent au journaliste qui enquêtait pour le site.
Cela vaut aussi pour les programmes tels que ‘’Mindhunter’’, diffusé sur Netflix, ou des employés du FBI traquent des tueurs en série, et ‘’Criminal Minds’’ (CBS) dont l’un des producteurs est un ancien agent.
Certains documents mentionnent de façon explicite Tom Hanks (pour ‘’Captain Phillips’’, ‘’Parkland’’ et ‘’Mark Felt’’). Le ‘’Silence des Agneaux’’ figure aussi en bonne place, le film de Jonathan Demme ayant été aussi vu comme un outil de recrutement pour les agents féminins ! ‘’Donnie Brasco’’ avec Al Pacino et Johnny Depp, montrait aussi le côté humain et personnel du travail d'un agent...
Bien que le bureau dise explicitement qu'il " ne modifie pas ou n'approuve pas le travail des cinéastes ", obtenir la coopération du FBI signifie souvent présenter le bureau sous un jour positif.
Pour certains films, comme ‘’Public Enemies’’ avec, encore, Johnny Depp ou ‘’Live Free or Die Hard’’ en 2007, l'organisation se plie en quatre pour aider les équipes de production. Des ateliers d’écriture, baptisés "FBI 101" sont aussi organisés à la Writers Guild.
Les cinéastes se déclarent plutôt impressionnés par le professionnalisme de l’agence.
"La plupart du temps, les écrivains d'Hollywood ne sollicitent pas nos commentaires et, souvent, ils se trompent. Ainsi, lorsqu'on nous a donné l'occasion d'éduquer les scénaristes/producteurs, nous avons constaté que nous étions en meilleure position pour qu'ils dépeignent le FBI sous un jour positif et avec exactitude, ou assez près de l'exactitude’’. Les déclarations de ce membre de l’organisation sont claires : les images peu flatteuses ne sont pas les bienvenues…