Le harcèlement des femmes au quotidien, c'est ce que Noa Jansma, étudiante de 20 ans à Amsterdam, montre à travers une série de selfies avec ses harceleurs, pris pendant un mois et postés sur Instagram. Le but de son projet ? Faire prendre conscience de l'objectification des femmes dans leur vie de tous les jours.
"Vu que beaucoup de gens ne savent toujours pas à quelle fréquence et dans quel contexte survient le harcèlement, je montrerais mes harceleurs pendant un mois"
Certains selfies sont accompagnés d'un commentaire qui rapporte ce qui lui a été hué, du "Hey bébé" allant au "Je sais ce que je voudrais faire avec toi".
Son compte, dearctacallers, compte aujourd'hui près de 279 000 abonnés. Noa a l'intention de le passer à différentes filles à travers le monde pour montrer la globalité du phénomène.
Un phénomène omniprésent et banalisé
Ce qu'on voit bien à travers ses posts, c'est que ceux qui la harcèlent sont des hommes de tout âge et de tout milieu, ce qui vient rappeler que le harcèlement de rue est un acte machiste ancré à tous les niveaux de la société. Rappelons aussi que n'importe quelle femme en a déjà été victime, peut importe l'âge ou l'apparence. En France comme ailleurs, c'est un acte répandu.
Ainsi, 82% des françaises de moins de 17 ans ont été victimes de harcèlement de rue, et 100% des utilisatrices des transports en communs en France ont été victimes au moins une fois de harcèlement sexiste ou d'agressions sexuelles.
Notons aussi que sur ces selfies pris par Noa, certains de ces hommes posent tout sourire pour la photo: ils n'ont aucune honte quant au comportement qu'ils ont pu avoir à son égard, ce qui montre bien que pour eux, c'est tout à fait normal.
Or, tant que ce phénomène sera accepté socialement, les harceleurs continueront de proliférer.
Harcèlement de rue et culture du viol
Si on en est toujours à cette situation aujourd'hui, c'est que nous sommes dans une société où les violences sexuelles sont minimisées et normalisées. Faire culpabiliser la victime d'une agression en lui reprochant sa tenue ou son comportement, la honte ou la peur des représailles, les blagues sur ce sujet, un viol toutes les 7 minutes en France, 1 française sur 10 victime d'un viol ou d'une tentative au cours de sa vie, seulement 12% des victimes qui portent plainte, et 2% des viols condamnés aux assises; bienvenue dans la culture du viol.
Le harcèlement de rue lui, contribue à renforcer cette atmosphère de violence. L'expression la plus entendue par les femmes dans la rue n'est autre que "salope" (juste devant "pute"), et seules 64% des femmes ayant été insultées de ce nom là estiment avoir été victime d'une injure sexiste, ce qui signifie que pour 36% d'entres elles, c'est normal.
Lutter contre le harcèlement de rue
La sanction est en cours de débat. La secrétaire d'Etat chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa a annoncé il y a quelques semaines la mise en place d'un groupe de travail chargé de proposer une loi qui pénaliserait le harcèlement de rue. Elle a ainsi déclaré sur le plateau du Quotidien :
« C’est important de dire que non, ce n’est pas le droit de n’importe quel homme, les femmes qui marchent ne sont pas à la disposition du tout-venant et leurs corps ne sont pas des biens publics. C’est important que la République française dise cela. »
Ma réserve ? Je doute qu'une sanction légale suffise à endiguer le phénomène.
Eduquons surtout les garçons à être respectueux plutôt que d'apprendre aux filles à ne pas se faire agresser.