Écrire une nouvelle n’est pas aussi aisé qu’il y paraît ou qu’on pourrait le croire, car à contrario d’un roman, il faut réduire le texte, l’histoire au maximum pour n’en garder que l'essentiel afin que l'ensemble de la rédaction reste en totale cohérence. De ce fait, son déroulement se doit d’être bref, c’est-à-dire dense et dynamique à la fois. Mais également, concis et précis dans le même temps. Une nouvelle, c’est en quelque sorte un micro-roman qui ne se prête pas à la plume de tout à chacun ni même à celle de n’importe quel auteur.
Philippe Lafitte s’y est frotté en nous offrant, avec « Eaux troubles » dans la collection Uppercut, un résultat pour le moins bluffant avec un brio affirmé.
Cette collection à été imaginée par Giuseppe Merrone, fondateur des éditons BSN PRESS à Lausanne, en s’entourant d’auteurs dont la plume serait apte à se plier à l’exercice qu’il échafaudait. Giuseppe Merrone a souhaité à travers ce projet publier une collection aux critères définis avec des nouvelles ayant le sport pour univers. Des « fictions brèves, accessibles, habitées de tension narrative. » Quatre auteurs ont accepté de participer à ce projet en écrivant chacun une nouvelle pour le lancement de cette collection. Ces quatre personnalités de l’écrit et leur titre respectif, sont : Laure Mi Hyun Croset avec « S’escrimer à l’aimer », Bessa Myftiu avec « Dix-sept ans de mensonges », Sabine Dormond » avec « Les parricides », toutes les trois auteures suisses romandes et Philippe Lafitte pour la France avec « Eaux troubles ».
Eaux troubles, une histoire qui fait frissonner !
Dans « Eaux troubles », l’auteur nous plonge dans l’univers de Mélanie. Alors qu’elle était un espoir de la natation, un accident l’handicapant à vie l’obligera à une toute autre destinée. Mélanie, pour ne pas demeurer loin de l’eau qu’elle aime tant, a trouvé un emploi au guichet d’une piscine.
Pour s’occuper de la piscine, elle a pour collègues Claude, le gérant, et Horst, un ancien légionnaire embauché comme agent d’entretien, plus pour rendre service à la demande du maire que par réel besoin. Le soir, lorsqu’elle est enfin seule, Mélanie aime se couler dans l’eau, s’envelopper des sensations qu’elle affectionne tellement pour y nager, plonger, ce qu’elle ne peut plus faire en tant que plongeuse professionnelle lors de compétions.
Son corps en garde les cicatrices et les stigmates dorénavant indélébiles, et son âme les blessures infiniment profondes. Avant l’accident, elle s’était mariée avec son entraîneur, dans l’esprit sincère d’un grand amour. Mais, là aussi, cette union n’avait pas résisté en prenant « l’eau » elle aussi. Au fil du temps, son mari était devenu irritable, un véritable tyran, usant de violence, amenant inévitablement le couple dans un divorce douloureux. Mélanie partage à présent son temps avec son fils qu’elle élève seule, son travail et ses nages nocturnes au quotidien. Les s’échappe à un rythme régulier, jusqu’au jour où… Ou plutôt, jusqu’au soir où tout bascule ! Philippe Lafitte nous projette, là, dans un micro-roman captivant, amenant le lecteur à quelques sueurs pour finalement le conduire dans la piscine, sous la douche, mais pas seulement… Dans une fin que la lecture, de page en page, n’aura pas dévoilée.
Le suspense tient la mesure dans une histoire bien contée avec cette plume agréable et habile, toujours égale à elle-même, que l’on connaît de l’auteur. Une excelle réussite de Philippe Lafitte pour cette jolie collection « Uppercut » de Giuseppe Merrone !
Un mot de l’auteur…
Philippe Lafitte a accepté de répondre à la question : que diriez-vous aux lecteurs au sujet de "Eaux troubles", mais aussi de la collection « Uppercut » en quelques mots ? « Avec l'exploration de ce format hybride entre la nouvelle et le roman, qui peut se lire d'une traite, j'espère que les lecteurs futurs seront accrochés par ces trois personnages étroitement liés, pour le meilleur et peut-être pour le pire, au sein du même univers : avec cette sensation très particulière qu'est une piscine en nocturne, à l'abri des regards, cette atmosphère qui peut osciller entre onirisme et thriller aquatique, entre trouble et menace ; ce dévoilement des corps, aussi.
Je conseille par ailleurs aux lecteurs intéressés d'aller faire un tour sur le site de l'éditeur pour découvrir les autres ouvrages de la collection "Uppercut". Chaque auteur y déploie sa vision et une écriture singulière à travers une discipline inédite et ça donne une palette de récits très variés, caractéristique de cette collection qui continuera de s'étoffer dès la prochaine rentrée de septembre. »