Je ne suis ni dans la misanthropie, ni dans la noirceur du diagnostic concernant l’Afrique et ses dirigeants. Je demande aux intellectuels africains de sortir de l’émotion dans laquelle leur culture française les enferme quand ils parlent de leur continent. Je n’ai ni à haïr, ni à aimer Sassou, ni à avoir des griefs vis-à-vis de l’opposition congolaise. Je me place dans la position de l’analyse politique que je suis, analyste franco-africain qui regarde la France au fond des yeux sans se laisser envahir par elle, contrairement à certains intellectuels africains et dirigeants.

 

La France doit savoir que l’Afrique change et avec elle ses dirigeants et ses peuples. Le peuple rwandais demande à Kagame de se représenter à l’élection présidentielle pour une troisième fois alors que la constitution le lui interdit. Une consultation populaire va être demandée par Paul Kagame. Au Congo Brazzaville, Denis Sassou Nguesso demande au peuple de se prononcer sur l’évolution des institutions. Une partie de l’opposition est en désaccord avec lui, ce qui est normal dans le cadre du jeu démocratique.

 

On ne comprend pas que d’autres pays, comme la France ou les Etats Unis, critiquent les initiatives prises par le Président Sassou après  de nombreuses consultations et dialogues boycottés ou non par l’opposition.

La France, 6ième puissance mondiale, en retrait sur les nombreux champs industriels et commerciaux, continue de voir dans l’Afrique francophone (hier esclavagisée et colonisée) son berceau d’influence et de pouvoir. L’existence de la monnaie, le franc CFA, contribue à donner à la France une sorte de droit de regard régalien sur les problématiques politiques en matière d’alternance démocratique en Afrique francophone. Dans cette Afrique francophone, la France a une politique à géométrie variable, ce qui est possible en Côte d’Ivoire ne l’est plus au Burkina Faso.

 

Sassou Nguesso, homme politique congolais depuis les indépendances, est aux affaires depuis de nombreuses années dans un pays secoué par des périodes de conflits, de guerres civiles, de réconciliation.

A-t-il le droit en tant que Président, et selon la Constitution congolaise, de demander au peuple de se prononcer sur l’évolution des institutions ? La réponse est forcément positive selon la Constitution. Dans sa déclaration télévisée au peuple congolais sur sa volonté de le consulter, Sassou avance des arguments concernant la paix, l’entente cordiale entre les Congolais et la volonté de sortir des schémas de violence qui ont longtemps caractérisés les Congolais pour accéder au pouvoir.

 

Sassou en consultant le peuple lui redonne son rôle réel, même si la France pense le contraire. Pourquoi Sassou serait-il un démon alors qu’il souhaite s’inscrire dans cette tradition démocratique que certains de ses partenaires occidentaux lui refusent au nom d’arguments fallacieux du type « trop longtemps au pouvoir », « trop âgé », « respect de la Constitution » ?

Pourquoi le Congo et certains pays francophones et leurs dirigeants intellectuels acceptent-ils d’être considérés comme des pays mineurs institutionnellement par la France et par l’Occident ?

 

Sans connaitre la ou les questions posées au peuple congolais pour le référendum institutionnel, j’ouvre ici et maintenant une fenêtre de propositions, une sorte de « maboke » à la congolaise dans laquelle la majorité et l’opposition pourront se nourrir institutionnellement :

  1. Election présidentielle au suffrage universel à un tour.
  2. Election en même temps des députés et des sénateurs en réduisant le nombre de ceux-ci, ce qui implique un regroupement des circonscriptions et qui permet de faire des économies sur le plan financier et budgétaire.
  3. Création d’un poste de Premier Ministre et d’un ou deux postes de Vice-présidents.
  4. Suppression de la limite d’âge, et mandat présidentiel de 10 ans non renouvelable.
  5. Mise en place d’un statut d’ancien Chef de l’Etat, d’ancien Premier Ministre et d’ancien Président des deux chambres.