Analyse d’une initiative diplomatico-politique en fonction de la théorie des réseaux et des trajectoires

Avant le sommet de l’Union africaine du 30 janvier 2017 à Addis-Abeba, un mini-sommet se tient à Brazzaville au Congo du 27 au 28 janvier 2017 et présidé par Denis Sassou Nguesso, Président du Congo et Président du comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye.

Président de la République depuis 1979 avec un intermède entre 92 et 97, Sassou Nguesso est l’un des plus anciens Président africain en exercice qui a assumé les fonctions de Président en exercice de l’OUA en 1986 et de l’Union africaine (2006/2007).

Sassou, par sa longévité politique, est au cœur du réseau africain et des trajectoires des décisions politiques relatives aux conflits en Afrique.

Sassou, Président de la république, est contesté par une partie de son opposition et par la diaspora qui estime que ses pratiques politiques ne sont pas à la hauteur d’un Etat démocratique. Laissons à cette opposition et à cette diaspora les responsabilités de leurs analyses. L’objet de ce papier est de regarder les faits tels qu’ils nous apparaissent et de juger l’action du Président Sassou dans le dossier libyen, comme dans d’autres. Sassou s’était investi en tant qu’acteur des négociations du protocole de Brazzaville.

C’est à Brazzaville le 13 décembre 1988 à 13h30 qu’ont été conclues des longues et difficiles négociations quadripartites par la signature du protocole de Brazzaville, sous-tendues par les accords du 22 décembre 1988 entre Cuba et l’Angola d’une part, l’Afrique du Sud, l’Angola et Cuba d’autre part.

Ces négociations ont conduit au retrait des troupes cubaines et sud-africaines d’Angola et donc au retour de la paix en Afrique australe. Ces mêmes négociations ont ouvert la voie à :

  • la mise en œuvre de la résolution 435 sur le sud-ouest africain et l’indépendance de la Namibie,
  • la fin de l’apartheid,
  • l’avènement de la nouvelle Afrique du Sud,
  • la libération de Nelson Mandela.

Les faits sont là.

Sassou connait la plupart des chefs d’Etat africains et très tôt il avait contribué avant la chute de Kadhafi à faire de la question libyenne une problématique régionale. L’Amérique d’Obama, la France de Sarkozy, l’Angleterre de Cameron, profitant d’une résolution de la communauté internationale, ont décidé de se débarrasser du Colonel Kadhafi et de prendre parti pour l’opposition.

Le service après-vente de la déstabilisation de la Libye n’a pas été assumé par les grandes puissances.

En favorisant le mini-sommet sur la Libye à Brazzaville, Sassou et les pays concernés par la question comme le Niger, la Mauritanie, le Tchad, souhaitent que les deux impétrants, Fayez Al Sarraj chef du gouvernement d’union nationale reconnu par l’Occident, et le maréchal Khalifa Hafter, se parlent pour apporter une réponse à la question libyenne. Des pays comme l’Egypte où se déroulera une prochaine rencontre entre Sarraj et Hafter, doivent éviter de torpiller la réunion de Brazzaville, prélude à celle de l’Union africaine, car l’Egypte estime que cette organisation est sous influence algérienne.

Pour le Président Sassou, la résolution de la question libyenne permet aussi d’apporter une réponse au rôle que joue la Libye comme porte ouverte de la migration en Méditerranée centrale vers l’Europe.

Sassou est récusé au plan national par une partie de l’opposition, mais sans empathie et sans émotion, on peut, en s’appuyant sur les faits, montrer qu’à sa façon il contribue à éteindre le feu dans les conflits régionaux, même si certains diront que, dans son pays, il est à la fois pyromane et pompier. Sassou montre que sa connaissance de l’Afrique fait de lui un acteur indispensable dans la résolution des conflits. Voici une contribution importante à la théorie des réseaux et des trajectoires dans l’analyse diplomatique et politique des pays africains et de leurs dirigeants au-delà de l’émotion ou de l’empathie (pour ou contre) qui caractérisent les analyses sur l’Afrique et sur le Congo.