Mossoul-Est est repris, ainsi que deux ponts, et à l'ouest l'aéroport, une prison et ses abords, &c. Selon l'état-major irakien, désormais beaucoup plus optimiste, Mossoul sera expurgée des djihadistes à la mi-avril, et de fait, de tout le territoire irakien en tant que forces organisées, regroupées, pouvant mener des attaques coordonnées. Daesh, en Irak, en reviendra aux attentats, comme mercredi, à Tikrit où une bombe a explosé au milieu d'une noce. Reste donc la Syrie, où Palmyre a été une seconde fois reprise : Raqqa est assiégée, et Kurdes, forces coalisées, armées syrienne et russe grignotent la province de Der-er-Zor, voisine de l'Irak.
L'armée américaine vient d'envoyer un détachement de 400 forces spéciales en Syrie et elle se coordonne plus ou moins bien avec les unités russes et turques. Selon le renseignement irako-américain, le calife de Daesh, Abu Bakr al-Baghdadi aurait fui Mossoul. Dans la défunte revue du califat, Dabiq, il proclamait que Mossoul serait son Stalingrad, que les djihadistes dont lui-même y combattraient jusqu'au dernier.
Rome, relais de Dabiq
Dabiq, l'organe de propagande international de Daesh n'est plus. La ville éponyme a été reprise, et c'est désormais Rumiyah (Rome) qui prend le relais. En fait, ce "Rome" désigne plutôt Constantinople, Istanbul, ancien capitale de la chrétienté orientale. Elle est aux mains des "apostats" turcs, devenus cible privilégiée.
La dernière livraison, le nº7, daté Jumada al-Akhirah 1438, est sortie voici quelques jours. Son édition française est très significative de l'état d'esprit qui semble à présent prédominer dans l'encadrement de Daesh. Il n'est pratiquement fait état que d'enfer et de paradis, et d'abandon de la vie terrestre. Mais ce très long prêche (près de 30 pages sur 36, couverture, sommaire et page publicitaire pour Les Chemins de la victoire, ouvrage d'Abû Hamzah incluses) est entrelardé de dénonciations de tous les groupes, factions, formations salafistes mécréantes, dont les Frères musulmans.
Même dans le singulier article "La chair des époux est empoisonnée" (tout aussi truffé de citations du coran ou de hadiths), il n'est question que d'enfer et de paradis, et des "mauvaises personnes" auxquels les époux ne sauraient se confier. L'habituel dossier de Dabiq sur les opérations militaires et secrètes fait état d'escarmouches contre l'armée turque, d'attentats au Pakistan, aux Philippines, de l'assassinat "d'un officier de l'armée somalienne apostate".
Tout le reste voue les combattants au paradis et rappelle que "les musulmans combattent les idolâtres parmi leurs proches". C'est très confus, mais il en ressort qu'il vaut mieux tuer frères, sœurs, parents, que de risquer l'enfer. Pour résumer, tout musulman ne rejoignant pas le combat du califat (faute de pouvoir rejoindre l'enclos syrien étréci) est un mécréant troquant "la vie présente contre la vie future". Cela vaut mise en garde de fuir pour rejoindre des groupes djihadistes rivaux. Les premières éditions françaises étaient ponctuées de fautes et de coquilles, ce numéro 7 n'en contient pratiquement pas mais multiplie les références qui resteront obscures à maints jeunes djihadistes français hors califat (ainsi des "milices rafidites" et de "l'armée nosaïrite", qui désignent des chiites).
La quatrième de couverture campe un djihadiste seul contre une nuée d'avions, affrontant crânement la mort, seule issue digne. Cependant, en Syrie, cette issue pourrait être retardée par des affrontements entre milices anti-Daesh aux rivalités s'accentuant pour le contrôle de territoires reconquis. L'armée américaine a pris position à Manbij pour jouer un rôle de tampon. Ce alors que Raqqa est désormais encerclée, coupée de ravitaillement, et pilonnée depuis le ciel mais aussi par de l'artillerie lourde du corps des Marines.