Selon les dernières statistiques du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, la Tanzanie accueille plus de réfugiés burundais que n'importe quel autre pays. Elle accueille de nombreux expatriés et demandeurs d'asile burundais. En date du 20 juillet 2017, le Président tanzanien s’est entretenu avec son homologue burundais Pierre Nkurunziza. C’était à la ville frontalière de Ngara. Au cours de cet entretien, Nkurunziza a dit que le Burundi est désormais stable. Il a profité de l’occasion pour inviter les réfugiés Burundais à retourner dans leur pays, afin de contribuer à la reconstruction du Burundi.

Apres cet entretien avec son homologue burundais, John Pombe Magufuli a ordonné la naturalisation et a accordé la citoyenneté aux milliers de réfugiés burundais. C’est du moins ce qu’a déclaré Mwigulu Nchemba, le ministre des affaires intérieures de la Tanzanie. Magufuli justifie son action en ces termes : « Ce n'est pas que je suis en train d'expulser les réfugiés burundais. Je leur conseille simplement de retourner volontairement dans leur pays parce que le président Burundais m’a rassuré que le pays est désormais calme. »

La volonté de Magufuli de rapatrier les réfugiés burundais est critiquée par plusieurs ONG

Joseph Siegle est directeur du Centre d'études stratégiques de l'Afrique à Washington.

Il fait partie des experts qui s’intéressent à ce qui se passe dans la région, et qui n’ont pas apprécié la position du numéro un tanzanien, soulignant que la situation au Burundi reste encore dangereuse. Il s’est exprimé ainsi : « Les déclarations du président Tanzanien sont en contradiction avec la situation sur le terrain, car tous les rapports sur le Burundi produits par la Communauté de l'Afrique de l'Est, l'Union africaine et l'ONU démontrent que la situation reste préoccupante et le nombre de réfugiés ne fait plutôt qu’augmenter.

»

De son côté, Maria Burnett, directrice associée chez Human Rights Watch dit qu’« en vertu du droit international des réfugiés, la Tanzanie a une obligation permanente de veiller à ce que les Burundais qui fuient la violence et les persécutions puissent rester en Tanzanie. Le gouvernement tanzanien devrait s'assurer que les déclarations du président Magufuli ne soient pas utilisées par les acteurs locaux pour intimider ou menacer les Burundais de rentrer chez eux par la force ou les inciter à croire qu'ils n'ont d'autre choix que de regagner leur pays. Les réfugiés devraient continuer à avoir un véritable choix libre de retourner dans leur pays et d'être pleinement informé des conditions au Burundi. »

Dans un rapport de mai 2017, le HCR a déclaré être préoccupé par la situation instable au Burundi.

Pour rappel, le Burundi a basculé dans la violence en avril 2015 lorsque le président Nkurunziza a décidé de briguer un troisième mandat, en violation de la constitution et de l’accord d’Arusha, selon l’opposition burundaise. Les services de sécurité et de renseignement du Burundi, en collaboration avec la ligue de la jeunesse du parti au pouvoir, connu sous le nom d'Imbonerakure, sont souvent accusés de nombreux meurtres, disparitions, viols et arrestations arbitraires.

Certains réfugiés burundais ne sont pas rassurés par le discours de Pierre Nkurunziza

Paul Niyirora est un réfugié burundais basé dans l'ouest de l'Ouganda. Il dit qu’il est hors de question de retourner au Burundi. Pour lui, les propos du Président Nkurunziza ne traduisent pas la réalité de ce qui se passe au Burundi en ce moment.

Il le dit en ces termes : « De quelle sécurité parle-t-il? Le Burundi connait toujours des tortures, des persécutions, des violations des droits de l'homme ainsi que des détentions. Peut-être que c'est une astuce qu’il a trouvé pour nous ramener dans le pays, afin que l’on y soit par la suite tués. Nous resterons ici, quand bien même nous vivons dans les camps de réfugiés. Au moins, ici, nous sommes en sécurité. Plus qu’au Burundi. »

L’ancien président de la Tanzanie, Benjamin Mkapa, est le facilitateur du dialogue burundais. Il est convaincu que le seul moyen qui permettra aux réfugiés burundais de regagner leur pays est de régler la crise burundaise par le biais d’un dialogue inter-burundais. Or, jusque-là, le gouvernement burundais refuse toujours de négocier avec ses opposants, surtout ceux qui sont en exil...