La sorcière est une femme.
Selon Jules Michelet : « pour un sorcier, dix-mille sorcières » : la sorcière est avant tout une femme. Et une femme qui, contrairement à ce que l’on pense d’elle dans la culture populaire, n’a pas toujours été néfaste, loin de la figure satanique qu’on lui attribue.
La sorcière était d’abord une guérisseuse. Elle aidait les Femmes à accoucher, à panser la douleur de leurs règles, parfois aussi... à avorter. Ce qui lui a valu une première mauvaise réputation. De nos jours, l’avortement est encore une cause tabou auprès des instances patriarcales.
La sorcière, comme le Christ en haut du mont Thabor, s’est transfigurée : elle a changé d’apparence pour être encore plus solaire, tel un phœnix. En effet, contrairement aux fées ou autres farfadets, la sorcière a traversé toutes les époques, étant systématiquement la marraine des femmes et l’ennemie jurée de l’inquisition, réelle ou sémantique.
L’inquisition, c’était les femmes au bûcher. C’était un enfant qui mourrait à la naissance, et le village qui accusait la femme d’entretien. L’image moyenâgeuse est loin de la réalité : les femmes sont encore brûlées dans certaines zones géographiques, pour les mêmes raisons passées que les sorcières de Salem.
L’étude de la domination patriarcale autour de la sorcière et de son renouvellement repose sur l’étude de la sorcière la plus étudiée et pourtant la plus ignorée : Tituba.
Sorcière noire de Salem (étudiée sous la plume de Maryse Condé, prix Nobel alternatif de littérature). Tituba était l’esclave de la famille Parris. Ce ne sont pas les jeunes femmes ayant fait des rituels qui ont été condamnées, mais Tituba : elle a fini violée, puis emprisonnée, sans procès.
Des années après la pièce de théâtre d’Arthur Miller, le personnage de Tituba ressurgit dans l’ouvrage de Maryse Condé, et devient alors un personnage historique de lutte anti raciste.
Pour une domination s’écrit une sorcière.
De la même manière, si les chapeaux de sorcières sont d’origine antisémites (le nez crochu comme axe racial, la cape et le chapeau pointu comme tenue traditionnelle de l’époque en Allemagne), ils ont été attribués aux sorcières, notamment par les travaux des frères Grimm, et ont ensuite été repris par des féministes, de nos jours, sur divers sujets politiques.
Ces femmes portent, sans le savoir, le poids du patriarcat et de l’antisémitisme sur le haut de leurs têtes.
Quand la sorcière renaît, le patriarcat la vise avec une balle en argent. La domination n’est jamais loin de la sorcière : c’est d’ailleurs pour retrouver une part de domination qu’elles cherchent à obtenir ou à utiliser leurs pouvoirs.
Que faut-il retenir des informations de cette étude sur Tituba et sur la sorcière comme être dominé ?
Peut-être qu’il est primordial de connaître l’origine des drapeaux que l’on agite, mais aussi de reconnaître à la femme un pouvoir certain : celui de perpétuer les générations ; la sorcière est une figure transgénérationnelle [VIDEO], n’est rien de plus que la bonne fée des femmes, l’ennemie de ceux qui les maltraitent. Mais ceux qui les maltraitent l’ont créé : elle n’est qu’une marionnette, soumise à la volonté de ses auteurs. Une sorcière qui subsiste, mais à quel prix ?