Les fantômes continuent à s’installer durablement dans la culture populaire. Dans Paranormal investigation de Franck Phelizon, ils ont pris possession d'une maison de banlieue. Ou de l'imaginaire des protagonistes, au spectateur de trancher.
Tout commence lorsque les gens sentent une présence chez eux. Des mouvements d’objets, des portes de placard qui s’ouvrent, de la vaisselle qui tombe par terre, des ombres étranges sur les murs. Certains ont l’impression d’être observés ou sentent se poser sur leur épaule une main qu’ils ne voient pourtant pas.
« Dans 70 % des cas, il s'agit de phénomènes naturels que le propriétaire des lieux n'a pas su voir » raconte Erick Fearson, mentaliste et chasseur de fantômes.
« Une branche tapant un carreau qui donne un son de pas, une chouette respirant dans le grenier... Il y a aussi des causes psychologiques, ce que j'appelle 'le pouvoir de la peur' ».
32 % des Français croient aux fantômes, selon une étude YouGov. Si les femmes semblent plus familiarisées avec eux (39 % des Françaises y croient), les hommes ne sont pas en reste : 23 % d’entre eux sont persuadés de leur existence. Les jeunes y sont également plus sensibles : 43 % des 18-24 ans, contre 22 % chez les 55 ans et plus. Et 14 % des Français de 25 à 34 ans affirment avoir déjà vu un fantôme.
Le sujet passionne même ceux qui disent ne pas y croire, comme le prouve le succès de Ghost Hunters, une émission de télé-réalité américaine. La chaîne française Chasseur de Fantômes, sur YouTube, ne compte pas moins de 171 305 abonnés. Quant au chasseur de fantômes suisse JD, il possède à ce jour 2 384 560 followers.
Il n'en fallait pas moins pour que Franck Phelizon, réalisateur de Kickback et amateur de l'étrange, surfe sur ce phénomène et joue avec les codes dans Paranormal investigation.
Un vrai bon film français de genre, qui s'inscrit pourtant dans une vaine très anglo-saxonne de films d'épouvante, utilisant la technique du « found footage ». Ce procédé filmique consiste à présenter une partie de l’œuvre comme s’il s’agissait d’un document authentique. Réalité ou fiction ? Film professionnel ou Cinéma amateur ?
Maison hantée ou délires de l'imagination ? Le public ne peut plus faire la différence, perd ses repères, et se laisse irrésistiblement emporté.
Paranormal investigation : la révélation
Paranormal investigation figure aujourd'hui parmi les plus gros succès Netflix au niveau mondial. Porté par des acteurs de talent, une musique onirique signée Fabien Lévy-Strauss qui rappelle le cinéma de Jeunet et Caro, et un dispositif efficace qui consiste à traquer les fantômes à partir de quelques caméras posées dans une maison "hantée", le film démarre sur une séance de spiritisme qui tourne mal. Le jeune Dylan, campé par l'excellent Jean-Baptiste Heuet dont la performance fait froid dans le dos, est pris de tremblements et tombe dans une transe quasi incontrôlable.
Par la suite, il s'isole, s'assombrit, et devient dangereusement somnambule. Un chasseur de fantôme, Andrei Indreies, campé par une autre découverte l’acteur Roumain Andrei Indreies, vient à la rescousse pour faire un état des lieux et tenter d'aider des parents désemparés. Caméra au poing, il décide de filmer la maison de nuit, à ses risques et périls...
Certains diront que la peur des fantômes est ridicule. Que les revenants n'ont pas leur place dans un pays cartésien comme la France. Mais les incrédules n’ont qu’à faire un tour du pays pour découvrir la réalité de la vie paranormale. Ainsi, par une nuit d’orage, ils pourraient peut-être apercevoir la Dame Blanche qui hante le Château de Brissac, dans le Maine-et-Loire.
Crânes qui volent et apparitions de fantômes seraient quant à eux banals dans le Château de Monfort-sur-Argens, dans le Var. La plage de Hendaye, dans les Pyrénées-Atlantiques, accueillerait régulièrement des esprits de sorcières, présentes autrefois pour fêter le sabbat autour des menhirs. Quant à la légende de l'Ankou, personnification de la mort en Bretagne, elle est encore très vivace dans la culture celtique.
Une vie paranormale en France bien vivante
Car les fantômes savent se nicher dans l'imagination des Hommes et dans les Livres, qui ne cessent de leur donner voix au chapitre. Si Ulysse avait échangé quelques paroles avec le fantôme de sa mère, bien avant que le roi de Danemark ne révèle à son fils Hamlet le nom de son assassin, c’est avec le roman gothique, né au XVIIIe siècle, que ces êtres surnaturels feront leur entrée définitive dans la littérature européenne.
Et parce qu’ils sont indistincts, éphémères, et non palpables, les fantômes ne pouvaient pas rester longtemps invisibles sur le film photographique, surtout lorsqu'il était noir et blanc. Leur existence est révélée par la caméra dès 1897, lorsque Georges Méliès tourne Le Château hanté. Plus tard viendraient les inoubliables Poltergeist (1982), Ghostbusters (1982), Beetlejuice (1988), Ghost (1990), Casper (1995), Ring (1998), Sixième sens (1999), Les Autres (2000), Le Voyage de Chihiro (2011).
Ou encore Paranormal investigation (2018) de Franck Phelizon.