Aveuglement ou fanatisme ? Ni l'un, ni l'autre, affirme Bruno Retailleau, de Les Régaliens (LR canal paléo-historique) de François Fillon. Lequel n'a peut-être pas mesuré le risque que représente, dimanche, sa manifestation de soutien au Trocadéro. Lequel ne viendra pas de la coordination Stop Corruption (ou très marginalement), mais de la présence des identitaires, d'une partie de la fachosphère, alliée occasionnelle de Sens commun… François Fillon est devenu le candidat de Sens commun et d'un quarteron de caporaux autour du sergent Retailleau.

Il n'est plus crédible face à Marine Le Pen et quelques cent gardes des premières personnalités le désavouant viennent de s'en ajouter cent autres : une trentaine d'élus Les Républicains et UDI de l'Essonne, quelque 70 premiers, seconds ou troisièmes couteaux dont la presse régionale publie entretiens ou communiqués (dont un bloc de 45 en Paca). Et puis, François Fillon, promu candidat "antisystème" par lui-même et Régis Desmarais, en est réduit à s'appuyer sur la Trumpland hexagonale, avec les mêmes méthodes. Patrick Stefanini, son directeur de campagne, avait présenté sa démission, qui avait été refusée, et il la représente, publiquement cette fois. Que nenni assure François Fillon : Stefanini aurait repris sa seconde lettre "et est en ce moment au travail au QG de campagne".

François Fillon doit lire distraitement la presse… Et ne pas voir la croissance continue de la requête Penelopegate.

En pâture aux chiens

L'UDI de Jean-Christophe Lagarde n'a même pas attendu la remontée de ses instances fédérales pour exiger, dans Ouest-France, qui couvre les régions les plus centristes, que Les Républicains désignent un autre candidat que celui de Sens commun et du reliquat de Les Régaliens.

Estrosi demande que François Fillon désavoue la manifestation de dimanche, renforcée selon lui par des électrons libres du Front national et de la fachosphère. Ce serait pour César Fillon la fin. Mais il continuera sans doute (ce n'est plus assurément) à dénoncer la cabale de la presse, de la magistrature, du "cabinet noir de l'Élysée", faute de pouvoir s'en prendre à tant de Brutus.

Et puis, après tout, n'a-t-il pas empoché le nerf de la guerre via sa France "républicaine", son micro-parti ? Il sait aussi que si Penelope Fillon pourrait écoper d'une amende indulgente, il risque plus gros : autant durer, multiplier les astuces procédurales, tenter appel, cassation, enlisement, au-delà de l'issue du premier tour de l'élection présidentielle. Pour l'opinion, même celle que recueille Le Figaro, présumé innocent devient, dans son cas, prétendu transparent par soi-même. C'en est au point que les manifestants du Trocadéro, soucieux de ne pas se retrouver avec des identitaires encagoulés, se tâtent : ne pas y aller ou venir à visage découvert, et non chapeau ou foulard engoncé au-dessus des lunettes noires, pour éviter d'être pris en photo, de devoir affronter famille, amis et connaissances ?

Pour François Fillon, se dire encore livré en pâture aux chiens du fait du Penelopegate revient à évoquer les mastards, les bâtards, demi-sang, clébards en meutes et autres mâtins du parti Les Républicains ou de l'UDI. Périlleuse gageure. Mais ni le ridicule ni l'opprobre n'entament le portefeuille. Le cœur du séguiniste Fillon est resté à gauche, mais le monopole de la dotation pour les attachés parlementaires reste placé près de la gonade droite, au fond du caleçon. Une frémit, dixit Jacques Chirac, "sans faire bouger l'autre". Cela vaut bien de pomper dans les dons pour qu'une société privée, faute d'avoir le soutien des musclés LR, sécurise l'appel du Trocadéro. Fillon, devenu le Sganarelle non imaginaire de la présidentielle, se trouvera bien un autre parti pour durer.

Celui du sens (interdit) individuel ? Fillon a pris les sarkozystes et juppéistes à la Bonaparte, en hussard du très conservateur (des marbres), Paul Morand, en Monsieur Jadis est de retour. Ce fut le retour de manivelle Penelopegate.