Qu’est-ce que le CRPA ?

Nous sommes une association d’(ex-)usagés en psychiatrie, qui lutte contre l’internement abusif et les pratiques inhumaines. Dernièrement une famille nous a contactés suite à la mort d’un jeune homme interné causée par une surdose de neuroleptiques. D’autres dénoncent des faits de violence, des mises à l’isolement arbitraires pendant plusieurs jours. A l’opposé de la France, l’Italie place la psychothérapie au centre des traitements. Nous sommes contre le « tout médicament ».

Depuis septembre 2016, le CRPA est agréé pour représenter les usagers en santé mentale en Île-de-France.

Le CRPA est partenaire de l’Ordre des avocats du Barreau de Versailles (Yvelines) sur la question de l’hospitalisation psychiatrique sous contrainte, et adhérent au Réseau européen des usagers et survivants de la psychiatrie (ENUSP – REUSP)

Quels sont les objectifs du CRPA ?

Nous représentons la parole des usagers en psychiatrie auprès des pouvoirs publics. Le GIA né après 68, était gauchiste et contestataire. C’était la seule association à défendre le droit des internés, avec la judiciarisation et le déploiement d’avocats spécialistes à travers la France. La principale mission était de former les défenseurs et les impliquer pour la promotion des droits de l’homme en psychiatrie. Une centaine d’avocats sont aujourd’hui compétents, contre une dizaine seulement y a dix ans.

Pour moi qui suis un ancien patient en hôpital de jour pendant plus de dix ans, je suis d’avis que les usagers doivent prendre leur responsabilité, être actifs sur leurs soins et leurs droits.

Quels sont vos rapports avec le ministère de la santé ?

En psychiatrie, il faut passer par une lutte juridique pour pouvoir se faire entendre, et discuter avec l’Etat.

Comment le GIA et le CRPA ont influé des changements ?

Pour influer des changements, il faut au minimum une dizaine de bénévoles avec des vues politiques, de véritables militants. Dans les années 70, le droit des internés à l’hôpital psychiatrique n’existait pas. Il n’ y avait aucune jurisprudence. Le monde psychiatrique était alors « hors droit.

Le GIA a systématisé les actions juridiques, puisqu’à la fin des années 80-90, c’était le seul moyen d’aboutir à des revendications. Nous avons obtenu une centaine de condamnations de la France par la Cour Européenne des Droits de l’Homme entre 1989 et 2007 !

Quelle est l’action dont vous êtes le plus fier ?

Le GIA demandait depuis toujours la judiciarisation des internements sous contrainte : un contrôle judiciaire rapide et systématique de la légalité de ces internements. A l’époque, l’hospitalisation sans consentement en psychiatrie n’était pas contrôlée par voie judiciaire. La vérification légale de la détention des étrangers, elle, avait lieu au bout de trois jours ! Les « malades mentaux » déclarés « chroniques » devaient souvent attendre six mois voir plusieurs années d’enfermement avant de pouvoir passer devant un juge.

Tout a été rendu possible grâce aux Questions Prioritaires de Constitutionnalité, exécutoires depuis mars 2010. Nous avons utilisé une QPC dans une de nos affaires. Jean-Louis Debré, outré de l’indifférence des magistrats, a obligé le gouvernement et le parlement à judiciariser l’internement psychiatrique. Aujourd’hui, le juge des libertés et de la privation est obligatoirement saisi dans les quinze jours de chaque décision d’internement sous contrainte. L’existence des internements abusifs en est officialisée, puisque 8% de mains-levées sont décidées chaque année. Aussi, depuis septembre 2013 les patients sont obligatoirement représentés par des avocats (aide juridictionnelle).

Monsieur Bitton, considérez-vous avoir un certain pouvoir ?

Oui, nous avons un pouvoir d’intervention puisque nous avons gagné plus d’une centaine d’affaires. Nous sommes régulièrement auditionnés par le parlement. Nous avons un partenariat avec le barreau de Versailles, et nous diffusons de nombreuses jurisprudences inédites via notre site web.

Etes-vous complètement indépendant ?

Nous voulons notre indépendance et notre liberté d’action et de parole par rapport aux institutions psychiatriques et à l’Etat. Avec le GIA, nous étions en état de guerre pour faire avancer le droit des internés. C’est toujours le cas à l’heure actuelle pour le CRPA. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site du CRPA.