Le Capitalisme de plateforme, qualifié de capitalisme digital ou numérique, influence de plus en plus les nouvelles formes d’organisation du travail. Le capitalisme traditionnel, défini par des produits, des entreprises, des marchés et des équipes localisées en un lieu, n’a pas disparu mais il est de plus en plus concurrencé par un capitalisme de plateforme. Ce capitalisme numérique est déjà à l’œuvre grâce à Uber, Deliveroo (livraison à domicile), Airbnb ou Amazon. Il s’agit pour la plateforme numérisée de mettre en relation des prestataires de services et des clients.

Cette relation spécifique, nouvelle, modifie les rapports entre le prestataire et le créateur de la plateforme. Les conséquences économiques et sociales de cette relation créateur-prestataire sont nombreuses et elles n’ont pas été suffisamment analysées alors que le modèle économique et social du capitalisme de plateforme entraine des inégalités dans la relation contractuelle entre créateur et prestataire.

L’année dernière il y a eu une révolte des prestataires ubéristes qui ont largement contesté les obligations et les charges imposées par Uber. Nous sommes dans l’ère d’un capitalisme nouveau qui a tendance à s’institutionnaliser. Il est donc intéressant de réfléchir sur la nature des modèles économiques et sociaux de ce capitalisme nouveau.

Quels modèles économiques et sociaux pour les acteurs de la plateforme numérique ?

Un programme de recherche économique devient indispensable et urgent pour décrire le capitalisme de plateforme et les modèles économiques utilisés. Si la numérisation permet une ou des applications, le modèle économique est divers et on suppose donc que les modèles sociaux qui en découlent seront différents.

Le capitalisme de plateforme valorise le service en lieu et place du produit. Il met en avant le rôle actif de l’entrepreneur et son rôle dans l’économie dite collaborative, souvent présentée sous un mode gagnant-gagnant entre le gestionnaire de la plateforme, le prestataire de services et le client. La vérité est que le modèle économique du capitalisme de plateforme entraîne plus d’inégalités que d’égalités et que les inégalités impactent les nouvelles formes de travail.

Recomposition des inégalités et création des nouvelles formes de travail

Dans l’économie du capitalisme de plateforme, le prestataire est celui qui supporte le plus les coûts de transaction et les dépenses d’adhésion à la plateforme. Les conditions de son existence au sein de la plateforme peuvent devenir très vite explosives. Le capitalisme numérique postule le développement d’un capitalisme start-up-typal de référence au sein duquel l’entrepreneur devient le nouveau roi arbitrant à sa guise le temps de travail et le temps domestique. La réalité est belle sur le papier et non dans la pratique car la plateforme a des exigences en matière de respect du cahier des charges et de retour sur l’investissement numérique.

Le modèle traditionnel de l’emploi fait place à la mobilité. La classification des prestataires de service dans les catégories classiques devient difficile car c’est la mobilité qui devient la règle. Pour ces prestataires de service, les options en matière de protection sociale deviennent contingentes et les autorités publiques ont de plus en plus de mal à organiser la régulation de ce type d’activité tant les acteurs et les statuts au sein du capitalisme de plateforme sont multiples et variés. Comment construire une conscience de classe au sens marxiste pour des salariés autoentrepreneurs dont la mobilité est la règle ?

Le capitalisme de plateforme est là, il va forcément modifier les configurations économiques et sociales traditionnelles du travail et de l’emploi.