Après le bras de fer entre Kim et Donald, voici arrivé le temps de la mise en scène de la main volontairement tendue de Kim à Donald. Dans la balance médiatico-diplomatique, Kim a marqué un point et Donald espère gagner la partie. Les faits présentant le bras de fer entre Trump le vieillard et Kim Jong I rocket man, ne doivent pas minimiser les efforts diplomatiques de la Corée du nord et des Etats-Unis pour arriver à une paix improbable, mais possible. La rencontre fraternelle des deux Corée pendant les jeux d’hiver relève plus du cirque diplomatique que de la réalité sur le terrain.

Il ne faut pas être naïf et croire que la magie des jeux a opéré en favorisant le rapprochement attendu entre les deux Corée. Les diplomaties chinoise et sud-coréenne étaient à la manœuvre pour un dialogue possible entre Kim Jong I et Donald Trump.

Les relations compliquées entre Kim Jong I et Trump

Alors que son grand-père Kim Il Sung et son père avaient échoué à rapprocher les Américains de la Corée du Nord, Kim Jong I est peut-être en train d’écrire une nouvelle page d’histoire dans les relations compliquées avec les Américains. Bill Clinton à la fin de son mandat avait souhaité un rapprochement avec la Corée du nord, il s’est ravisé sous l’influence du complexe militaro-industriel américain qui aurait interprété ce rapprochement comme un échec de la politique étrangère américaine.

Depuis la fin de la guerre de Corée et le traité de Panmunjom de 1953 (traité jamais ratifié), les deux Corée vivent séparées par une ligne de démarcation. Kim Jong I, en stratège, a compris qu’il fallait hausser le ton vis-à-vis de l’Oncle Sam qui adore les rapports de force. Ce bras de fer a permis à Kim Jong I de poursuivre son programme nucléaire et de montrer à la face du monde qu’il n’avait pas peur des Etats-Unis car protégé par les parrains russes et chinois, et surtout la Chine qui ne souhaite pas une modification des rapports de force dans la région.

La Chine joue un double jeu : accepter les sanctions contre la Corée du nord édictées par les Etats Unis via le Conseil de sécurité, tout en continuant en sous-main son business avec ce pays et l’exploitation à faible coût des mines de charbon et autres matières premières utiles à son industrie mondialement triomphante. Une autre explication est à rechercher au plan intérieur : Kim Jong I a passé un deal avec l’armée (construire la bombe), ce qui est une manière de reconnaître le rôle que celle-ci a joué dans la lutte contre la famine.

C’est la même méthode utilisée par Deng Xiaoping qui, en 1979, avait demandé à l’armée de ne pas aller jusqu’à Hanoï au moment où la Chine envahit le Vietnam, le deal étant la modernisation de la Chine et son ouverture au capitalisme mondial sous l’autorité du Parti communiste.

Que dit-on du côté des Etats Unis et de Trump ?

La décision de discuter avec la Corée du nord a été prise de manière unilatérale par Trump après avoir reçu à la maison blanche le Conseiller spécial du Président de la Corée du sud. Cette décision solitaire, que le tout Washington politique ne comprend pas et que d’aucuns rangent du côté de l’émotion et du caractère impulsif de Trump, peut être analysée comme un coup de maître, Trump agit comme s’il était en négociation dans son business.

Il estime que la situation était bloquée et qu’il faut prendre une décision en espérant en contrôler les conséquences. Sera-t-il éligible à un Prix Nobel s’il réussit son deal avec Kim Jong I ? Sans aller jusqu’à l’établissement d’un nouveau traité de paix, le dialogue violent entre Kim Jong I et Trump a permis à la Chine de construire son troisième porte-avion, au Japon de modifier la constitution lui permettant de lever une armée offensive pour défendre ses intérêts et à la Corée du Sud de regarder avec intérêt la formidable croissance de la Corée du Nord qui pourrait profiter à ces vastes conglomérats industriels, appelés Chaebols, comme Samsung ou Hyundai. Si accord il y a entre Kim Jong I et Trump au mois de mai, plusieurs problèmes seront mis sur la table, comme la dénucléarisation, la démilitarisation de la frontière séparant les deux Corée.

Le chemin reste long. Au total la Corée du nord est fière de sa bombe obtenue grâce à une diplomatie dominée par la menace, mais surtout par la ruse. Pour Trump, il aura montré avec extravagance et outrance qu’on peut diriger les affaires du pays comme on dirige un business dans la vie économique en faisant des deals gagnants ou perdants.