C'est une manière de botter en touche alors qu'un rapport parlementaire sur le parquet national financier salue et sa compétence et ses résultats. Le parquet a donc en mains les rapports des policiers mais persiste dans son intention de poursuivre l'enquête. Ce qui signifie en clair qu'un classement sans suite pour l'ensemble des faits en sa possession (présumés emplois fictifs tant à l'Assemblée nationale qu'à La Revue des Deux Mondes) semble exclu. Effectivement, comme le soutient François Fillon, "il n'y a rien de nouveau". Car le nouveau reste à venir… avant ou après le premier tour de l'élection présidentielle.
"Je m'en remets donc désormais au seul jugement du suffrage universel", indique crânement le candidat LR, reprenant à son compte l'attitude de Donald Trump qui, puisqu'il a remporté l'élection, ne communique toujours pas ses données fiscales qui "n'intéressent que les journalistes".
Conforté par un sondage
Le dernier en date des sondages, celui d'Ipsos-Sopra pour le Cevipof (Sciences Politiques), portant sur près de 16 000 personnes, donne les mêmes résultats que les précédents quant à la position des sympathisants LR : ils sont 13% de moins qu'en janvier, mais toujours 63% à se dire déterminés à voter pour lui, qu'il soit ou non passé en justice. Il peut grappiller encore des voix à droite et au centre, mais, en l'état, pas assez pour se qualifier au second tour.
Pour se redresser, il lui faut à présent mettre en avant des premier ministrables. En revanche, sur le Penelopegate, sa ligne de contre-attaque ne varie pas. Ses avocats persistent à dire qu'au bout de trois semaines d'enquête "il n'y a pas d'éléments suffisants pour requérir des poursuites". Mettons qu'il ne s'agisse toujours que de graves présomptions.
Admettons qu'elles soient insuffisantes. Dans ce cas, pourquoi persister à mettre en doute la compétence du parquet (en contradiction avec le récent rapport parlementaire), et le "principe de la séparation des pouvoirs" ? Ce dernier argument donne l'occasion à François Bayrou, qui a peut-être plombé la campagne d'Alain Juppé lors des primaires, mais reste écouté, de redire que "ce n'est pas la protection des abus, ni la dissimulation des dérives" car "autrement, n'importe quelle exaction pourrait être faite par un parlementaire".
Petit frémissement de son côté, une trentaine d'élus Modem de Bretagne viennent de lui lancer un appel pour qu'il se présente afin qu'un "homme qui a su s'opposer aux dérives des gouvernances politiques des derniers quinquennats" puisse l'emporter. François Fillon pense botter en touche, mais c'est dans le vide. Il préconise d'abaisser la majorité pénale à 16 ans ? Il lui est rétorqué que la justice à assez à faire avec les majeurs comme lui. Il veut favoriser la défiscalisation des donations aux enfants ? Il lui est renvoyé "je propose donc de payer les avocats dès l'âge de quatre ans". Que Bayrou se présente ou non, François Fillon ne peut plus espérer qu'une érosion lente du côté des voix Front national.
Ou un improbable effondrement d'Emmanuel Macron, conforté ou non par François Bayrou (selon qu'il se présente ou le rejoigne). Si François Fillon l'emportait, fragilisé par une abstention massive qui pourrait se répercuter à son seul détriment aux législatives, la sente resterait étroite, et "la pente forte" comme le disait si bien Jean-Pierre Raffarin. Cela vaut aussi pour Thierry Solère. L'ex-redchef du Canard enchaîné, Claude Angeli, considère que ni l'un, ni l'autre, ne porteront pas plainte pour diffamation. Ils l'ont pourtant clamé.