Le Président Macron est intelligent et malin. Il a réussi à bâtir son mouvement en s’adressant à chacun d’entre nous et, au nom de la bienveillance, il est parvenu à nous faire croire que nous étions capables de grandes prouesses en tant qu'individus et qu'il suffisait de le penser.

Macron a fréquenté le philosophe Paul Ricoeur, professeur émérite de philosophie à l'Université de Nanterre, avec lequel il a réfléchi et écrit un ouvrage. De l’œuvre de Ricoeur, Macron a retenu trois choses importantes.

  1. La bienveillance est un modus vivendi des relations qui doivent gouverner les hommes, quels que soient leurs désaccords et leurs oppositions politiques et humaines.
  2. Il faut valoriser l’individu, non au sens néoclassique et économiciste de l’homo-economicus qui serait uniquement guidé par son intérêt individuel, mais un individu conscient de l’existence de l’autre qui lui sert, non de marchepied, mais de référent pour poursuivre une mission. D’ailleurs quand on interroge Emmanuel Macron, il répond avec conviction qu’il a quitté son métier de banquier qui lui rapportait énormément d’argent et de profits, au sens de l’homo-economicus néoclassique, pour servir les homo-sociologicus et politicus qui ont pour mission l’intérêt général. On a raillé l’attitude christique de Macron pendant la campagne présidentielle. François Baroin, leader des Républicains aux élections législatives, Sénateur-Maire de Troyes, se moque des députés de En Marche choisis par catalogue, alors que Macron vient de démontrer qu’il est hyper-organisé et que ça marche. François Baroin ferait mieux d’être moins méprisant, lui qui a incarné longtemps la jeunesse au sein des Républicains. Baroin, par rapport à Macron, apparaît comme vieux, dépassé et incapable de changer de logiciel mental.
  3. La relation bienveillante avec l’autre oblige l’autre à croire en vous et à se mettre à votre service. Macron a retenu cette leçon de son vieux maître et professeur Ricoeur et il réussit là où ceux qui sont de sa génération, comme Baroin, Bruno Le Maire, Valls et d’autres, ont échoué à modifier le fonctionnement des partis traditionnels PS, LR, etc. auxquels ils appartiennent.

Macron a accéléré la décomposition du paysage politique français

Personne n’a cru dans l’œuvre restauratrice d’Emmanuel Macron, gadget pour les uns, bulle pour les autres.

L’œuvre politique de Macron a toujours été raillée. Macron se lance après la présidentielle dans une seconde aventure : il faut montrer à la France qu’on peut faire de la politique autrement sans passer par les pratiques politiques traditionnelles (militantisme, cotisation, affichage, participation aux réunions). Il a utilisé l’internet et les nouvelles technologies en créant une start-up articulée autour de quelques membres fidèles dont sa conseillère à la presse, N’Diaye Sibeth, une jeune sénégalaise de 37 ans, mère de trois enfants, Noire et devenue française en 2016.

A la différence des vieux partis de Droite, Les Républicains, et de Gauche, Parti socialiste, qui ont toujours amusé les Français en parlant de diversité de façon théorique sans passer à l’action, Macron ne parle pas de diversité mais le fait dans les actes au nom de la compétence. Le PS est mort. Valls a trahi. Hamon crée son mouvement.

Martine Aubry, Hidalgo et Taubira ont créé le leur : Dès demain pour l’action. Chez les Républicains, Macron risque de provoquer un effet de souffle important s’il nomme un premier Ministre appartenant à cette sensibilité. Au Centre-Droit Borloo peut être considéré comme un premier ministrable.

Macron doit créer un filet de protection pour empêcher les vieux députés rapatriés socialistes (dont Valls) et LR de lui nuire

Macron veut un renouvellement. S’il accepte Valls dans sa majorité, il faut qu’il crée un enclos autour de celui-ci pour éviter d’avoir la désagréable surprise de frondeurs au sein de la majorité présidentielle. Valls n’a plus d’espace politique. En rejoignant la majorité présidentielle, il souhaite réexister dans l’espace politique français et attendre 2022.

Il veut réaliser au sein de la majorité présidentielle de Macron ce qu’il n’a pas su faire avec Hollande, c'est-à-dire être un député de base qui fourbit des armes et des stratégies inavouables pour être un élément de recours éventuel en même temps que membre important de la majorité présidentielle à l’Assemblée, compte-tenu de son statut d’ancien Premier Ministre. Macron doit se méfier de ces ralliés de la dernière heure au macronisme que tout le monde haïssait hier et que tout le monde adore maintenant.