Il est rare de voir Marine Le Pen accueillie en dehors des frontières de l'Europe. Mais la candidate du Front National à l'élection présidentielle cherche depuis quelques temps à étendre son réseau d'influences au-delà des Etats-Unis ou des pays européens soumis à la montée de l'extrême droite. Ainsi, du lundi 20 au mardi 21 février, elle sera à Beyrouth, au Liban, où elle rencontrera le président libanais Michel Aoun et son premier ministre Saad Hariri. Le thème de cette rencontre et de toute sa visite sera sans doute la religion, puisqu'elle discutera avec le grand mufti ainsi qu'avec le patriarche maronite.
D'ailleurs, le principal intérêt du Front National au Liban serait les chrétiens qui y résident, qui sont en très grand nombre dans ce pays où cohabitent diverses religions - pas moins de 18 ! Ils composent près de 41% de la population du pays, soit un peu plus de 2 millions de personnes.
La relation du FN avec le Liban date de la guerre civile
Les responsables frontistes avaient pris contact avec les chrétiens libanais dès le début de la guerre civile, qui commença en 1975 pour s'achever en 1990. En effet, il s'agissait surtout d'une guerre de religions entre les musulmans et les chrétiens du Liban, à laquelle les Israéliens et les Syriens avaient fini par participer, amplifiant la crise qui était survenue alors.
Les plus vieux responsables frontistes avaient pris part au conflit aux côtés des chrétiens libanais, qualifiant les ennemis de la communauté chrétienne de terroristes. De sorte qu'entre 1984 et 1985, au moment du conflit contre les druzes, certains responsables du Front National s'étaient rendus au Liban pour venir prêter main forte aux chrétiens.
Or, ce sont justement les maronites, une branche du christianisme, qui tiennent le pouvoir au Liban, et qui, représentants de la droite chrétienne, ont conservé des contacts avec le FN.
On trouve même des liens entre des terroristes chrétiens libanais et certains responsables frontistes. Par exemple, Samir Geaga, un ancien milicien chrétien de la guerre civile, condamné à de la prison pour un attentat dans une église ayant fait 11 morts, a eu pour avocat Wallerand de Saint-Just.
Libéré en 2005, il rencontrera Marine Le Pen lors de sa visite au Liban.
Jean-Marie Le Pen pourtant mal accueilli en 2002
Malgré ces liens forts entre les dirigeants frontistes et la droite chrétienne libanaise, il ne faut pas oublier qu'en 2002, dans le cadre de l'élection présidentielle, Jean-Marie Le Pen, alors eurodéputé, s'était rendu au Liban et qu'il n'avait pu rencontrer ni le président, ni le premier ministre - qui était, à l'époque, le père de l'actuel premier ministre. Mais aujourd'hui, en faisant jouer ses relations, Marine Le Pen a pu obtenir un rendez-vous avec ces deux dirigeants. De toute manière, il était évident qu'ils n'allaient pas accepter de rencontrer Emmanuel Macron - venu en janvier - et refuser de faire de même pour la dirigeante du Front National.
C'est sans doute aussi une preuve que la stratégie de dédiabolisation du parti menée par Marine Le Pen depuis 2011 commence à porter ses fruits, et que les chefs d'Etat étrangers voient de moins en moins le Front National d'un mauvais oeil.