Plafond de verre, sans doute : en cause, notamment, la sortie de l'euro. Un point sur lequel Marine Le Pen a mieux convaincu ses partisans et sympathisants, mais qui voit l'ensemble des électeurs s'y opposer davantage. Le sondage Sofres-One Point pour Le Monde et France Info est quelque peu malaisé à interpréter car il porte autant sur l'adhésion de la population aux thèmes et idées défendues par le Front National que sur l'image du parti et de sa cheffe de file. Les résultats peuvent paraître à la fois cohérents et contradictoires. Le paradoxe serait que, hors question de l'euro et de la préférence nationale à l'embauche, les idées et thèmes, notamment les sécuritaires, défendus par le FN recueilleraient davantage l'adhésion de la population, d'une, mais, de deux, qu'elle lui ferait moins confiance qu'auparavant.

Cela tient à ce que la montée en puissance du Front fait qu'il est considéré davantage en position de nuire à la démocratie, aux institutions. L'image du FN ne s'améliore pas globalement, mais ses candidates et candidats pourraient recueillir 29 % des suffrages (17 % d'électeurs restant fidèles, 12 % envisageant de voter FN). Ses déperditions s'amenuisent : 3 % de personnes ayant déjà voté FN n'envisagent pas de le refaire (contre 6 % auparavant, l'an passé).

Les Républicains se "rapprochent"

Sur les thèmes sécuritaires, ce sont les sympathisants de LR qui se sont le plus rapproché des propositions du FN. Ce qui ne signifie pas que cela se transformerait en intentions de vote. Globalement, il n'y a plus que 42 % à penser que Marine Le Pen peut rassembler au-delà de son électorat acquis (soit une chute de sept points sur un an).

En fait, les variations d'avec l'étude 2016 (consultable sur le site TNS-Sofres) portent surtout sur "le niveau d'adhésion" aux idées qui varient en hausse ou en baisse. Sur l'euro, l'an dernier, 26% se déclaraient plutôt favorables ou favorables à son abandon. Est-ce l'effet Brexit ? Ils ne seraient plus que 22% (-4 pts). Cela étant, déjà, l'an dernier, les marges de progression électorale avaient déjà progressé, et cela se confirme.

Cela alors que l'actuelle étude réitère le constat de la précédente : la "dédiabolisation" fonctionne peu. Selon un autre sondage, plus récent, du même institut, cette fois pour Le Figaro et LCI, 53% de l'électorat déclare qu'il ne votera jamais pour Marine Le Pen. En sera-t-il de même pour les candidats du Front national aux législatives ?

Si la proposition de François Bayrou, acceptée (sur le principe) par Emmanuel Macron, venait à se concrétiser, qu'en serait-il en 2022 ? Ce baromètre a été réalisé entre les 23 et 27 février derniers… En l'état actuel, chaotique, de la campagne pour l'élection présidentielle, on peut se demander si le refaire la semaine prochaine donnerait des résultats sensiblement identiques ou ayant quelque peu évolué… Côté intentions de vote, Marine Le Pen semble ancrée à 26%, les variations, sur le temps ou selon les instituts, étant très faibles. En cas de très forte abstention au second tour, en fonction de ce qui peut handicaper (si ce n'est disqualifier) les autres candidats ayant obtenu leurs parrainages d'ici là, de l'imprévisible, on peut se demander à quel étiage se situerait le fameux plafond...

Mais, selon Mediapart, en deux ans, 28% (près de 400) des élus municipaux FN auraient abandonné soit le parti, soit renoncé à leur mandat. Le Front national reste un énigme, mais qui pourrait encore fortement surprendre. Son adversaire LR aussi : hier soir, c'était l'unité retrouvée, ce matin, Valérie Debord déclarait que "la réalité, celle du mensonge de François Fillon face aux Français, elle ne s'est pas effacée d'un claquement de doigts". La "confession" de Penelope Fillon au Journal du dimanche ne semble pas avoir totalement convaincu. L'électorat FN est solide, d'autres le sont beaucoup moins.