Pris dans de fastidieuses tractations avec le président du Sénat Gérard Larcher, Emmanuel Macron serait bien tenter de lancer un référendum pour faire passer son projet de réforme de la Constitution française.
Il faut dire que bien avant de lancer ses négociations avec le Sénat, l'Elysée avait déjà envisagé de garder en dernier recours l'option sous le corde au cas où les discussions n'aboutiraient pas à un accord. La faute à une position intransigeante de Gérard Larcher sur un certain nombre de mesures prévues par la réforme constitutionnelle.
En effet, si un consensus est déjà acté entre l'Exécutif et le Sénat sur de nombreux sujets comme la réforme du Conseil de la magistrature ou la suppression de la Cour de justice de la République, d'autres en revanche posent problème.
C'est le cas notamment avec le cumul de mandats dans le temps, les découpages de circonscriptions pour l'élection de sénateurs ou encore l'injection d'une dose de proportionnelles aux législatives. Alors, face à cette difficulté et à défaut de reculer, le président Macron pourrait se retrouver contraint d'essayer un passage en force.
Un bras de fer annoncé avec le Conseil constitutionnel
Contourner le vote au Congrès en passant par une consultation directe des électeurs par la voie référendaire, voilà la manoeuvre à laquelle l'entourage du Chef de l'Etat essaie depuis quelques semaines de préparer l'opinion publique. Seul problème, l'interprétation de l'article 11 de la Constitution de 58 qui autoriserait cette alternative est sujette à querelle entre juristes.
Pour Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à Paris-I, la manoeuvre est risquée étant donné que de nombreux juristes considèrent la procédure comme "non conforme" à une révision constitutionnelle. Si Emmanuel Macron peut invoquer pour lui le précédent constitué par les deux appels à référendum lancés par le général De Gaulle en 62 et 69, les prérogatives du Conseil constitutionnel ont elles largement évolué depuis 1958.
Macron au Congrès entre apaisement et appel à responsabilité
Pour sortir de l'impasse, la garde des sceaux et ex-membre du Conseil constitutionnel, Nicole Belloubet, estime que l'Exécutif a encore de belles cartes à jouer. En effet, sur les sujets qui fâchent comme la réduction du nombre de parlementaires ou la proportionnelle, la loi est largement suffisante pour agir.
Même créneau pour le non-cumul des mandats dans le temps puisque selon l'article 25 de la Constitution, la loi organique est compétente pour établir "les conditions d'éligibilité" et "le régime des inéligibilités" des parlementaires. Une scission du projet de réforme pour faire valider la partie qui fait consensus au Congrès et soumettre l'autre à la consultation des électeurs, voilà une initiative politique qui pourrait bien braquer définitivement le Sénat contre l'Exécutif.