A l'occasion de son discours de politique générale prononcé devant les députés mercredi, Edouard Philippe a évoqué la possibilité d'un report de la réforme constitutionnelle. En cause, le Premier ministre a ouvertement pointé la responsabilité du Sénat qui jouerait de son poids pour freiner les ambitions de l'exécutif, notamment sur la question du nombre de parlementaires. La situation a d'ailleurs provoqué depuis le courroux du président de la Chambre Haute Gérard Larcher qui se refuse à servir de bouc-émissaire.
Le dossier pourrait en tout cas devenir explosif dans les semaines à venir, avec les renvois de balle qui s'opèrent entre le gouvernement et le Sénat.
Autant dire que l'intervention du chef de la majorité accusant une volonté partisane de donner un coup de frein à une aspiration populaire, n'a pas été du goût de l'indéboulonnable sénateur LR des Yvelines. Ce dernier avait d'ailleurs vivement réagi à la prestation du locataire de Matignon qui semblait en tout point dire que tout était la faute des grands élus sur ce cas.
Le Sénat joue la carte du contre-pouvoir
Hors de question de se laisser hacher par une stratégie purement politicienne de l'exécutif, c'est déjà l'état d'esprit que nourrit un certain nombre de locataires du palais du Luxembourg. Beaucoup ont ainsi fait le choix de s'abstenir jeudi dernier au moment de voter la confiance au chef du gouvernement sur la politique qu'il entend mettre en oeuvre dans les prochains mois.
Cela représenterait pour certains la volonté de ne pas signer un chèque en blanc au président de la République pour le reste de son quinquennat.
Mais encore faudra-t-il, pour répondre aux exigences de renouveau démocratique posées par Emmanuel Macron, que les désaccords puissent être levés entre les deux premiers personnages de l'Etat.
D'autant que la bataille politique continue de faire rage avec un centre de décisions majoritairement axé à droite au Sénat où Gérard Larcher fait assez bien entendre son incompréhension face à la position de l'exécutif. Le vieux sage note qu'il jouera à fond son rôle de contre-pouvoir pour obtenir un juste compromis.
L'exécutif appelle toujours à un dépassement des clivages
Cependant, du côté du gouvernement, on n'a pas encore totalement oublié le zèle qui avait animé les sénateurs au moment de se pencher sur la tentaculaire affaire Benalla. Edouard Philippe et la majorité espèrent donc s'appuyer sur son appel à dépasser les clivages pour faire avancer leur projet de réforme dans les prochaines semaines ou les prochains mois. Une mise en garde toutefois, celle à l'endroit de la Chambre Haute de ne pas résister à la forte demande exprimée par les Français lors du Grand débat national.
Concrètement, l'exécutif brandit toujours la menace d'user de sa prérogative de solliciter directement le soutien du peuple par voie référendaire.
Mais, en coulisses, on préfère épuiser les derniers recours possibles pour obtenir un accord avec l'opposition sénatoriale sur les conditions de mises en oeuvre de la future réforme des institutions. Autant dire que le chemin s'annonce encore très long avant la mise dans les tuyaux du Parlement d'un projet qui pourrait bousculer de manière significative l'espace politique français.