Plus qu'une ! Une seule victoire et Roger Federer sera sacré à Wimbledon pour la huitième fois de son immense carrière, ce qui constituerait un record de l'autre côté de la Manche. Pour l'heure, le Suisse a d'ores et déjà gagné le droit de disputer une onzième finale au All England Club (du jamais vu dans un même tournoi du Grand Chelem chez les hommes), à la faveur d'un succès étriqué contre le Tchèque Tomas Berdych, tombeur de Dominic Thiem et qui avait ensuite profité de l'abandon de Novak Djokovic, touché à l'épaule, en quart de finale.

La quinzaine de "Fed" s'apparente pour le moment à un rêve.

Lui qui avait tiré un trait la saison sur terre battue, ne croyant guère en ses chances de succès à Roland-Garros, sur la surface qui sied le moins à son incommensurable talent, avait manqué sa reprise, trébuchant dès son entrée en lice à Stuttgart contre son ami Tommy Haas, 39 ans (!) Simple retard à l'allumage pour le Bâlois, lequel s'est ensuite imposé à Halle pour la neuvième fois, rassurant ainsi les observateurs quant aux vertus de cette coupure volontaire et salutaire.

Après un début de saison presque parfait qui l'a vu gagner l'Open d'Australie, puis les Masters 1000 Indian Wells et Miami, un triplé tonitruant et jamais vu pour lui depuis 2006, la gâchette helvète, aussi réglée était-elle, éprouvait en effet le besoin de souffler.

De reposer ce corps qu'il gère admirablement, à un âge où d'autres raccrochent les raquettes ou ne parviennent plus à suivre l'infernale cadence imprimée par les meilleurs.

Dans l'antre du Tennis, il est apparu revigoré. Sérieux. Concentré. Appliqué. Et jusqu'à présent imperméable au poids de l'histoire, à ces records qui continuent de tomber, à l'enjeu, qui est pourtant considérable, ainsi qu'à la charge émotionnelle, dans le tournoi qu'il préfère.

Après avoir profité de l'abandon de l'Ukrainien Alexandr Dolgopolov, "Fed" a activé le mode express pour disposer sans coup férir du Serbe Dusan Lajovic et de l'Allemand Mischa Zverev, un gaucher talentueux, un pur attaquant qu'il avait déjà battu en quart de finale à Melbourne.

Ce fut ensuite le tour du Bulgare Grigor Dimitrov, souvent comparé au Suisse en raison de similitudes évidentes en matière de gestuelle, demi-finaliste à Londres en 2014, mais qui n'a toujours pas ouvert son compteur en Grand Chelem et n'a grappillé que 10 jeux.

Le quart de finale contre Milos Raonic, tombeur de Roger Federer en demi-finale l'an passé, ne fut guère plus disputé, la faute à un Bâlois impérial dans les points décisifs.

Valeureux, le susnommé Tomas Berdych s'est quant à lui incliné 7/6, 7/6, 6/4, ce qui donne à penser que la marge du septuple vainqueur du tournoi tend à se réduire dans les derniers tours. Rien d'anormal ni de préoccupant, mais il lui faudra certainement hausser encore son niveau de jeu pour réaliser son rêve de remporter un dix-neuvième tournoi majeur.

Marin Cilic, un client sérieux

Car si "Rodgeur" n'a pas perdu le moindre set en 6 rencontres contre des joueurs aux références bien réelles sur gazon, Berdych a également atteint la finale de Wimbledon, en 2010, en battant notamment...

Roger Federer en quart de finale, c'est désormais Marin Cilic qui l'attend.

Joueur puissant et assez complet, serveur redoutable, le Croate n'est pas un profane, lui qui a déjoué tous les pronostics en triomphant à l'US Open en 2014, après avoir littéralement marché sur "Fed" et sur Kei Nishikori, ses 2 ultimes adversaires. L'ancien élève de Goran Ivanisevic a donc déjà dominé son aîné helvète dans le passé et déjà disputé - et gagné - une finale majeure, ce qui suppose qu'il est à même de s'affranchir de l'appréhension inhérente à un tel rendez-vous.

Parfois réputé friable mentalement, il a au cours de ses 2 derniers matchs surmonté l'égalisation à 2 sets partout du surprenant luxembourgeois Gilles Müller, tombeur héroïque de Rafael Nadal en huitièmes de finale dans ce qui a été pour le moment la plus belle joute de cette cuvée 2017, et digéré une entame de match délicate contre Sam Querrey, le bourreau d'Andy Murray en quart de finale.

Plus mûr, affûté, manifestement sûr de sa force, Marin Cilic, actuellement sixième à l'ATP, a aussi mené 2 sets à rien contre Roger Federer en quart de finale de l'édition 2016 du tournoi londonien avant de se procurer 3 balles de match qu'il n'est pas parvenu à convertir.

En pleine possession de ses moyens physiques, ce "Rodgeur"-là est certes bien plus fringant et sera autrement plus difficile à vaincre que celui de l'année dernière. Il a l'opportunité d'écrire encore l'histoire de son sport et de repousser de nouvelles limites. Avec, à tout le moins sur le papier, un avantage psychologique considérable : la force et l'assurance tranquilles de celui qui n'a plus rien à prouver.