Le mandat du président Nicolas Maduro est depuis 2015 fragilisé par une opposition -parti de droite, libéral, social-démocrate-, majoritaire à l’Assemblée. Très vite, le régime durcit sa politique et prend des mesures anticonstitutionnelles : annulation en 2016 du référendum révocatoire visant à organiser des élections présidentielles anticipées, octroie en mars 2017 par la Cour Suprême des attributions du Parlement pendant deux jours.

Le Venezuela, un Etat brisé par les crises

Face à ces actes, l’opposition soutenue par une partie des Vénézuéliens revendique l’organisation d’élections anticipées.

Pour se faire entendre, elle appelle à la grève générale et organise des manifestations. Ces dernières sont vites réprimées par le régime : 5.400 personnes sont arrêtées et l'on compte également 340 prisonniers politiques et 124 personnes décédées.

A ces troubles politiques s’ajoute une grave crise économique due en grande partie à l’effondrement des prix du pétrole en 2015. En effet, l’économie du Venezuela étant essentiellement axé sur l’exploitation du pétrole -qui représente 96% de ses exportations-, le pays se retrouve vite en manque de dollars pour payer ses fournisseurs ce qui a pour conséquences le retrait des multinationales et la hausse de l’inflation -estimée à 652% en 2017-.

Aujourd’hui, le pays vit donc une catastrophe humanitaire marquée par une pénurie des produits de base et une pénurie de 95% des médicaments.

Pour le rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation pour les Nations Unies, Hilal Elver la situation est insoutenable : "À la fin de l'année dernière, une famille avait besoin de gagner 63 salaires minimums pour acquérir le panier familial de base".

« L’Amérique latine vit l’une des plus grandes crises des réfugiés de son Histoire. »

L’Amérique latine et les Caraïbes accueillent 16% des personnes déplacées dans le monde, parmi lesquelles, les Vénézuéliens. D’après le Think Tank Brookings Institution, 4 millions de Vénézuéliens auraient fui leur pays depuis 1999, ce qui équivaudrait presque au nombre de réfugiés syriens depuis 2011, considéré à environ 5 millions.

Entre 2014 et 2017, près de 80.000 demandes d’asile ont été déposées, les principaux pays d’accueil choisis par les vénézuéliens étant les Etats-Unis avec 18.300 demandes et le Brésil avec 12.960 demandes.

Ces dernières années, les crises traversées par le Venezuela ont provoqué l’exode d’une partie de sa population donnant alors naissance à une véritable diaspora. Ainsi, il y aurait actuellement au Brésil entre 20.000 et 30.000 vénézuéliens, 300.000 en Colombie et 40.000 à Trinidad et Tobago.

"Une crise des réfugiés qui déstabilise les pays limitrophes."

Face à l’afflux de Vénézuéliens, la Colombie et le Brésil ont pris ces dernières semaines de nouvelles mesures. Le président colombien Nicolas Santos a récemment durcit le contrôle aux frontières en déployant 2.000 soldats supplémentaires et en suspendant les cartes d’accès temporaires.

Quant au Brésil, le président Temer a déclaré « l’Etat d’urgence sociale » le 15 février : un doublement des effectifs de l’armée dans l’Etat du Roraima -Etat où se trouvent les réfugiés- est prévu ainsi que la mise en place d'un hôpital et d'un centre de triage pour les réfugiés.

Sybile Morel