Le regard caché sous des lunettes de soleil, muni de son sourire légendaire au contour d'une coiffure à la boule zéro, Manu Dibango collé à son saxophone a fait vibrer l'afro-jazz dans plusieurs nations du monde. L'annonce de son décès a résonné telle une cloche qui aurait arrêté d'annoncer les fidèles à l'église. Le grand Manu a en effet cassé sa pipe ce 24 mars 2020 en île de France, des suites d'une infection dû au Coronavirus (Covid-19).

Sa famille a confirmé son décès via les réseaux sociaux. "Chers parents, chers amis, chers fans, une voix s’élève au lointain… C'est avec une profonde tristesse que nous vous annonçons la disparition de Manu Dibango, notre 'Papy Groove', survenue le 24 mars 2020 à l'âge de 86 ans, des suites du Covid-19", a-t-on pu lire sur la page Facebook de l'artiste.

Des hommages ont ainsi commencé à fuser de partout. L'artiste camerounais Ekambi Brillant sur les antennes de la CRTV (chaîne de télévision nationale du Cameroun), s'est dit effondré par cette nouvelle.

Le célèbre animateur Claudy Siar lui a rendu un hommage poignant dans une vidéo et a fini par éclater en sanglot. "Au revoir Manu, grand musicien, Compositeur, multi instrumentiste, est mort. Mes sincères condoléances à la famille, aux amis", s'est exprimée Laura Flessel (sportive française médaillée d'or aux jeux olympiques d'escrime en 1996 à Atlanta et femme politique) sur son compte Twitter.

Manu Dibango, l'art d'exister à travers le saxophone

Le Cameroun perd ainsi une immense star du saxophone qui était érigée comme un héros dans son pays.

Il s'est toujours exprimé sur sa nationalité camerounaise qu'il n'a en aucun cas voulu changer. Homme de mesure et de poigne, il n'a cessé de se prêter au jeu de l'humanitaire et de l'engagement social. C'est ainsi qu'avec l'actrice française Juliette Binoche (actrice oscarisée), il signe une tribune contre le réchauffement climatique intitulée "Le plus grand défi de l'histoire de l'humanité".

Né en 1933 dans la ville de Douala au Cameroun, cet originaire de Yabassi (région du Littoral) commence à s'intéresser à la Musique en intégrant l'univers du Gospel conduit par sa mère qui dirige les opérations. Bercé par la musique cubaine et française, il va arriver en France en 1949, fera ses études à Chartres, puis ensuite à Château-Thierry.

Dans son parcours au début des années 1950, il y découvre le jazz, joue de la mandoline et y apprend le piano. Manu Dibango découvre le saxophone emprunté à son ami Moyébé Ndédi et y rencontre l'écrivain et musicien camerounais Francis Bebey. Il va tour à tour collaborer avec Dick Rivers, Nino Ferrer, Serge Gainsbourg, Youssou N'dour, Lokua Kanza, Angélique Kidjo, Papa Wemba, Salif Keïta entre autres. Le père du "Soul Makossa" va ainsi trainer son saxophone dans le monde entier et se fera connaitre par sa persévérance et son goût accentué pour le Groove, la Soul Musique, le Blues et l'Afro-Jazz dont il était un des premiers ambassadeurs dans cet univers musical. L'artiste va produire plusieurs albums (Saxy Party, Afrovision, Ambassador, Wakafrika, African Soul..

.) sur le marché et se verra même être plagié par le 'King of Pop" Michael Jackson (extrait de son album "Soul Makossa") et Rihanna par la suite.

Une reconnaissance éternelle pour le saxophoniste camerounais

Manu recevra de nombreuses distinctions comme celle de Grand Témoin de la Francophonie aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Rio 2016, décernée par Michaëlle Jean, Secrétaire Générale de l'Organisation Internationale de la Francophonie. La France le fera chevalier de la Légion d'honneur et il recevra ensuite la médaille de vermille de la ville de Paris.

Il faut cependant noter que le Coronavirus fait de nombreux morts notamment en Europe qui est aujourd'hui l'épicentre de ce foyer de contamination.

On compte par exemple près de 524 morts en 24 heures en Espagne et 602 morts en Italie pour la date du 23 mars 2020. Cette pandémie fait également suite à de nombreuses campagnes de prévention. Sa famille a en outre, assuré que les obsèques et les hommages se feront après cette déferlante.

Ce décès soudain de l'artiste camerounais Manu Dibango, laisse un grand vide dans le monde de la culture africaine et même mondiale. Cette icône qui a fait les jours heureux de l'émission radiophonique "Couleurs Tropicales" (présentée par Claudy Siar), qui a été l'égérie durant plusieurs années de la radio Africa N°1 et qui a accompagné le générique du journal télévisé sur la CRTV depuis plus de 25 ans, laisse un héritage immortel pour son pays et le monde culturel.