C’est de bonne guerre (froide). Emmanuel Macron est (presque) de loin le candidat le plus pro-Européen et Russia Today, la voix du Kremlin avec Sputnik News, ne va certes pas le ménager autant que Jean-Luc Mélenchon… Mais les journalistes Frédéric Says et Marion L’Hour, auteurs de "Dans l’enfer de Bercy : enquête sur les secrets du ministère des Finances" (JC Lattès éd.) ne sont pas allés puiser leurs éléments du côté de Moscou. Ils ont été estimés assez crédibles pour que Philippe Vigier, pdt du groupe UDI à l’Assemblée nationale, monte au créneau (sans l’appui de Penelope Fillon, quoique…).

‘’120 000 euros des crédits du ministre à Bercy ont été utilisés pour des agapes d’En Marche !’’, a-t-il débuté, avant de s’étonner : ‘’Et Michel Sapin qui dit n’avoir rien vu’’. Michel Sapin, l’un des ministres les plus proches de François Hollande, aurait-il détourné le regard ? C’est ce que suggère Philippe Vigier. Le député a repris une déclaration d’Emmanuel Macron selon laquelle ‘’En Marche ! n’a aucune subvention publique. Chez moi, on ne vit pas du contribuable’’. C’est indéniable, il faut fonder un parti, et non un mouvement, et avoir des élus, pour bénéficier de subventions. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a été saisie

Aussi dispersé que Penelope

Selon les deux journalistes, Emmanuel Macron vivait l’enfer, cumulant comme Penelope Fillon vie familiale, professionnelle, sociale, publique… Quelle pèche !

En 2016, sa décision de lancer En Marche ! prise, Emmanuel Macron aurait mobilisé 80% de l’enveloppe ministérielle pour les frais de représentation. Les hauts fonctionnaires ont dû acheter des petits fours chez Lidl ou Aldi… Cela représente, de janvier 2016 à la démission du ministre, 120 000 euros. Des frais de représentations transformés, comme à l’Hôtel de Ville de Paris du temps de Jacques Chirac, essentiellement en frais de bouche.

Pour rincer et gaver d’amuse-gueules des écrivains, intellectuels, journalistes, universitaires, copains de promotion, peut-être lors de pince-fesses, assurément en dîners et soupers, ce ‘’parfois deux par soir’’ ou nuit. À l’appui de leurs dires, une soixantaine d’entretiens confidentiels et d'autres, portant sur l’imposition à la source, la privatisation élargie de la Française des Jeux, et de petits arrangements entre amis.

‘’Cela va faire hurler vos lecteurs !’’, aurait confié un ancien directeur du Trésor. Les deux journalistes, tous deux de Radio France (France Inter et France Culture), mettent-ils les faits en perspective, s’attachant à comparer ces pratiques avec d’autres, de titulaires de portefeuilles actuels ou antérieurs, de droite comme de gauche, dont l’essentiel de l’activité consiste à se faire mousser, dans leur future circonscription ou nationalement, voire internationalement ?

Macron et Bercy

Nul ne peut se prévaloir de ses propres turpides, dit l’adage (ni les excuser en mettant en relief celles des autres). Depuis Beyrouth, l’ancien ministre a répondu sobrement ‘’oui, j’ai été un ministre très actif’’.

Et sportif car il ne semble pas avoir l’estomac d’un Jacques Chirac. Challenges avait sorti de bonnes feuilles voici quelques jours. ‘’S’il [Macron] était resté, on ne sait comment il aurait fini l’année’’, aurait confié une source anonyme. Par ailleurs, on a appris que ‘’Bernââârdô’’ Cazeneuve (selon le sobriquet de Montebourg), Royal et Le Drian savaient jongler avec l’affection de divers fonds pour combler des trous ou financer des projets sans rapport (ni enrichissement personnel) avec l’objet initial. Il y a quelques détails ‘’insolites’’ : ce serait l’attentat de Nice qui aurait dissuadé Macron de démissionner le 14 juillet. Emmanuel Macron a refusé tout entretien avec les deux auteurs, il s’en mordra peut-être les doigts. Mais Françaises et Français en ont tellement entendu d’autres