C'est donc des "journalistes de gauche" chez Mediapart, qui ne lui sont que moyennement favorables qui ont recueilli les derniers propos d'Emmanuel Macron. La fachosphère en fera des argumentaires alambiqués. Il n'empêche : alors que l'abstention vaut vote pour la désinformation systématique, et la propagation de fausses nouvelles, autant tenter de voir si les propositions du candidat peuvent la faire reculer. Déjà, il s'engage, on ne sait trop comment, à "réduire d'un tiers le nombre des députés pour leur donner plus de moyens". Une proposition Fillon qu'il reprend à son compte.
Mais on ne voit guère pourquoi les députés (qui cumulent jusqu'à 15 000 euros mensuels, davantage s'ils siègent dans des commissions) auraient besoin de moyens accrus. Il y aura bien 557 députés lors de la nouvelle législature, et grâce au non cumul de certains mandats, près d'un quart d'entre eux seront des "nouveaux" (vieux chevaux de retour, bardés de postes territoriaux inclus). Emmanuel Macron s'en félicite et veut favoriser un gouvernement majoritairement issu "de la société civile". Et il ne s'agira sans doute pas de Jacques Attali ou de Laurence Parisot. Dont il est faux d'avancer que les médias "les invitent comme ils étaient dans le cœur du réacteur" d'En Marche.
Le Cese élargi
Macron plaide, sans dire comment, pour une transformation du Conseil économique, social et environnemental, institution parasite, fort coûteuse, doublonnant le Parlement européen, pour faire davantage de place aux ONG et aux associations.
Ce n'est pas tout à fait une mauvaise initiative. De même, introduire, plutôt réintroduire, une dose de proportionnelle, permettra sans doute à des individualités (je pense à un Jean Lassalle, parmi d'autres), de s'affranchir du diktat des cliques partisanes. Au risque bien sûr de voir des ligues, dissidentes du Front national, former des groupes parlementaires.
Pour convaincre le Congrès (ou les deux chambres), il envisagera un référendum afin de consulter sur la proportionnelle. Vu le coût d'une consultation, espérons que cela sera épargné aux contribuables. La précarité "dont se nourrit le Front national", se réduira par un pilotage et l'intervention de l'État : "je supprime les cotisations et je fais jouer la CSG".
Notamment en frappant 60% des retraités. À partir de quel seuil ? On ne sait. Il plaide pour une vraie formation qualifiante pour les chômeurs (alors qu'elle est le plus souvent "anecdotique" ou vache à lait de cabinets bidon). Bon courage : Medef et syndicats "ouvriers" tiennent à leurs instituts rémunérateurs. Ce qui est certain, c'est que ce très bon élève a creusé tous ces dossiers. Les "gauchiasses" de Mediapart, ultradocumentés, ayant longuement consulté des experts, ne l'ont pas ménagé : pas un faux pas. Le défi était beaucoup plus grand que celui d'une confrontation avec Marine Le Pen (ou même un Jean-Luc Mélenchon). Même sur l'écologie et le nucléaire, il a su répondre à un "Macron, il dit toujours oui aux lobbies".
Non, il s'y serait opposé "y compris au lobby bancaire" (en favorisant le crowfunding). Beaucoup plus bousculé que par une Marine Le Pen, il a pu s'expliquer posément. L'une des conditions du combat politique, c'est de connaître l'adversaire et de ne pas le dénaturer. À chacun de se former une opinion, non sur des rumeurs, des présupposés : avec Mediapart, Emmanuel Macron est entré profondément dans le concret. Son entretien est en accès libre. S'il faut trouver des arguments pour le combattre, décider ou non de s'abstenir, c'est là qu'il faut puiser. Et non, sauf erreur de ma part, il a parlé sans oreillette… Enfin, tout en comprenant (et non "partageant") les partisans de l'abstention, rappelons que voter pour une, un candidat, n'implique pas de voter pour sa formation lors des législatives.