Wauquiez, en compétition politique avec Marine Le Pen, déclare qu’il faut, par prévention, enfermer tous les fichiers S. Marine Le Pen est sur la même longueur d’onde et va plus loin en demandant l’expulsion de tous les étrangers classés fichiers S. Nous sommes là dans l’émoi et l’émotion politiques qui caractérisent la plupart de nos hommes politiques, surtout quand ils sont dans l’opposition. Il y a, en France, à peu près 12 000 personnes fichées S, plus ou moins radicalisées. La première question qui vient à l’esprit : où mettre ces 12 000 personnes ?

Quel personnel doit-on affecter à leur surveillance et sur quels motifs doit-on les emprisonner ? Les questions budgétaires et financières vont se poser mais le risque de l’accidentalité terroriste ne sera pas évacué. En effet, je parle d’accidentalité car tous les fichiers S ne passent pas forcément à l’acte, même si dans leurs propos on pourrait penser le contraire. La législation française a largement évolué, la France a réformé ses pratiques juridiques et administratives dans la lutte contre le terrorisme. Un parquet national antiterroriste est dans les tuyaux et fait l’objet d’une réflexion de la part des pouvoirs publics. Marine Le Pen et Wauquiez pensent qu’il faut arrêter l’immigration, comme s’il y avait un lien automatique entre immigration et radicalisation.

Le vrai problème est que, dans la lutte contre le terrorisme, on peut apporter des réponses techniques, mais cela reste insuffisant car le passage à l’acte participe plus d’une approche culturelle et symbolique de la part des terroristes. Phénomène non analysé par les grands spécialistes du terrorisme: le lien qu’il faut nécessairement établir entre délinquance et islamisme politique.

Peut-on encadrer l’islamisme politique en interdisant le salafisme ?

On peut surveiller les organisations salafistes, condamner et emprisonner les salafistes qui font appel à la haine, mais on ne peut pas interdire une idée comme l’a rappelé Manuel Valls et certains commentateurs de la vie politique française. Le véritable problème est que l’Islam sunnite n’a pas de responsable religieux à la manière de l’Eglise catholique ou du judaïsme.

Est-on prêt à fermer les mosquées ou les organisations salafistes affiliées à ces mosquées à identifier ? Sur le plan juridique, cela est difficile, même si on peut faire une réforme de l’Etat de droit pour encadrer de façon plus sévère les débordements haineux des prêches salafistes vis-à-vis de la France. Depuis l’affaire Merah, le Bataclan, l’assassinat du policier sur les Champs Elysées et aujourd’hui le meurtre terroriste du Lieutenant-Colonel Arnaud Beltrame, la France a réfléchi sur la façon de mettre en musique commune toutes ses forces de renseignement. Cazeneuve, Ministre de l’Intérieur et Premier Ministre de François Hollande, a fait des propositions concrètes de rapprochement du GIGN, du RAID et des forces de l’ordre sur le terrain.

Des comités locaux de sécurité ont été créés dans les départements. On attend de ces comités locaux qu’ils soient plus actifs sur le terrain et que le maillage territorial soit effectif pour empêcher la métastase terroriste sur le sol français.

Que dire des sorties politico-médiatiques de Wauquiez ?

Wauquiez, Président des LR, a besoin d’air et d’espace politiques pour exister face à Marine Le Pen mais surtout face au Président Macron qu’il accuse de laxisme et de faiblesse, comme si le terrorisme a émergé avec l’élection politique de Macron à la Présidence de la République. La droite française a été longtemps aux affaires avec une partie des autres mouvements politiques républicains, elle a été complice du laisser-faire dans les quartiers au nom d’une paix sociale obtenue par rétribution des caïds des quartiers et de certains représentants de mouvements associatifs ou religieux.

On sait ce qu’il s’est passé dans l’Essonne. Les affaires sont encore en justice concernant les accusations contre Monsieur Dassault et ses pratiques politiques. On ne peut rien de sa culpabilité, mais c’est en creux un des exemples que l’on peut multiplier à l’infini. Nous ne soupçonnons pas Monsieur Dassault, mais nous relatons les faits étalés par la presse. Monsieur Wauquiez devrait faire attention. Il est dans son droit en tant que politique de s’indigner, mais au nom de l’indignation, on ne peut pas dire que les autorités françaises ne font rien. Ce n’est pas vrai Monsieur Wauquiez, vous vous trompez. Musclez plutôt votre programme politique, économique et social. Comme vous pouvez le constater, la question sécuritaire n’a jamais permis à la droite de revenir aux affaires. Demandez à vos affidés, comme Ciotti qui ne sait pas toujours où il se situe politiquement au sein de LR, de ne pas dire n'importe quoi.