Impossible de s’y retrouver sur les Champs-Élysées. Dans une atmosphère rendue plus chaotique encore par la fumée des gaz lacrymogènes, les gilets jaunes ne permettent plus de faire la différence entre manifestants engagés et casseurs venus pour en découdre. Face aux forces de l’ordre déployées sur l’avenue, jets de pavés et barricades ont répondu aux canons à eau et aux bombes assourdissantes.

La présence de casseurs sème le chaos

Les casseurs présents sur place polarisent totalement l’attention, les violences parisiennes monopolisant l'arène médiatique.

La Préfecture de police a notamment confirmé la présence d’une centaine de membres de l’ultra-droite. Des témoins déclarent aussi avoir assisté à la préparation de Black Blocs. L’équipement de certains dénonce effectivement une préparation manifeste : entre cagoules, masques et lunettes de protection, ceux-là sont venus prêts au combat.

La presse ne s’y laisse pas prendre et nuance son message, établissant une claire distinction entre militants ultra-politisés et membres du mouvement populaire et apolitique d’origine. Pour autant, l’image qui ressort est celle d’un effrayant chaos. Les gilets jaunes eux-mêmes en sont les premières victimes, pris en tenaille dans cet environnement de violence : certains se révoltent de se faire “gazer”.

Un mouvement trop épars pour une ligne claire

Face aux caméras, les manifestants se disent “choqués et dégoûtés” de la tournure des événements, mais ne savent pas quelle stratégie adopter pour se différencier et porter malgré tout leur message. Ils n'ont en tout cas pas souhaité demeurer cantonnés au Champ-de-Mars, resté quasi désert tout au long de la journée.

Le mouvement souffre ici de son manque d’organisation, ni désireux ni capable de lancer des instructions globales. Comment se faire entendre et protéger les gilets jaunes eux-mêmes ? Les groupes ne peuvent que s’organiser de leur mieux, se conseillant entre eux, communiquant sur les réseaux sociaux et interpellant les journalistes présents sur place pour affirmer leur différence.

Une mobilisation bien présente en région

Si les manifestants ne sont plus que 81 000 dans toute la France, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, la mobilisation reste bien vivante malgré ses difficultés. Dans les villes et en province, les gilets jaunes n’ayant eu ni les moyens ni le désir de gagner la capitale mènent une variété d’actions : rassemblements, opérations “péage gratuit”, barrages filtrants.

Au niveau du péage de Saint-Arnoult (Yvelines), en plus de la gratuité du passage, un barbecue est organisé : rappel à l’ambiance “bon enfant” notée dans les débuts, bien loin du chaos parisien.

Sur tous ces théâtres, les gilets jaunes s’efforcent de crier leur colère et une détresse aux multiples visages : retraités, travailleurs pauvres, mères célibataires, agriculteurs, chômeurs. Leurs voix sont certes entendues, relayées par chaînes et journaux. Mais cette révolte habituellement silencieuse reste largement masquée par l’ombre de la violence et la brume lacrymogène. Une semaine plus tard, le mouvement continue, mais dans le chaos et l’incertitude. Au gouvernement de tenter mardi une réponse.