Ni Chirac, ni Sarkozy, ni Hollande n’ont eu le type de manifestation qu’a vécu, le samedi 17 novembre 2018 le Président Macron rue Faubourg Saint Honoré, près de l’Elysée. Macron a réussi un tour de force au cours de son élection présidentielle victorieuse : affaiblir les partis politiques et les syndicats et faire de l’exécutif le seul comptable face au peuple. En province la cristallisation des gilets jaunes s’est faite autour de la voiture, à Paris c’est autour des institutions, dont le palais présidentiel de l’Elysée. Une partie des gilets jaunes a voulu descendre sur l’Elysée et l’Assemblée nationale, ce qu’aucun parti politique traditionnel n’a jamais fait et exigé.

La contestation des gilets jaunes est donc originale et nouvelle ( "Radicalisation des Gilets jaunes, convergence des luttes, ou effet d’aubaine ? Observateurs et analystes peinaient à y voir clair ce mardi soir sur l’évolution de ce mouvement hétérogène et non coordonné dont chacun s’accorde sur le caractère inédit..", cite le Parisien). Originale car le mouvement des gilets n’est encadré par aucun parti politique, nouvelle car ce mouvement citoyen répond directement au président de la République qui a toujours dit que sa légitimité venait du peuple. Malgré la discrétion des partis politiques traditionnels vis-à-vis du président de la République et de l’exécutif, le gouvernement est en peine pour décrire ce qui fonde la contestation réelle des gilets jaunes (« Il y a des souffrances légitimes qu’il faut entendre, mais il y a aussi eu des comportements inacceptables.

Il faut être intraitable sur l’ordre public. Nous ne pouvons accepter les deux personnes décédées, les blessés chez les manifestants et chez les forces de l’ordre, ni les propos racistes, antisémites ou homophobes. » déclare Emmanuel Macron, cite Le Monde ). Que va faire le président de la République et son gouvernement au cours de ces prochains jours ?

Le président Macron répond aux gilets jaunes : respect de l’ordre et possibilité de dialogue

Dans la 5ème République, les mouvements sociaux ont toujours été encadrés par les leaders identifiés. C’est vrai en 68 avec le mouvement étudiant et c’est encore vrai des mouvements sociaux revendicatifs encadrés par les syndicats professionnels et les partis politiques traditionnels.

Le mouvement des gilets jaunes est inédit. Il agglomère des revendications tous azimuts (pouvoir d’achat, fiscalité, etc.). Depuis un an les syndicats et partis traditionnels n’ont jamais réussi à rassembler les Français autour des thèmes portés par les gilets jaunes. De façon paradoxale et confuse, les gilets jaunes mettent sur la table les thèmes qui traversent la société française, comme la diminution des impôts des 3 000 familles les plus riches, la hausse de l’imposition concernant la CSG des retraités. Le 17 novembre a été une date significative pour la France et pour le gouvernement car une partie du peuple, non encartée politiquement et non structurée par les corps intermédiaires, descend dans la rue et interpelle le gouvernement sur sa politique économique et sociale.

La France est formée par un peuple que l’on pense indolent mais qui est nourrit par l’égalité et la passion de la démocratie à la Tocqueville. Ainsi va la France éternelle, capable de taire ses avantages individuels et utiliser les désavantages des autres pour manifester, espérant faire coup double : augmenter ses propres avantages individuels grâce aux décisions politiques réalisées par le gouvernement à la suite des revendications sociales.

Les gilets jaunes souhaitent manifester à Paris le samedi 24 novembre

Ce mouvement social d’un type nouveau, se bâtit sur la disparition des corps intermédiaires qui auraient pu capitaliser les révoltes sociales et discuter avec l’exécutif. Le président de la République reçoit en boomerang cette fin de l’histoire politique et sociale française caractérisée par les corps intermédiaires négociateurs et malheureusement affaiblis et finissants.

Le peuple ne voit qu’une chose : la connivence avec les plus nantis que le président Macron a favorisés. Le président Macron doit changer de méthode de gouvernance politique et redevenir humble politiquement. Les gilets, c’est d’abord une victoire éclatante des réseaux sociaux et de la démocratie sociale, celle du peuple, face à la démocratie représentative (députés et sénateurs). Le président Macron, grand utilisateur de la digitalisation, devra en tenir compte et les peuples ont la mémoire au moment des élections européennes et municipales futures. Les gilets jaunes symbolisent la victoire des peuples de France, celle des territoires et d’une partie des métropoles urbaines.