Lorsqu'elle a décidé de se lancer en avril 2015 dans une campagne présidentielle pour devenir présidente des Etats-Unis, Hillary Clinton avait un seul objectif : corriger la perception qu’elle était déconnectée de l’Américain moyen. Au moment de lancer sa campagne, la politicienne a diffusé une photo d’elle dans une station-service en Pennsylvanie. Le lendemain, les médias ont ensuite publié une photo d’elle sur le point de passer une commande dans un restaurant Chipotle (une chaîne spécialisée dans la restauration mexicaine), en Ohio. L’image véhiculée tranchait avec celle projetée quatre ans plus tôt, lors de sa précédente campagne.
Hillary Clinton utilisait alors non seulement un jet privé pour se rendre en Iowa, mais elle avait aussi parcouru l’État en hélicoptère, ce qui n’avait pas manqué d’étonner le public… et de détonner. L’engin de l’équipe d’Hillary Clinton avait même eu droit à son propre surnom à l’époque : Hilocopter.
Hillary Clinton : une stratégie évidente
Sa stratégie n’était pas un secret. Hillary Clinton l’a explicitée dans une lettre publiée dans les pages éditoriales du Des Moines Register, le quotidien le plus réputé de l’État de l'Iowa : « Lors de mon séjour en Iowa, je voulais faire quelque chose d’un peu différent. Pas de grands discours ni de rassemblements. Tout simplement parler directement avec des gens ordinaires de l’Iowa.
Parce que cette campagne ne sera pas à mon sujet, mais bien au sujet des habitants de l’Iowa et des gens à travers le pays qui sont prêts pour un avenir meilleur. »
L'affaire des emails
Mais, en votant pour Donald Trump, les Américains ont décidé que Hillary Clinton n'était pas un citoyen ordinaire. On a souvent eu l’impression, au fil des ans, que le couple Clinton s’estimait dans une classe à part.
Qu’Hillary Clinton et Bill pensaient parfois qu’ils pouvaient échapper aux règles s’appliquant au commun des mortels. Cette désagréable impression a refait surface au début de l’année 2015, quelques semaines avant le lancement officiel de la campagne de la candidate démocrate. Le lundi 2 mars, le New York Times a publié une nouvelle renfermant les germes d’un scandale qui, mois après mois, aura le même effet sur Hillary Clinton qu’une blessure mal soignée chez un sportif.
Plus le temps passera, plus ce sera douloureux. Qu’a fait Hillary Clinton ? Elle a utilisé uniquement une adresse privée plutôt que celle fournie par le gouvernement américain pendant toute la durée de son mandat comme secrétaire d’État, ce qui est très inhabituel pour un membre du cabinet du président. Elle souhaitait éviter d’avoir un compte pour ses messages personnels et un autre pour les courriels professionnels. Selon le quotidien new-yorkais, à l’époque où elle est devenue diplomate en chef, le département d’État exigeait simplement que ses employés communiquent à l’aide d’un ordinateur dont l’usage avait été « autorisé » par le gouvernement. La politique a été modifiée quelques mois plus tard, lorsqu'on a spécifié que les utilisateurs d’une adresse de messagerie privée devaient veiller à ce que les messages en lien avec le travail soient archivés par le département d’État.
62320 emails
Hillary Clinton n’a pas, initialement, demandé à ce qu’on archive quoi que ce soit au sein du gouvernement américain. Toutes ses correspondances étaient conservées dans un serveur privé, situé dans sa maison dans l’État de New York jusqu’en 2013. Prendre une telle décision quand on est la diplomate en chef des États-Unis et qu’on sait très bien qu’on a de bonnes chances de vouloir briguer la présidence américaine, c’est un peu l’équivalent de conduire à 150 km/h sans ceinture de sécurité. Au début de l’année 2015, avant que cette affaire soit mise au jour, le département d’État a dû réclamer les courriels d’Hillary liés à son travail. L’affaire s’est alors compliquée encore un peu plus.
C’est que le nombre de courriels expédiés et reçus par la secrétaire d’État s’est chiffré à 62 320. Ce sont ses employés qui ont fait le tri pour transmettre au département d’État 30 490 courriels jugés pertinents.
Le coup de grâce
Donnée victorieuse par les sondages quelques semaines avant le suffrage présidentiel final, Hillary Clinton a été devancée sur le fil. Il faut dire que, à seulement onze jours du scrutin, James Comey, le directeur du FBI, a annoncé que ses équipes allaient reprendre leur enquête après avoir pris connaissance de milliers de nouveaux courriels de la candidate sur un PC partagée par une de ses collaboratrices avec son mari. On connaît la suite. Hillary Clinton remporte le vote populaire, mais perd celui du collège électoral. Donald Trump est élu président des Etats-Unis.