Les funérailles de trois des six musulmans tués dimanche dernier à la Grande Mosquée de Québec ont rassemblé des milliers de personnes de toutes confessions, croyances et courants de pensée, et de très nombreuses personnalités québécoises et canadiennes. La cérémonie s'est déroulée à Montréal car les corps des défunts (deux Algériens, un Tunisien) avaient été transférés à l'institut médico-légal de la capitale provinciale et que les cercueils seront rapidement convoyés vers les pays d'origines des victimes. Pour le maire de Montréal, Denis Coderre, présent à Québec, la cérémonie témoigne "que nous pouvons être égaux et différents à la fois''.

Quelques heures auparavant, la mosquée Khadijah, située non loin du centre islamique Shah Jalal, à Montréal, dans le quartier de la Pointe-Saint-Charles, avait été l'objet de dégradations hostiles. Une vitre a été brisée par une brique, des œufs lancés sur la façade du bâtiment. Selon les témoignages, ce n'est pas le premier acte de vandalisme subi par cette mosquée. Elle avait été aussi en partie barbouillée de graffitis. Une enquête pour "crime haineux'' a été ouverte par la police provinciale. L'administrateur de la mosquée Khadijah a découvert les dégâts en revenant de la cérémonie. Pour lui, il s'agit d'un "effet domino" lié tant à la tuerie commise par Alexandre Bissonnette à Québec qu'aux déclarations de Donald Trump sur les musulmans, rapporte Le Journal de Montréal.

Cette mosquée, comme d'autres, faisait l'objet d'une surveillance, mais les faits se sont produits tôt dans la matinée.

Islamophobie croissante

Fazale Elahi Ahmed a déclaré à Métro qu'après l'attentat de Québec, ses voisins étaient venus le rassurer, disant "que je n'avais rien à craindre parce que nous vivons dans un quartier très multiculturel et ouvert.

Voir des incidents du genre dans un coin tranquille comme le nôtre est plus que surprenant". Des propos similaires étaient encore tenus à Québec avant l'attentat qui a toutefois été précédé de chroniques radiophoniques, de billets dans la presse faisant monter un climat d'hostilité. Les musulmans redoutent à présent une multiplication d'actes et propos hostiles.

Lors de la cérémonie, des personnes ont crié "arrêtez les radios-poubelles", mais l'entourage les a calmement incitées à se taire et respecter l'ambiance de recueillement. Les funérailles des trois autres victimes, Mamadou Tanou Barry, Ibramhima Barry et Azzeddine Soufiane seront célébrées ce jour, au Centre des congrès de Québec. La tuerie a fait 17 orphelins. Les victimes auraient pu être plus nombreuses. Alexandre Bissonnette a d'abord employé un fusil d'assaut mais qui s'est enrayé. Il a alors saisi un pistolet pour tirer encore avant de s'enfuir (pour se rendre par la suite en appelant la police). Le meurtrier avait prémédité son acte car il est apparu qu'il s'était rendu à la mosquée trois jours auparavant, liant une rapide conversation avec Lhoussine El Manoug en feignant de s'intéresser à la religion musulmane. Il s'était déclaré catholique.