D'ordinaire, la plupart des déréférencements décidés ou acceptés par Google visent des sites prônant le terrorisme (en majorité islamiste radical) ou la pédophilie. Mais à la suite de la condamnation de son fondateur, Boris Le Lay, qui réside au Japon mais publie uniquement en français, le site breizatao (dont l'extension n'est quand même pas .fr), "Quotidien de l'État national breton", ne peut plus être recherché facilement via Google. Mais on le retrouvera facilement en utilisant le navigateur Chrome… ou d'autres.
"Nationaliste" plus que breton
Les contenus du site sont – à rares exceptions culturelles près ou d'informations locales – pompés sur ceux de la fachosphère. Soit qu'aucun incident, délit ou crime imputable à un étranger non-caucasien, n'échappe à sa vigilance mondiale. Le traitement de la politique étrangère suit celui des sites financés par Moscou, à l'exception des nouvelles provenant de Turquie, en dépit du rapprochement entre Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan. Bref, un site classique de "réinformation". Cela vasouille parfois et on trouvera un titre du style "Pétromonarchie du Koweït : une musulmane refuse d'aider sa ménagère africaine et la laisse tomber dans le vide" (en se gardant bien de préciser que la "femme de ménage subsaharienne", fut peut-être tout aussi musulmane que sa patronne).
Parfois, cela va plus loin. Boris Le Lay publiait ainsi froidement "qu'il n'y avait pas de Celtes noirs". Ce au mépris des analyses ADN de très nombreux Écossais "pur jus" (dont les ancêtres ne participaient pas tous ou toutes à la traite esclavagiste). Cela remonte au 18e siècle pour les ancêtres africains, mais les ascendances berbères et autres fort peu nordiques sont beaucoup plus lointaines en Écosse.
Glissons, Boris Le Lay a été de multiples fois condamné pour incitation à la haine raciale, &c. Non par la justice mais "par le gouvernement socialiste" (c'est presque du François "Farid" Fillon dans le texte), "via l'appui habituel de la magistrature". La décision de déréférencement découle, selon Google, "d'une demande liée au droit européen en matière de protection des données", mais peu importe à breizatao.
Le site étant hébergé à Houston (Texas), géré par un Irlando-étasunien, seules les requêtes provenant d'un pays européen bloquent uniquement la remontée de certains liens du site. Pas de quoi hurler à l'immonde censure quand on peut trouver facilement ce morceau d'anthologie : Alan Stivell ayant joué avec le musicien africain Youssou N'Dour, le site dénonce "l'immonde bâtardisation" de la musique traditionnelle bretonne. D'ailleurs, désormais, des "groupes russes comme Fram sont désormais de bien meilleurs interprètes que n'importe quel groupe breton". Breiz Atao (Bretagne toujours) est un slogan qui fut largement utilisé par les nationalistes ou autonomistes collaborationnistes et les résistants bretons en venaient à dire Breiz Atao mad da lao (soit "bon à tuer").
L'affaire est tellement "inique" qu'on retrouve même la page où Boris Le Lay commente son jugement perdu contre Yannick Martin, sonneur de bombarde : "Yannick Martin, Africain, Noir, ne sera jamais un Celte ou un Breton. Car jamais il n'y a eu de Celtes noirs et nous n'en verrons jamais" (page accédée ce 3 avril à 24 h). Avec cet autre commentaire : "cette justice rouge confite de sionisme" n'impressionne pas Le Lay ou les "nationalistes bretons". Entendez les seuls, les vrais, les authentiques qui ne tolèrent pas que des sonneurs d'origines africaines jouent les airs des petits hommes bruns mâtinés de Vikings et autres grands blonds ou roux. Fussent-ils, ces Noirs, aussi catholiques que le si bienheureux abbé Perrot "figure de la foi et du patriotisme breton" qui justifiait l'expulsion des Juifs de Bretagne par Jean Le Roux (1240) et ne condamnait du nazisme que son athéisme.
Sanctifié par breizatao car exécuté sur ordre de Londres fin 1943. Breizatao prône davantage l'internationalisme chrétien "musclé" et la préservation de la "pureté" racialiste que la défense de la culture bretonne, qui a bon dos.