"Qu'en termes élégants ces choses-là sont dites…". C'est de Molière, non point dans Tartuffe, mais dans Le Misanthrope. Or donc, Le Figaro (avec l'AFP), nous informe que le nonce apostolique Luigi Ventura aurait suggéré à l'évêque des Landes (Aire et Dax), Mgr Gaschignard, de démissionner. Il obtempère et le Très Saint Père ne demande pas le retrait de sa démission. Que fait Le Figaro ? Sa rédaction fait état de communiqués séparés de l'évêché et du cardinal-archevêque de Bordeaux, Mgr Jean-Pierre Ricard, qui feraient pudiquement état de problèmes "dans [la] relation pastorale aux jeunes".
Propos similaires de la part de la Conférence des évêques de France…
Pas de plainte
Paul Perromat, peut-être un diacre, mais en tout cas directeur de la communication de l'association diocésaine d'Aire-&-Dax, a, mieux que Marie Cardinal (auteure de Les Mots pour le dire), le sens des formules. Il précise donc que "à l'heure actuelle, aucune plainte n'a été déposée, ni auprès du procureur de Dax, ni auprès de celui de Mont-de-Marsan". Exact. Mais le cardinal Ricard relève de son côté qu'il avait reçu deux personnes, le 21 mars dernier, animateurs ou animatrices de patronages, qui se seraient ouvertes à lui de propos et attitudes inappropriés de la part de l'évêque démis(sionnaire). Du coup, il en touche un mot à Mgr Gaschignard qui, "déjà alerté, en avait informé le Nonce apostolique et pris contact avec le procureur de la République".
Fin et non suite de la part du Figaro, fermez le ban, l'évêque avait pris les devants… Bernard Charrier, ex-évêque émérite de Tulle, peut-être sorti d'un ermitage, assurera les tâches d'administrateur apostolique (intérimaire) du diocèse d'Aire-&-Dax. Point à la ligne… Pas de plainte, aucune agression sexuelle, la page est tournée.
Mais si on consulte La Dépêche du Midi, on lira : "voici cinq ans, Mgr Hervé Gaschignard avait été vicaire général de Toulouse. Lorsqu'il a quitté Toulouse, c'était après le classement sans suite de plaintes déposées par quatre familles toulousainnes. Monseigneur Le Gall avait transféré ces plaintes au parquet". C'était à l'issue d'un pèlerinage effectué à vélo avec des adolescents que les familles s'étaient émues.
Pas d'agressions sexuelles, mais, en quelque sorte des attouchements et des contacts physiques appuyés. En décembre 2011, un non-lieu était prononcé et dès le 24 janvier suivant, l'évêque auxiliaire était promu à Dax par Benoît XVI. Pas de quoi hurler au scandale. Mais on comparera utilement les versions du Figaro et de La Croix. Le quotidien catholique relève, lui, qu'en fonctions de supérieur-adjoint du séminaire interdiocésal de Nantes et de "conseiller spirituel des Scouts d'Europe" (un mouvement de jeunesse quelque peu plus catholique traditionnel que les Scouts de France), l'ex-mis en examen et disculpé à Toulouse avait fait l'objet d'un signalement au diocèse breton (qui couvre Guérande, le Pays-de-Retz et Châteaubriand).
Comme le déclarait François Fillon, "la prévention de la récidive doit être une priorité absolue" (c'était en 2011) et dans son programme, il prône des peines plancher automatiques pour les récidivistes, car "l'impunité zéro doit être la règle". Le cas de Mgr Gaschignard devrait attirer son attention : suspect de longue date, mais en aucun cas coupable, quelle peine devrait être infligée à ce prélat s'il venait jamais à devenir (injustement) condamné ? Et puis, on peut se demander s'il n'existe pas un "cabinet blanc" au Vatican, de blanchiment. Rappelons que 28 des 32 religieux des 17 diocèses français suspectés de pédophilie depuis le début du siècle ont été "exfiltrés" en d'autres diocèses, voire à l'étranger.
Fin mars dernier, on apprenait que deux prêtres des Charentes avaient été suspendus depuis mai 2016. Là, rassurons-nous. Comme l'exprimait Mgr Dubost, évêque d'Évry, il ne s'agit sans doute que "d'actes malencontreux". C'est... bienheureux.