Le calife de Daesh a promis de faire de Mossoul son Stalingrad. Ce sera faux. D’une part parce les gouvernements irakien et turc ont tenu une réunion sur le reflux des djihadistes ayant pu fuir les combats vers la frontière nord. Des centaines de djihadistes seraient déjà, selon les autorités irakiennes, passés en Turquie. D’autre part, sur la rive est du Tigre qui coupe Mossoul en deux, il ne reste que quelques poches de résistance au sud (voir la carte ci-dessus). Et les djihadistes ne pouvant les rejoindre ont tenté de passer sur l’autre rive, à l’ouest, en bateaux réquisitionnés.

Mal leur en a pris car l’aviation coalisée en a déjà coulé une centaine ou plutôt les a fait exploser, le courant dispersant cadavres et débris. Cela pose d’ailleurs des problèmes tant à l’est de la ville, repris, qu’à l’ouest encore tenu par les djihadistes. L’eau est presque partout contaminée, les cadavres des djihadistes ayant été trop longtemps laissés à pourrir…

Contre-propagande

Daesh ne fait pas état de ses pertes, et diffuse des photos d’enfants jouant dans des parcs, de flagellations de coupables de vendre ou de fumer des cigarettes, d’exécutions capitales publiques dans Mossoul. Il n’empêche, pratiquement tout l’est de la ville est repris, et hormis les bateaux, chargés de fuyards (leurs rares occupants rescapés seront-ils exécutés pour lâcheté ?), l’aviation de la coalition en vient à manquer de cibles significatives.

Tout est enterré en des tunnels ou abris, les combattants se dispersent dans les quartiers d’habitations, délaissant les immeubles publics… Tous les accès aux ponts sont désormais contrôlés depuis la rive orientale et outre les quelque 90 embarcations récemment détruites, d’autres l’ont été précédemment (plus de 112 au total).

Pour le moment, les forces irakiennes au sol vont s’accorder une pause, et faire la chasse aux djihadistes ayant abandonné leurs armes et raccourci leurs barbes pour tenter de se fondre dans la population. La bataille de Mossoul est donc loin d’être terminée, mais les djihadistes encore à l’ouest ne pourront plus fuir en unités combattantes vers la Syrie.

Les milices chiites encerclent al-Tafar. Comme à Palmyre, reprise par Daesh, les djihadistes continuent leurs destructions de monuments. Le sanctuaire de Jonas à Mossoul a été totalement détruit… Néanmoins, Daesh se livre à des contre-offensives, mais en Syrie, et notamment au sud, à proximité de la frontière libanaise, majoritairement aux mains du Hezbollah chiite à présent. Il est aussi tenté de reprendre le centre de Deir-er-Zor. Le califat veut consolider son emprise sur Raqqa assiégée et Palmyre, et de reprendre un plus large contrôle de Deir-er-Zor. La situation pourrait changer si, comme le laisse entendre Donald Trump, les forces aériennes étasuniennes, syriennes, russes et turques collaboraient sur le front syrien.

Cela confortera bien sûr le régime de Bachar al-Assad qui ne se livrera pas qu’à des représailles contre Daesh, mais aussi à l’encontre des rebelles sunnites ou laïques (enfin, plus laïques que d’autres). Ce qui augmentera l'exode des réfugiés. Mais tout danger n’est pas écarté en Irak. La plus forte menace tient à l’état catastrophique de l’immense barrage à 60 km au nord de Mossoul. S’il cède, le flot initial sera haut d’environ 15 à 19 m, et les eaux atteindront jusqu’à Badgad, emportant et tuant près d’un million et demi de personnes. La Banque mondiale a financé les travaux d’une équipe italienne à hauteur de déjà 300 millions d’USD. Mais un expert suédois considère que les renforcements ne peuvent que retarder un désastre devenu inéluctable.

Le barrage a été construit sur du gypse, du calcaire, des sols sablonneux et instables. Un apocalyptique scénario catastrophe serait que des djihadistes, sachant Mossoul indéfendable à terme, se lancent dans une massive et ultime opération-suicide et que ceux survivant aux frappes aériennes puissent gagner leur paradis en entraînant plus d’un million d’Irakiens et autres dans la mort.