Lors de sa tournée Africaine, le président Barack OBAMA, alors président des États-Unis est arrivé au Ghana, où il a fait un discours mémorable qui restera gravé dans le marbre de l'histoire de l'humanité. A cette occasion, il a déclaré que ce dont l'Afrique avait besoin, c'étaient des institutions fortes, et non des hommes forts. Depuis cette affirmation, les années sont passées. Les commentaires de cette déclaration hautement prophétique ont été nombreux. Aujourd'hui, demeure encore dans les esprits le souvenir de la force d'un propos dont la pertinence est toujours d'actualité.

Dans cet article, nous avons décidé de revenir sur une phrase lancée par un homme Politique, et qui a fait l'effet d'une bombe chez celles et ceux qui l'ont reçue. En effet, avant la mise au point au président OBAMA, les Africains n'avaient pas forcément fait la différence entre les notions d'«hommes forts» et d'«institutions fortes». C'est ce qui a donné au discours du président Obama, un caractère didactique. Il a en effet permis aux africains de découvrir le sens péjoratif d'une désignation, celle « d'hommes forts ».

«Les hommes forts», une qualification dédaigneuse et ironique

On ne sait pas exactement l'origine de cette métaphore, « Homme fort ». Mais tout ce que l'on peut affirmer, c'est qu'elle est souvent utilisée pour parler des dirigeants politiques africains.

En général, c'est la presse étrangère qui emploie cette expression.

Cependant, précisons que la presse étrangère, ce n'est pas forcément la presse en dehors du continent africain. Il peut s'agir de la presse occidentale, comme il peut s'agir de la presse d'un pays africain publiant un article sur un chef d’État d'un autre pays africain.

Ainsi par exemple, on a entendu parler de l'Homme fort du régime de Kinshasa au temps du président Mobutu ; de l'homme fort d'Abidjan au temps du président Houphouët, de l'homme fort de Conakry au temps du président Sékou Touré...etc.

De surcroît, en Afrique, malgré l'emploi de cette expression à de nombreuses reprises pour désigner des dirigeants africains, sa signification a été difficile à appréhender pour plusieurs raisons : d'abord, on ne sait pas pourquoi, ni comment, un dirigeant politique devient « l'homme fort » de son pays.

Ensuite, on ne sait pas qui peut être qualifié «d'homme fort» et qui ne peut pas l'être. Personne ne savait si l'appellation était élogieuse ou si au contraire, elle était insultante. Tout au plus, les citoyens prenaient cette appellation au premier degré, considérant ainsi que si leur Chef de l’État était qualifié de la sorte, cela était l'expression d'une reconnaissance de ses qualités spécifiques. La confusion autour de cette expression a donc régné longtemps en Afrique, où on a fini par l'entendre comme un compliment formulé à l'égard des dirigeants qui en avaient la qualité.

Il aura fallu ce discours magistral du Président OBAMA pour éclairer les esprits. En effet, l'ancien président américain a mis en relief la dichotomie incontestable entre « homme fort » et « institutions fortes ».

Depuis, les Africains ont commencé à comprendre qu'en lieu et place de compliment, l'expression avait plutôt une mauvaise connotation, et qu'elle était même un reproche. Mieux, les Africains sont désormais de plus en plus nombreux à préférer des institutions fortes. Et avec raison.

On peut réformer des institutions devenues caduques ; on ne peut pas contrarier un homme fort

Les raisons qui poussent les Africains à préférer des institutions fortes a sont nombreuses.

Là où les institutions fortes garantissent le succès de la démocratie, les hommes forts en constituent des obstacles. Là où les institutions fortes fournissent les moyens d'une sécurité juridique et démocratique, les hommes à poigne caractérisent l'insécurité à tous points de vue.

Les institutions fortes sont amovibles. En cas de caducité, on peut les réformer. S'agissant des hommes forts, nul ne peut oser les contredire sous peine de représailles et de mesures de rétorsion. D'ailleurs, on ne change pas d'homme autoritaire, c'est un péché de lèse majesté. Certains dirigeants règnent à vie, ils sont immortels. D'autant plus qu'à à leur mort... ils se font remplacer par leurs enfants dans les fonctions pourtant publiques. Ajoutons que les institutions fortes promeuvent l'aristocratie de fonctions. Les hommes autoritaires, eux, entretiennent l'aristocratie de statuts. En tout cas, les antagonismes entre les notions « d'homme fort » et « d'institutions fortes » sont nombreux.

L'immensité des dommages causés à la démocratie par « les hommes forts » n'est plus à démontrer. Les Africains l'ont majoritairement découvert et compris. Il reste maintenant à mettre en œuvre ce message. C'est une autre paire de manches.