Après deux stages de vacances à l'Agence France-Presse obtenus par piston, François Fillon (63) est entré en politique à l'âge de 22 ans, en 1976. Y compris pendant ses courtes classes sous l'uniforme de l'Armée de l'air, au Bourget, suivies d'un poste de conseiller ministériel, il est resté près de bientôt 42 ans rétribué par les contribuables. Qui ont largement abondé ses droits à retraite, tout comme ceux de Penelope Fillon. Tout au long du Penelopegate, il a multiplié les promesses rétractées, les revirements, les dénégations. En sera-t-il de même à présent ?

Dès mars 2015, il annonçait "je n'ai pas l'intention de rester dans la vie politique si je ne réussissais pas à me faire élire en 2017". Il récidivait en janvier 2016, annonçant que s'il ne pourrait porter lui-même son programme, il n'aurait rien d'autre à apporter à la vie politique française : "donc je quitte la politique". Si c'était le cas, il ne pourrait guère faire pleurer dans les chaumières, à moins que la prochaine assemblée nationale ne taille dans les privilèges accordés à vie aux anciens Premiers ministres (dont une limousine de fonction et un chauffeur pour le couple Fillon). Mais sait-on jamais ? Son départ de la scène politique est-il vraiment définitif, on peut en douter.

Sénat ou Assemblée ?

François Fillon a promis son "imperdable" circonscription parisienne à Nathalie Kosciusko-Morizet qui aurait tout à craindre de se replier sur son fief de Longjumeau. Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon ont fait de très bons scores dans cette ville et l'Essonne n'a voté Fillon (troisième devant Marine Le Pen) qu'à 18 %.

Même si elle fait figure de "'socialo-compatible" pour Sens commun, le risque que cette circonscription parisienne élise une ou un député En Marche ! est plus que dérisoire. Même NKM est assurée de l'emporter. Pourquoi s'en priver ? Son investiture a été confirmée. Si Fillon avait tenté de l'évincer, même les sarkozystes, qui ne la portent pas dans leur cœur, lui auraient fait barrage.

Reste la solution sarthoise. La Sarthe lui a accordé une majorité absolue et il en fut sénateur de septembre 2005 à son accession à Matignon en mai 2007. Ce qui lui avait donné largement le temps de puiser dans les caisses tandis que son épouse émargeait auprès de Marc Joulaud, battant tous les records de rémunérations pour le poste à l'Assemblée nationale. Le Penelopegate comprend divers volets, dont celui des chèques du Sénat dont le montant total, selon Mediapart, n'a "sans doute pas dépassé les 25 000 euros". Les rémunérations d'un simple sénateur sont égales à celles d'un député (7 100 euros bruts), mais un Fillon trouverait sans doute à siéger dans une commission, voire à en assurer la vice- présidence, et là, avec l'indemnité pour frais, et le reste, soit 8 000 euros, le montant à disposition, prime de commission incluse, peut s'élever à près de 20 000 euros (bruts).

Et puis, le restaurant (à 17 euros le menu complet), les caves à vin (garnies d'achats mais aussi de dons de viticulteurs), les coiffeurs, le médecin, la caisse de retraite largement excédentaire, les salons de réception du Luxembourg… La Sarthe compte trois sénateurs, élus jusqu'en 2020, dont un socialiste, le maire du Mans, Jean-Claude Boulard, soutien d'Emmanuel Macron. Il faudrait donc trouver d'autres sinécures à l'un des deux autres sénateurs LR (Louis-Jean de Nicolay et Jean-Pierre Vogel) pour recaser François Fillon. Tous deux sont bien portants. Bref, si François Fillon rendait l'argent comme il l'avait promis s'il était élu président de la République, on pourrait peut-être croire à la sincérité de son retrait.

Mais s'il doit régler des amendes ? Si on ne l'imagine pas cantiner en détention, on peut présumer que celui qui n'arrive pas à économiser (selon ses dires, démentis par les montants placés sur les deux PEA, comptes titres, assurances-vie, PEL, CEL et les trois comptes courants, le LDD et le livret A) ne se contentera pas des revenus du cabinet 2 F Conseil, pourtant confortables et qui devraient le rester (le carnet d'adresses de l'ex-candidat s'est enrichi). En 2013, le couple déclarait au fisc un revenu de 95 000 euros. Moins de 8 000 euros mensuels. Une misère. Question argent à rendre, la grande question c'est celui nécessaire à la campagne des législatives. Les LR peuvent-ils compter sur les fonds recueillis par le micro-parti du défait, Force républicaine ?

LR a 60 millions de dettes. Vite, un Fillonthon ? Et quid des neuf et demi millions d'euros de la primaire dont six ont déjà abondé le compte de campagne du seul candidat ? Que croyez-vous dont il a été surtout question lors du bureau politique de ce jour ? D'une place pour Fillon sur la liste de 2019 aux élections européennes ? D'un siège de sénateur ? Pour combien ? François Fillon, à l'issue du bureau politique de LR, se place en "réserve" (de la République, vraiment ?). Bah, il se refera une virginité.