Cette douzaine d’huîtres (ou de jours) post-élections c’est comme un coup de tronçonneuse dans un immeuble d’Alep ou une bombe à hydrogène dans le python de la fournaise. Le paysage politique est complètement tourneboulé.
Tenons-nous en aux chiffres tout d’abord. Et rappelons-nous bien que le dimanche 7 mai 2017, un tiers du peuple français a choisi de se tourner vers le Front National. C’est indubitablement les stigmates d’un mécontentement sévère et aujourd’hui solidement ancré dans l’esprit de nos concitoyens. Voter pour une parlementaire qui choisit de mépriser sa convocation devant les juges et qui durant 2 heures télévisuelles a vomi des propos d’une vacuité abyssale sur des sujets économiques et politiques relativement basiques, ne peut qu’être interprété comme une profonde nausée des français pour la politique comme elle existe aujourd’hui.
Et ce n’est qu’un piètre soulagement que de savoir que deux autres tiers de la population ont préféré ne pas se tourner vers l’extrême droite. Les médias étrangers considèrent le choix français comme positif et pétri d’espoir mais ici on sait bien que y’a un gros fond de dépit dans la mayonnaise.
Macron président, triste soulagement
Mais voilà, on se dit quand même « ouf ». Et on observe. Pas plus de quelques jours après les résultats, Marion Maréchal-Le Pen annonce son retrait de la vie politique. Coup de grisou. Est-ce le signe que le FN peut imploser ? Puis peu de temps après, Valls annonce qu’il portera les couleurs blanches, roses, bleues et jaunes pour les législatives. Ni une ni deux il est déféré devant devant la commission des conflits du PS en vue d’une exclusion.
Est-ce le signe que le PS peut imploser ? Vous me direz c’était déjà en bonne marche (façon de parler bien sûr). Quant à l’autre côté de la médiane, il n’est guère plus pimpant. Il a vu ses principaux électrons se volatiliser au fur à mesure des primaires et autres mises en examen si bien que son noyau n’est plus.
Gérard Philippe à Matignon, place au pygmalion (ou aux oignons)
Et voilà que celui qui porte un nom et prénom de roi, une jolie barbe avec des reflets modernes et se hisse à un bon mètre quatre-vingt-quatorze est nommé premier ministre. C’est le grand chambardement. Ca faisait longtemps qu’on n’avait pas vu d’homme aussi long à Matignon ou l’Elysée.
Espérons que sa taille lui donne la hauteur nécessaire. Edouard vient de la droite UMP (puis LR), a la gestion d’une des villes les plus laides de France et n’était pas connu des médias. Que fait-on de cela ? D’aucuns disent que ça sent une certaine fraîcheur, que c’est un grand coup de savate dans la vieille politique alors que d’autres beaucoup plus à gauche flairent la naphtaline puisqu’ils voient en lui la poussiéreuse pensée énarquoise.
Et puis voilà qu’aujourd’hui 17 mars, s’enchainent les annonces : un mec de gauche agrégé de lettres et franc-maçon à l’Intérieur, un bonhomme de droite encore énarque à l’Economie. Bayrou écope de la justice et Le Drian comme prévu du ministère des affaires étrangères et de l’Europe (ce changement de dénomination donne le ton d’ailleurs).
Le scepticisme nous gagne d’un coup avec cette nomenclature de profils loin de casser les codes. En revanche un petit rictus se dessine quand on apprend que Nicolas Hulot a accepté l’écologie. On veut voir dans cette nomination quelque chose de positif, lui qui a toujours refusé le job sous les deux précédentes présidences. Nicolas aurait-il du nez ? En tout cas pas de vacances pour Monsieur Hulot cet été on le craint. On se contentera de regarder les pitreries de Tati à la télé.
Quant aux autres… et bien la vérité c’est qu’au final on ne sait pas grand chose, on n’arrive pas à concevoir pareille tambouille. C’est une association moléculaire qui ne figure pas sur tableau de Mendeleïev, alors gageons juste que le mélange prenne dans le tube à essai…Sinon dans pas longtemps on reviendra à Répu et on se donnera rendez-vous à la sortie en face du Camaïeu (ou du Cub Med Gym pour ceux qui prennent la 11) pour aller protester plus violemment que la dernière fois.
Et en attendant tout ça, on regardera l’ouverture du Festival de Cannes en écoutant la musique de Camille Saint-Saëns qui nous fout toujours des frissons au creux des reins. La politique est (possiblement) morte, vive le cinéma !