Notre France est un territoire bizarre, c’est ce qui fait son originalité et même temps son opacité. L’originalité est liée au principe des droits de l’Homme dont la France est le dépositaire, droits de l’Homme qu’il faudra transformer en droits de l’individu car, dans les droits de l’Homme, la femme reste toujours dominée, malgré les beaux principes fondés sur l’égalité. Cela est vrai sur le plan sexuel où elle fait l’objet de harcèlement par l’homme, mais aussi dans les autres domaines sur les plans professionnels et domestiques. Nous sommes dans un pays où l’égalité entre l’homme et la femme est de principe, mais pas dans les faits.
Cette distorsion entre la théorie et la pratique souligne l’opacité dans laquelle nous vivons, pour laquelle certains parlent d’hypocrisie alors que pour d’autres c’est un déni et une volonté de ne rien faire tant que notre propre situation n’est pas troublée par les errements de la société. C’est vrai de nombreux problèmes qui hantent et traversent notre société comme la place des religions. La laïcité absolue à la Valls ou une laïcité ouverte, composite (à définir) à la Macron doit être mesurée à l'aune de l'évolution de la société. Une question fondamentale derrière cette hypocrisie, cette opacité qui traversent la société française : comment parler de la majorité sexuelle de la jeunesse ? Cette question fait écho aux violences sexuelles dont le Président Macron a parlé et il pense qu’il faut un cadre juridique strict.
En parler c’est bien, c’est le rôle du politique, mais la question sociologique et des mœurs demeure. A quel âge doit accorder la majorité sexuelle à notre jeunesse : 11, 13, 15, 18 ? Avant d’aller plus loin, on note que ceux qui posent la question ne la posent que d’un point de vue féminin et non masculin, ce qui, manifestement, continuent d’accélérer le déséquilibre entre les genres masculin et féminin.
Peut-on débattre de la majorité sexuelle concernant la jeunesse dans notre pays?
La question posée sous l’emprise politique et la pesanteur de certains faits sociaux (acquittement d’un homme de 28 ans qui a eu des relations sexuelles avec une jeune-fille de 11 ans dans un parc) favorisent l’émotion. Il y a autour de cette problématique des relations sexuelles plusieurs courants : les libertins, ceux qui pensent qu’au nom de la liberté tout est possible et refusent les normes sociales et juridiques qui les contraindraient.
Il y a les camusiens qui pensent que, selon la formule de Camus, l’homme doit s’empêcher. Ces camusiens, auxquels j'appartiens, estiment que la majorité sexuelle est liée à la majorité politique, civile et juridique : 18 ans. Le débat posé ainsi montre que la société est clivée. Le problème de la relation sexuelle et de la violence qu’elle entraîne évoque la prépondérance de l’individu adulte sur l'adolescent ou l'adolescente. Comment qualifier les relations sexuelles entre adolescents ou entre mineurs ? On voit bien la difficulté intellectuelle dans notre société d’expliquer le passage des relations formelles dans le sens de l’ordre des ordres à celui des relations réelles au sein desquelles la violence sexuelle est dominée par un désordre.
La France a cette caractéristique d’inventer ou de s’inventer des sujets de débat qui sont réels mais néanmoins opaques, mais qui ne trouvent jamais de situation optimale et pour cause, notre pays a beaucoup de mal à traiter les problèmes au fond.
Quel débat public ou non autour de cette question de la majorité sexuelle ?
La France doit regarder ce qu’elle est, ses principes, son organisation, ses traditions et son modèle du vivre-ensemble. La France est traversée par des degrés de différentiations politiques et religieuses. La société française est multiculturelle. Cette multiculturalité secrète des comportements sexuels différents. Chez certains individus devenus français, leurs traditions autorisent que les relations entre un homme mûr et une jeune fille de 12 ans peuvent être considérées comme un rite de passage.
Madame Lhéritier qui vient de nous quitter, ainsi que Levis-Strauss dont elle était la disciple, nous montre cela avec maintes explications. Mais la multiculturalité ne doit pas se dissoudre dans une espèce de désordre moral et politique que la France doit combattre. Sans être monarque, ni chef des libertés individuelles et même si le Canada autorise la majorité sexuelle à partir de 13 ans, il me semble que 18 ans est l’âge pour la France de référence. Evidemment, je ne suis pas naïf et je ne suis pas le fantôme d’un ordre meilleur car les individus, sans m’attendre, feront ce qu’ils voudront, au moins j’ai dit.