Le Burkina Faso a été victime d’une attaque terroriste. Ce pays est le maillon faible du groupe des cinq pays du Sahel concerné par le terrorisme djihadiste. Les cibles concernées étaient l’Ambassade de France, l’Institut français et l’Etat-Major du Burkina Faso au sein duquel devait se tenir une réunion du G5 Sahel. Le G5 Sahel regroupe cinq pays (Mali, Mauritanie, Tchad, Burkina Faso, Niger) formés par la France pour lutter contre le Djihadisme en Afrique. Le G5 Sahel est financé par la France, il entretient des accords de coopération financière et de formation avec Paris.

Le GSIM (Groupe pour le Soutien de l’islam et des musulmans) avec à sa tête Iyad Ag Ghaly, le chef touareg du mouvement djihadiste Ansar Dine, estime que les attaques récentes constituent la réponse aux interventions de la force Barkhane au sud de l’Algérie et au nord du Mali contre les djihadistes. Ces attaques de l’armée française ont fait beaucoup de victimes parmi les djihadistes et l’information est passée quasi inaperçue dans les médias français, même si ceux-ci ont relaté de façon sibylline la victoire de l’armée française et la mort de plusieurs terroristes.

La recomposition des forces djihadistes dans la zone sahélienne

La lutte contre le terrorisme est devenue le fer de lance du président Macron.

Il s’agit de veiller à l’intégrité territoriale des pays concernés comme le Mali ou le Niger, mais la France tient aussi à ses intérêts économiques (exploitation de l’Uranium au Niger avec Areva, gisements de phosphate au Mali). Nous sommes donc à la frontière de la géopolitique et de la volonté de la France de défendre ses intérêts en Afrique, mais aussi de protéger ses anciennes colonies qui sont quasiment exsangues dans les domaines des troupes militaires formées, de l’armement, de l’aviation militaire et des moyens de financement sur le long terme.

Aujourd’hui on assiste à une recomposition des forces djihadistes au centre du Mali avec le GSIM malien-massina. Cette recomposition construit l’alliance entre Peuls du centre du Mali et les Touaregs du nord dirigés par Iyad Ag Ghaly. Cette zone sahélienne risque d’être en accéléré le nouveau terreau du terrorisme djihadiste en Afrique car au sein du GSIM on trouve de nombreux djihadistes venant l’Al Qaïda, de Daesh, de Boko Haram et de combattants recrutés dans les différents pays du groupe G5 Sahel confrontés à des difficultés économiques et à des pratiques de mauvaises gouvernances qui créent l’exaspération et le désespoir de jeunes qui retrouvent dans les groupes djihadistes un faux terreau d’espoir, mais un terreau.

Au Mali, pays membre du G5 ,où le GSIM se ressource, les Maliens sont plus préoccupés par l'élection présidentielle de 2019 et le président Ibrahim Boubacar Keita est plus concerné par sa reconduite à la tête de l'Etat que par la volonté de lutter contre la corruption et la mauvaise gouvernance. On apprend aussi que cet attentat a été rendu possible par la complicité de certains militaires burkinabés.

La France et la force Barkhane pourront-elles continuer à combattre le terrorisme djihadiste sur le long terme ?

Cette question suscite l’évitement et l’agacement des responsables politiques africains et français. Tous en cœur répondent que la coopération entre la France et le G5 Sahel est marquée par le sceau du long terme.

Rien n’est moins sûr, même si les budgets militaires ont été augmentés en France, même si le président Macron estime que les pays du G5 doivent très vite muscler leurs forces et se défendre seuls face au terrorisme avec une aide minimale de la France, on peut penser que la France, sur le long terme, va sortir du champ du Sahel. Le terrorisme au Sahel peut-il impacter la stabilité en France et en Europe ? Seuls les spécialistes de la lutte contre le terrorisme peuvent répondre. Néanmoins, sur le plan humain on s’aperçoit que les troubles dans le Sahel, la mauvaise gouvernance dans certains pays membres du G5 accélèrent les migrations des populations de ce pays vers l’Europe et la Méditerranée est souvent, pour certains d’entre eux, le cercueil et le tombeau d’un périple d’espoir vers un Occident meilleur.

Or l’Occident n’est plus cet Eldorado du modèle de croissance des trente glorieuses. Il faut néanmoins soutenir le président Macron qui, de ce point de vue, est dans la continuité de la politique de François Hollande en matière lutte contre le terrorisme. Il faut aussi apporter un soutien humaniste au peuple burkinabé qui ne demande qu’à vivre en paix. La fin du terrorisme au Sahel n’est pas pour demain, les pays membres du G5 Sahel et l’Union africaine doivent le savoir. C’est à eux d’organiser les moyens militaires de défense de leurs territoires. La France apporte sa contribution à tous les niveaux, mais jusqu’à quand ?