La Privatisation des entreprises est-elle une solution pour le décollage et le Développement inclusif des pays africains ? Réponse oui, si les pays africains, divers en fonction de leur régime politique, de leur taux de croissance et de leur poids démographique, acceptent de faire un choix clair en faveur d’une privatisation encadrée par les règles de bonne gouvernance, ce qui ne semble pas être le cas à l’heure actuelle. La privatisation dans une économie de marché nécessite le respect d’un certain nombre de clauses (droit de propriété, contrats, capital, profits et de rapatriement du capital si l’actionnaire privé de référence est étranger).

La privatisation fait intervenir dans les pays africains trois types d’acteurs: l’Etat, des actionnaires étrangers et des actionnaires locaux. Comment valoriser un modèle de privatisation à trois niveaux : actionnaires locaux majoritaires, actionnaires étrangers majoritaires, partenariat mixte Etat/actionnaires étrangers ou Etat/actionnaires locaux ? Souvent en Afrique la privatisation est considérée comme le moyen de renflouer les finances publiques au plus mal, ce qui est ici une justification dans les faits de la mauvaise gouvernance des finances publiques. La privatisation doit être réfléchie, être un facteur de production et donc de création de richesse et d’emploi, au même titre que le sont le travail, le capital et le progrès technique.

Il est donc urgent de faire de la privatisation un business-modèle encadré et mûri par les pouvoirs publics africains.

La privatisation en Afrique : business-modèle politique et économique

Après les indépendances (années 50/60), la plupart des pays africains sont confrontés aux problématiques de développement économique. Le collapsus de certains Etats africains au niveau de la gouvernance, les échecs répétés des nationalisations des entreprises après les indépendances obligent à une réflexion vers la privatisation comme nouveau business-modèle.

Les pays africains ont des gouvernances différentes au niveau de la gestion des entreprises. Dans les pays d’obédience anglo-saxonne (Nigéria, Ghana, Afrique du Sud), le rôle de l’entreprise est bien perçu au plan politique et un pays comme le Nigéria est l’un des plus ouverts aux privatisations dans de nombreux domaines (pétrole, services bancaires, etc.).

Pour le Nigéria, le recours à la privatisation est un moyen d’ouvrir les secteurs de l’économie à la concurrence et de bénéficier d’un management plus adapté aux capitaux et aux nouvelles technologies. En Afrique francophone, de l’Ouest, comme du Centre, la privatisation devient un expédient nécessaire pour vendre des entreprises nationales incompétentes et pallier à l’incompétence des pouvoirs publics dans la gestion des entreprises. A la différence du modèle africain anglo-saxon au sein duquel les appels d’offres sont valorisés, en Afrique centrale les privatisations passent par des cessions de gré à gré, ce qui amplifie les problématiques de corruption et d’évasion fiscale. Oui à la privatisation bien conçue et bien organisée par les pouvoirs politiques africains, encore faut-il que ceux-ci soumettent les dossiers à traiter à leurs ressources nationales compétentes professionnellement.

Pourquoi l’Afrique reste-t-elle en marge des privatisations ?

Après les plans d’ajustement structurel initiés par le Fonds monétaire international à la fin des années 90, plusieurs pays africains (Rwanda, Angola, Ghana, Zambie, Madagascar, etc.) ont privatisé certains secteurs économiques (eaux, électricité, mines) avec de faibles résultats. Cette privatisation a été voulue par la Banque mondiale et le Fonds monétaire qui avaient conditionné l’octroi de leurs crédits à des programmes de libéralisation et de privatisation. La gestion des ports au Sénégal et en Guinée a été confiée à des opérateurs étrangers. La réussite de la privatisation des télécoms et l’introduction du portable en Afrique doivent être saluées.

L’Afrique doit repenser son modèle de gouvernance des privatisations. Il ne suffit pas de créer des agences de promotion des investissements pour que l’Etat soit efficace. Encore faut-il que ces agences soient pilotées par des techniciens compétents et non désignés sur la base ethnico-clanique. La plupart des pays africains ont beaucoup de mal à valoriser leur programme d’infrastructures, de distribution d’eau, de traitement des déchets, de la gestion des eaux. Quelques privatisations dans ce domaine ont d’abord profité à certains proches du régime politique, sans amélioration notable du service rendu. Ainsi vont ces nouvelles Afriques qui doivent réfléchir sur leurs nouveaux outils (privatisation) de développement.