Le mouvement des Gilets jaunes a démarré le 17 novembre 2018 sur une double revendication : une baisse des taxes sur le carburant, une hausse du pouvoir d’achat et plus de justice sociale grâce à la meilleure répartition des impôts et une critique contre les plus riches. "Dans le même temps, l’évasion fiscale n’a jamais été aussi importante et les plus riches se sont vu offrir de multiples allègements d’impôts : suppression de l’ISF, flat tax de 30 % pour les revenus du capital qui ne sont plus soumis à l’impôt progressif, baisse de l’impôt sur les sociétés…" écrit Libération.

Le président Macron a pris acte des revendications des Gilets jaunes et propose un grand débat. Certains de nos compatriotes estiment que les impôts et taxes sont trop élevés. La disparition de l’impôt de solidarité sur la fortune le 01/01/18 a mis le feu aux poudres en faisant de Macron le Président des riches. Le concept de justice sociale est plus un concept philosophique que politique. "... cette réflexion sur la justice de la fiscalité. Peut-être parce que ce concept multiforme est difficile à saisir et intimement associé à son interprétation la plus traditionnelle, celle que la philosophie occidentale a toujours portée, une valeur morale synonyme d’égalité." écrit Le Monde. Dans son ouvrage « Ethique à Nicomaque » Aristote explique que la notion de justice sociale ne peut s’adresser qu’à une société dans laquelle les individus sont considérés comme des proportions à parts égales.

Pour lui la justice sociale est inatteignable, seule l’injustice peut être combattue. L’économiste autrichien Hayek, estime que le concept de justice est vide et qu’il faut plutôt parler d’équité. John Rawls explique que la justice est d’abord une forme d’équité qui valorise la liberté de tous pour accéder aux ressources. S’il y a des inégalités économiques, elles doivent être combattues au plus grand bénéfice des plus désavantagés.

La notion de justice est tensionnelle par essence. Comment, face à un concept aussi instable, instaurer le concept de justice sociale grâce à la baisse des impôts ?

Baisse des impôts et valorisation de l’égalité des chances

Baisser les impôts c’est accepter de façon politique que l’Etat modifie les taux, les assiettes et dise avec précision les personnes bénéficiaires des taxes directes et indirectes.

La fiscalité française depuis longtemps est considérée comme kafkaienne, illisible et favorisant les inégalités en privilégiant les gros revenus et les gros patrimoines au détriment des positions fiscales des classes moyennes qui seraient les vaches à lait du système (plus de 50% des foyers fiscaux ne paient pas l’impôt en France). Si l’on doit baisser les impôts afin de restaurer la justice sociale, il faut que le président Macron dise au mois d’avril lors de la restitution du débat national, quels types d’impôts baisser et quelles sont les catégories sociales concernées. On ne peut baisser les impôts de ceux qui n’en paient pas, mais au nom de la justice sociale et de l’équité, on peut dire avec précision quelles sont les CSP concernées et les montants.

La baisse des impôts entraîne des ressources minorées pour le financement des dépenses publiques. Il faut en même temps dire quel type de dépenses publiques supprimer car gouverner, c’est choisir.

La comparaison de la France avec les Etats du nord de l’Europe

Les pays nordiques sont considérés comme des pays où la pression fiscale est très forte mais socialement juste. Le taux d’imposition du revenu et du patrimoine est de l’ordre de 36% au Danemark alors qu’il n’est que de 20% en France. La France a un taux de TVA de 20% (avec des taux intermédiaires réduits de 10%, 5.5%, 2.10%) ce qui constitue une assiette fiscale TVA de l’ordre de 14% alors qu’au Danemark le taux est de l’ordre de 24%. Ceux qui pensent qu’on peut diminuer le taux de TVA en France se trompent car il n'est pas très élevé comparé avec les pays du nord dont la pression fiscale est forte.

En France, le taux de TVA n’est pas très élevé et pourtant les Français ressentent une injustice fiscale et paradoxalement dans les recettes de l’Etat c’est la TVA (154 milliards en 2018) qui rapporte le plus. Le problème n’est pas la TVA qu’il faudrait baisser, mais la structure globale des prélèvements obligatoires (44% par rapport au PIB), les dépenses publiques (54% par rapport au PIB) et la dette publique (98% par rapport au PIB). Le gouvernement doit plus agir sur les prélèvements portant sur les charges patronales et salariales sur le travail. Baisser les impôts c’est bien, mais pour que la justice sociale soit effective, il faut favoriser la formation, l’offre des biens et des services des entreprises sur le marché national et mondial et créer les conditions de la compétition française en Europe et dans le monde.